2-4) Les ergastines athéniennes.

Les ergastines (ἐργαστίναι)« celles qui tissaient le péplos 49 » étaient les parthénoi 50 athéniennes chargées de tisser le péplos offert au xoanon de la déesse Athéna Polias lors de la fête des Panathénées qui célébrait la naissance d’Athéna à la fin du premier mois de l’année attique, le 28 hécatombaion 51. Il existait les petites Panathénées, annuelles qui devaient durer un ou deux jours et les grandes (μεγάλα) qui avaient lieu tous les quatre ans et duraient environ une semaine, du 23/24 au 30. Les deux fêtes présentaient un schéma semblable, les concours côtoyaient les cérémonies sacrées. Cependant, les grandes étaient plus fastueuses, de type panhellénique, elles attiraient des gens venus de toute la Grèce. Les concours étaient plus nombreux et diversifiés : aux concours athlétiques s’ajoutaient des concours musicaux, hippiques, choraux et une épreuve de régate. Les vainqueurs recevaient des amphores contenant l’huile de l’olivier sacré et des couronnes. Ces concours étaient ouverts aux non Grecs, ce qui n’étaient pas le cas des petites Panathénées où seuls les Athéniens, s’affrontant par équipe, avaient le droit de participer. Une veillée avait lieu, où filles et garçons chantaient et dansaient toute la nuit. Le jour du 28 était réservé aux cérémonies rituelles, la fête commençait par une course de torche dite lampadédromie : les participants, partant de l’autel d’Eros dans les jardins d’Acadèmos, devaient apporter leur torche encore allumée à l’autel de la déesse sur l’Acropole. Au début du jour, la procession débutait, elle parcourait toute la cité par la grande voie sacrée dite voie des Panathénées pour rejoindre l’Acropole. A partir de l’époque classique, le péplos était accroché comme une voile sur un navire durant la procession52. Une fois arrivé, il était remis à la déesse53, puis le sacrifice avait lieu et enfin le partage et le banquet. Toute la cité assistait à la fête, et lors des grandes Panathénées, Grecs et non Grecs prenaient part aux cérémonies. L’origine de cette fête est obscure, on voit généralement les grandes comme un dédoublement plus fastueux des petites54. Tisser le péplos de la déesse était un grand honneur, des décrets civiques datant de l’époque hellénistique furent retrouvés permettant de mieux connaître ces jeunes filles mais aucune représentation iconographique n’est avérée avec certitude. De plus, certaines questions demeurent à leur sujet.

Notes
49.

Hésychius, sv. ἐργαστῖναι.

50.

Contra : N. Robertson, « The Praxiergidae Decree (IG I3 7) and the Dressing of Athena’s Statue with the Peplos », GRBS 44 n° 2 (2004), p. 142-143 : les ergastines étaient des gynaikes formant un groupe restreint.

51.

Harpocrate, Photius, Souda sv. Παναθήναια ; R. L. Farnell, Cults I, p. 295-298 et A. Mommsen, Feste der Stadt Athen, p. 41-159 et p. 155-156 voyaient dans les Panathénées une fête agraire de remerciement pour la nouvelle moisson devenue de plus en plus politique au fil du temps pour devenir la grande fête civique de la cité attique, suivis par  E. Fehrle, Die Kultische Keuscheit im Altertum, p. 181-182. Théorie rejetée par L. Ziehen, RE Panathenaia, p. 488-489. Sur la fête des Panathénées : L. Deubner, Attische Feste, p. 22 à 35 ; F. Vian, La guerre des géants, p. 246-261 ; J.A. Davison, « Notes on the Panathenaea », JHS 78 (1958), p. 23-42 ; A. Brelich, Paides e Parthenoi, p. 314 à 348 ; J.D. Mikalson, The Sacred and Civil Calendar of the Athenian Year, p. 33-34 ; H. W. Parke, Festivals of the Athenians, p. 33 à 50 ; W. Burkert, Homo Necans, p. 193-197 (éd. Fr.) et Greek Religion, p. 231-233 ; J. Neils, « The Panathenaia : an Introduction », p. 13-27 ; P. Brulé, « Fêtes grecques, périodicité et initiations : Hyakinthies et Panathénées », p. 19-38 qui fait le parallèle entre ces deux fêtes ; B. Holtzmann, L’Acropole d’Athènes, p. 229-240.

52.

Plutarque, Démétrios, 10, 5 et 12, 3-4 rapporte que les Athéniens en -307/6 décidèrent de mettre sur le péplos de la déesse des images d’Antigone et de son fils Démétrios avec celle des dieux pour les remercier d’avoir libéré Athènes. Mais une bourrasque déchira le péplos lors de la procession et cassa le mât du bateau. Ce dernier fut introduit au Vème av. J.C pour illustrer sa puissance maritime et sa victoire sur les Perses : R.L. Farnell, Cults, I, p. 298 ; H.W. Parke, op. cit., p. 39-40 ; E. W. J. Barber, « The Peplos of Athena », p. 113.  

53.

Le péplos était remis à la déesse le 28 hécatombaion mais nous ne savons pas quand la divinité en était revêtue. E.W.J. Barber, op. cit., p. 113 ; E.B. Harrison, « The Web of History : a Conservative Reading of the Parthenon Frieze », p. 203 ; B. Holtzmann, L’Acropole d’Athènes, p. 222 :  il était remis aux Praxiergides, un génos qui avait la charge de s’occuper de la statue de culte et de revêtir la déesse du péplos. Ils habillaient un autre jour le xoanon du nouveau péplos. IG II2 1060 fr. b 1-4 (fin IIème av. J.C.) stipule en effet « …. les Praxiergi]des reçoivent le péplos annuel [… et ….] ils enlèvent l’himation et le remettent aux [… ». (cf. S.B. Aleshire et S.D. Lambert, « Making the Peplos for Athena : a New Edition of IG II2 1060 + IG II2 1036 », ZPE 142 (2003), p. 72-73 pour l’étude de cette inscription très fragmentée).

54.

Selon les sources anciennes, à l’origine la fête s’appelait Athenaia (Harpocrate sv. Παναθήναια ; Pausanias, I, 2, 1 et VIII, 2, 1). Les petites Panathénées auraient été créées par Erichtonios (scholie à Aristide, Panathénaïque, XIII, 189. 4 (III, p. 323 éd. G. Dindorff) et Hygin, Astronomie, II, 13, 2 ; Harpocrate sv. Παναθήναια qui cite Istros) ou par Thésée lorsqu’il unifia l’Attique (Plutarque, Thésée, 24, 3 ;  Pausanias, I, 2, 1 et VIII, 2, 1 ; Photius et Souda, sv. Παναθήναια). Les grandes Panathénées, dédoublement des petites, auraient été instituées au VIème av. J.C. par Pisistrate (Scholie à Aristide, Panathénaïque, XIII, 189. 4 (III, p. 323 éd. G. Dindorff) ; Harpocrate, sv. Παναθήναια) sur le modèle d’Olympie avec la création de concours et la périodicité de quatre ans. H.W. Parke, op. cit., p. 33 ; W. Burkert, Homo Necans, p. 194 (éd. Fr.) et Greek religion, p. 232-233 ; R. Parker, Athenian Religion, p. 89-92. Contra : A. Brelich, op. cit., p. 317 à 320 qui voit les petites comme un dédoublement des grandes.