III. La guerre de 1914-1918

La Première Guerre mondiale marque un tournant dans l’histoire des sociétés contemporaines, laissant espérer dans les premiers mois un changement religieux. Ce conflit modifie profondément les mentalités de ceux qui combattent. Les prêtres font la rencontre des hommes, alors qu’ils étaient plutôt habitués à une fréquentation féminine des églises, à l’inverse les hommes font la connaissance des prêtres. Des amitiés naissent dans les tranchées et, une fois la paix revenue, elles perdurent et permettent une évolution dans les modes de pensée. Une partie des évêques nommés à partir de 1926 sont d’anciens combattants et leur façon de mener l’action pastorale n’est sans doute pas étrangère à cette expérience des tranchées1511. La France attaquée estime être dans son bon droit de se défendre. Le conflit est alors perçu comme un combat de la Civilisation contre la Barbarie ; certains y voyant même un affrontement entre catholiques et protestants. Pour un prêtre « en cette année 1914, la France lutte avec une admirable vaillance contre les Allemands bien plus barbares que les Turcs au XVIIe siècle »1512. Annette Becker rappelle d’ailleurs que certains combattants sont des miles christi 1513 qui meurent en véritables croisés1514.

Nous pouvons donc nous demander comment les diocésains vivent la mobilisation et comment le clergé fait face à la désorganisation née de la mobilisation de ses membres. Nous pouvons également nous interroger pour savoir si le retour aux autels se fait de façon durable ou non. Tous les diocésains sont concernés par le conflit, toutes les associations entrent en sommeil à l’exception de la Ligue des femmes françaises qui n’a de cesse de montrer ses actions charitables. Enfin, nous pourrons nous demander quelle est la situation sur le front avant de dresser un bilan de ce conflit qui fit plus d’un million trois cent mille morts.

Près de vingt-cinq mille prêtres et séminaristes sont mobilisés et seul un tout petit nombre sert comme aumôniers militaires1515. La plupart étant affectés dans les services de santé comme ambulanciers ou brancardiers. Devant un besoin pressant d’union des Français, les autorités civiles « consent[ent] à solliciter le concours des “autorités religieuses” (on revenait à l’emploi de cette expression qu’en stricte rigueur le régime de Séparation interdisait) et ce concours ne manqua jamais lorsqu’il s’agit de prêcher aux Français l’accomplissement du devoir civique »1516.

Tout au long du conflit prières, dévotions au Sacré-Coeur, à la Vierge Marie et aux autres saints se déroulent sur la quasi-totalité du territoire national. Le diocèse suit ce mouvement.

Notes
1511.

Sur cette question, voir f. le moigne, Les évêques français de Verdun à Vatican II, une génération en mal d’héroïsme, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2005, 373 p.

1512.

L’ami des familles de Saint-Eustache, 29 août 1914, p. 142.

1513.

a. becker, « Les dévotions des soldats catholiques pendant la Grande Guerre », in n.-j. chaline, dir., Chrétiens dans la première guerre mondiale…, op. cit., p. 16.

1514.

a. latreille, r. remond, Histoire du catholicisme en France…, op. cit., p. 556.

1515.

Ibid., p. 558.

1516.

I bid., p. 559.