d. Une mission à trois temps

La mission ayant lieu sur plusieurs années, sa préparation peut durer d’un an et demi à trois ans, suivant les cas. À ce moment-là, seules des personnes averties participent à cette étape, qu’il s’agisse de prêtres ou de laïcs. Le lancement du travail est fait conjointement par le vicaire général en charge du secteur et le directeur de la mission. C’est au cours de cette période que s’élaborent les travaux des différentes commissions évoquées précédemment. Des commissions de mission se mettent en place dans le cas de celles d’Annemasse, de la Vallée Verte, de la Vallée d’Aulps ou encore de celle de l’archiprêtré de Bons5004. La préparation des contacts globaux précède toujours la mise en place des autres commissions.

Le temps écoulé entre le lancement de la mission et celui des premières commissions varie considérablement suivant les cas. À Douvaine, six mois s’écoulent entre l’annonce de la mission et la mise en place des premières commissions comme celles de la presse, du catéchisme ou encore de la liturgie, alors que ce délai est de dix mois entre le lancement de la mission et la mise en place des commissions d’action catholique5005.

Au terme de ce temps de préparation, des documents sont présentés et des journées de « sociologie » sont organisées, soit pour les religieux, soit pour les laïcs. Tel est le cas en 1961, où, le 25 juin, le Père Marc présente les résultats de la mission aux religieux, alors que le père Vulliez fait la même chose pour les laïcs à Maxilly, le 22 octobre5006. Lors de journées pastorales, les autres commissions présentent leurs travaux au comité directeur5007. Les documents émanant du CPMI soulignent que dans l’idéal, il faudrait que jusqu’à la prémission, une journée pastorale soit organisée environ toutes les six semaines5008. Il semble cependant que dans le cas du diocèse, ces recommandations n’ont pas été véritablement suivies5009. Cette phase plutôt confidentielle, et réservée à un petit nombre d’initiés, se poursuit par le temps de la prémission à proprement parler. Cette dernière, impliquant les laïcs, a pour but « d’éveiller – ou de réveiller – la foi des chrétiens et leur esprit missionnaire »5010. C’est au cours de cette période qu’il est nécessaire de trouver « des troupes », de « les convertir spirituellement », et de « leur donner une technique apostolique »5011.

Lors de la première mission, celle de la vallée de l’Arve, des questionnaires sont distribués aux laïcs afin qu’ils puissent prendre une part active à la mission. Ce questionnaire, une fois rempli, est remis au prêtre en charge de la paroisse, qui le communique ensuite à l’évêque. Les adultes sont invités à porter un intérêt particulier à la pratique et à la vie spirituelle personnelle qui doit se faire de plus en plus fervente, notamment par une amélioration de l’assistance régulière à la messe, à la confession fréquente, à l’assistance aux retraites et récollections. Leur engagement doit se faire plus important au sein de la paroisse, mais aussi pour l’évangélisation des milieux, notamment en appartenant à un mouvement d’action catholique5012. Pour les plus jeunes, l’engagement dans les milieux d’action catholique est également présent, mais de façon plus engagée, notamment dans le cadre des loisirs. Il leur est demandé de se « conduire en chrétien » et « d’entraîner les autres à se distraire sainement » et de faire la « connaissance des [autres] jeunes » du quartier5013. C’est au cours des réunions tenues lors de la prémission que les laïcs découvrent les objectifs de la mission. Cette étape peut durer entre cinq et douze mois, mais faute de documents explicites aux archives diocésaines, il n’est pas véritablement possible d’établir avec précision les actions qui sont menées au cours de cette période.

Au terme de ces mois et même de ces années de préparation, la mission peut enfin avoir lieu. La première semaine est réellement consacrée au lancement de la mission. Afin d’accélérer le lancement de la mission à l’église, il est possible que des réunions soient organisées dans les hameaux5014. Le document de la vallée de l’Arve rappelle qu’il est possible d’organiser une réunion de « communauté chrétienne » pour « organiser le hameau en communauté chrétienne active »5015. Des missionnaires se rendent d’ailleurs dans les différentes maisons où ils peuvent parfois être accompagnés par des membres du clergé paroissial. La messe peut être célébrée dans les hameaux. La seconde semaine est consacrée à la mission à l’église. À cette occasion, les missionnaires prêchent les sermons du matin et du soir. Dans le cas de la vallée de l’Arve, l’assemblée est centrée sur « la liturgie de la parole » et elle « comprend […] une glose dont le thème est laissé aux missionnaires »5016. Les instructions du matin se font soit entre deux messes matinales, soit elles sont répétées en deux fois ; le thème étant laissé au choix du chef de mission5017. La dernière semaine est celle de la mission spécialisée. Les réunions, qui peuvent être spécialisées, sont organisées par secteur géographique et socio-économique. Ces rencontres sont à la fois des moments de réflexion et des temps nécessaires pour l’acheminement des intéressés vers les mouvements d’action catholique et à la création de ces mouvements d’action catholique. Le temps de la mission correspond également au lancement véritable des différents services comme ceux de l’entraide ou de l’information. Quelques temps après la fin de la mission, les différents acteurs se réunissent afin de dresser le bilan de la rencontre. Les commissions mises en place au cours des mois de préparation ne disparaissent pas toutes, puisque quelques-unes se modifient. Tel est le cas des comités paroissiaux de mission qui deviennent les comités paroissiaux5018.

