Avant de posséder un siège épiscopal, Annecy fut le lieu de résidence des évêques de Genève contraints à l’exil par la Réforme implantée dans leur cité. C’est en 1526 que le chapitre cathédral quitte la cité genevoise pour se réfugier à Annecy, et ce n’est qu’en 1568 que l’évêque s’y installe définitivement66, « sans renoncer au titre de Genève »67. Pour ramener à l’orthodoxie les parties acquises aux idées de Calvin, une lente reconquête est faite par François de Sales, avant qu’il ne soit promu évêque de Genève-Annecy en 1602. S’il réussit à faire revenir le Chablais au catholicisme, il échoue à reprendre Genève, qui reste aux mains des calvinistes.
La Révolution et l’entrée des troupes révolutionnaires en Savoie, le 22 septembre 1792, bouleversent « un équilibre séculaire, à peine corrigé dans les dernières années de l’Ancien Régime »68. Le 8 février 1793, les réformes religieuses françaises suppriment les cinq diocèses69 existant sur les terres savoyardes. Alors que Chambéry reçoit le pouvoir politique en devenant le chef-lieu du département du Mont-Blanc, Annecy obtient, à titre compensatoire70, le siège épiscopal. L’abbé Panisset, élu évêque constitutionnel71 le 6 mars 1793, prend possession de sa cathédrale le 14 avril ; il ne reste que peu de temps en fonction, le culte étant interdit peu après72. Le serment civique est massivement refusé dans le diocèse de Genève, comme dans celui de Maurienne, alors qu’il est plutôt bien accueilli dans ceux de Chambéry ou de Tarentaise. Genève ne compte que 15 % de curés jureurs. Ceux-ci se trouvent dans l’avant-pays « méridional, sur les marges rhodaniennes et lémaniques en contact avec la France et Genève et dans la vallée de l’Arve »73, alors que les prêtres réfractaires reçoivent souvent un bon accueil dans les villages de montagnes74. Le 8 janvier 1794, Albitte, député de la Seine-Inférieure, est envoyé en mission dans le département75, où il se fait remarquer par une politique « religieuse radicale »76, notamment par l’abjuration forcée des prêtres ou les destructions de clochers.
Le 18 novembre 180177, suite à la disparition du diocèse de Genève, Annecy perd le siège épiscopal78 au profit de Chambéry qui se voit annexer le titre de Genève ; deux ans plus tard, le diocèse de Chambéry et Genève compte six cent vingt-sept paroisses. En 1819, Genève, à nouveau indépendante, réclame et obtient son « autonomie ecclésiastique face à la Savoie »79 ; le bref Inter multiplices du 20 novembre80 la rattache au diocèse de Lausanne.
Il avait quitté Genève en 1533, mais c’est avec Mgr Justiniani, nommé en 1568, que la résidence des évêques de Genève est définitivement fixée à Annecy. Ils ne peuvent plus retourner dans la cité de Calvin, alors sous la garde des Confédérés.
c. sorrel, « À qui appartiennent les cathédrales ? »…, op. cit., p. 1.
c. sorrel, dir., Dictionnaire du monde religieux…, La Savoie, op. cit., p. 11.
Ibid. : « Les commissaires de la Convention nationale, en application de la Constitution civile du clergé, suppriment les cinq diocèses qui se partagent les terres savoyardes (Genève, Tarentaise, Maurienne, Belley et Chambéry) ».
c. sorrel, « À qui appartiennent les cathédrales ? »…, op. cit., p. 2.
c. sorrel, dir., Dictionnaire du monde religieux…, La Savoie, op. cit., p. 318.
Panisset est le premier évêque constitutionnel à se rétracter en 1796.
c. sorrel, « La Savoie, terre catholique : les enseignements des enquêtes de sociologie religieuse », in Le Millénaire de la Savoie. Les fondements historiques et culturels de l’identité savoyarde, Actes du colloque de Ripaille (4 octobre 2003), Thonon-les-Bains, Académie chablaisienne, coll. Documents d’histoire savoyarde, 2005, p. 140.
p. judet, « La terre, la ville et l’usine », in c. sorrel, dir., Histoire de la Savoie en images…, op. cit., p. 339.
c. sorrel, s. milbach, « Entre le Piémont et la France », in c. sorrel, dir., Histoire de la Savoie en images…, op. cit., p. 273.
Ibid.
f. perron, g. grandchamp, « Les évêques d’Annecy… », Annesci, op. cit., p. 12.
Pourtant Annecy possédait un grand séminaire, crée dès les lendemains mêmes du Concile de Trente, et un vaste palais épiscopal accolé à la cathédrale Saint-Pierre.
c. sorrel, dir., Dictionnaire du monde religieux…, La Savoie, op. cit., p.11.
C’est par le bref Temporum vices du 31 janvier 1821 que le titre de Genève est détaché de celui de Chambéry pour être uni à celui de Lausanne.