Dans le cas de la mission de l’Arve, le plan établi pour les paroisses ouvrières rappelle que la première semaine est consacrée à la « réunion des équipes des responsables de secteur JOC/JOCF, pour une dernière mise au point de la mission du monde ouvrier, et la préparation des réunions de sections locales »5019. Au cours de la deuxième semaine, les jeunes chrétiens des mouvements « assistent à la mission de l’église et y amènent leurs camarades qui ne sont pas encore membres des mouvements. Ils songent aussi très spécialement à y amener les ruraux qui travaillent avec eux et qui ne remonteront au village que le samedi ». Enfin, la dernière semaine voit la mise en place de « deux réunions successives de masse, d’un côté pour les garçons, de l’autre pour les filles de quinze à vingt-cinq ans »5020. Ces rencontres s’adressent principalement aux non pratiquants, même si ceux qui sont habitués de l’Église peuvent s’y rendre aussi. Une journée est consacrée à la réunion des cadres « pour les militants et dirigeants afin d’assurer l’épaulement de tout ce qui sera sorti de la mission »5021. Dans le cas des paroisses mixtes5022 de la vallée de l’Arve, la première semaine doit être consacrée à la réunion « générale de tous les jeunes gens et de toutes les jeunes filles (séparément) quelle que soit leur profession, sur un programme préparé par les aumôniers JAC ». La seconde semaine, quant à elle, permet aux ruraux qui travaillent dans la vallée de retrouver « dans la paroisse du lieu de travail et [d’] y [rencontrer] les dirigeants JOC et JOCF »5023. Enfin, la dernière semaine voit la récollection des jeunes. Un schéma semblable se retrouve pour les adultes. Les réunions de la première semaine sont destinées à intéresser les chrétiens assez pratiquants mais non encore engagés « ayant [cependant] de la bonne volonté, une certaine influence et encore un peu jeunes »5024. Des réunions d’évangélisation sont organisées pour permettre de ramener le plus rapidement à la foi les non pratiquants. Elles ont principalement lieu la seconde semaine de la mission et les chrétiens présents aux « réunions paroissiales » doivent y repérer « leurs camarades de travail ou de quartier qui y sont présents »5025.

Pendant plusieurs années, un secteur vit donc au rythme de la mission alors que dans le passé, cela ne durait que trois semaines et le but principal était le plus grand nombre de retours ; la situation est différente avec les missions régionales. Il est donc intéressant de s’arrêter sur les résultats de ces enquêtes. Nous pouvons en effet nous interroger sur ce qu’elles ont apporté au diocèse.

Notes
5004.

Respectivement en 1958 pour les trois premières et 1959 pour celle de Bons-en-Chablais.

5005.

ADA. 8 E 1961. Mission de Douvaine. Rapport du chanoine Duret.

5006.

ADA. 8 E 1964. Mission d’Évian-Saint-Paul.

5007.

Il reste difficile de donner avec précision la fréquence des réunions, notamment à cause des lacunes des archives diocésaines, mais également parce que les documents présents ne font véritablement état de périodicité des réunions.

5008.

ADA. 8 E Mission. Pilotis, CPMI, « Série méthodologie n° 2, les commissions pastorales », p. 12.

5009.

n. broisat, Le diocèse d’Annecy…, op. cit., p. 140.

5010.

Ibid., p. 141.

5011.

ADA. 8 E 1955. Mission de la vallée de l’Arve.

5012.

Ibid.

5013.

Ibid.

5014.

ADA. 8 E 1955. Mission de la vallée de l’Arve.

5015.

Ibid.

5016.

Ibid.

5017.

Ibid.

5018.

ADA. 8 E 1958. Mission du Val d’Arly. Le père d’Haëne, S.J., rappelle que « les comités peuvent rester comme d’authentiques comités paroissiaux ». Dans le cas présent, le directeur de mission souligne que cet aspect n’est pas possible à « Saint-Nicolas et à Héry » puisque les « dirigeants sont plus des personnalités que des représentants des mouvements ». Le vicaire général Duret dresse un constat semblable pour la mission de La Roche-sur-Foron – Reignier puisqu’il déclare que « les comités de mission deviennent des comités paroissiaux » et qu’une « réunion aura lieu tous les trimestres avec le curé ». Lors de la mission de la vallée d’Aulps, le même constat est dressé puisqu’il est alors rappelé que « les comités de mission, sauf deux exceptions, ne sont pas authentiques, à cause de l’absence de vrais mouvements » et que « ceux qui les composent sont davantage des personnalités dévouées que des chefs de file ». ADA. 8 E 1959. Mission du secteur Saint-Jean-d’Aulps – Morzine.

5019.

ADA. 8 E 1955. Mission de la vallée de l’Arve.

5020.

Ibid.

5021.

Ibid.

5022.

Il s’agit de paroisses à la fois rurales et ouvrières.

5023.

ADA. 8 E 1955. Mission de la vallée de l’Arve.

5024.

ADA. 8 E 1955. Mission de la vallée de l’Arve.

5025.

Ibid.