II) Les devoirs de la charge : rôles et actions de la prêtresse.

La prêtresse était la gardienne, mot qui signifie à la fois la protectrice et la garante. Elle était celle qui assurait la continuité de la tradition, qui protégeait ce qui était sacré ; conception exprimée plus fortement avec le terme de kleidouchos et la clé qui permettait d’accéder au sacré. Une inscription de Kos nous informe que la prêtresse d’Artémis Pergaia devait, chaque matin, ouvrir le temple, brûler de l’encens et allumer le feu sur l’autel1344. Ces préparatifs qu’elle devait accomplir avant l’accueil des fidèles, chaque jour, constituaient un aspect simple mais néanmoins essentiel de sa charge, où s’exprimait sa nature de gardienne de l’espace sacré. Elle était aussi un guide dans sa communication avec le divin, à la fois la représentante officielle des hommes devant la divinité et de la divinité devant les hommes. A ce titre, elle était la gardienne des rites qui permettaient cette communication. Elle n’enseignait rien, ne prêchait rien, devant se conformer aux coutumes religieuses des ancêtres, suivre la tradition et ne pas innover1345. La charge pouvait aussi couvrir des domaines plus spécifiques en relation avec la nature du culte qu’elle desservait, comme la pratique oraculaire1346, des actes de protection ou de malédiction en cas d’infamie, participer à des ambassades ou des théories. La prêtresse et le prêtre avaient de nombreuses responsabilités cultuelles et administratives, mais aussi des charges liturgiques à assumer en corrélation avec leur statut civique et public, de plus en plus lourdes au fil du temps, notamment dans les grandes prêtrises. Ils ne servaient qu’une seule divinité et se trouvaient affiliés à son culte et à son sanctuaire, limitant leur action à ces cadres géographiques et cultuels. A leurs côtés, dans les grand sanctuaires, des auxiliaires du culte, femmes sacrées spécialisées ou des officiels civiques les assistaient1347, alors que dans les petits sanctuaires, ils devaient réaliser eux-mêmes les différentes tâches sacerdotales.

Notes
1344.

ICos ED 236 (Ier av. J.C.).

1345.

[Démosthène], Contre Néera, 75 et Exordia, 54.

1346.

Cf. Infra Chapitre 5 (IV : Les Prophétesses).

1347.

En plus de ces femmes sacrées spécialisées que nous étudierons dans le chapitre suivant, dans les grands ensembles existaient des officiels (épimélètes, hiéropes, épistates …) pour superviser les questions administratives des cultes, officiant en collaboration avec les prêtres et prêtresses. Aristote, Politique, 1322 b: «  on a par exemple, des prêtres et des administrateurs des biens sacrés pour l’entretien des édifices existants et la restauration des bâtiments qui menacent ruines, et aussi pour tout ce qui en outre est réservé au culte des dieux. Il arrive que cette fonction soit en quelque sorte unique, par exemple, dans les petits états, mais en d’autres elle consiste en de multiples charges distinctes du sacerdoce : on a des commissaires aux sacrifices, des gardiens des temples, des trésoriers des fonds sacrés... »  (éd. Belles Lettres, 1968/1989, J. Aubonnet) ; Cf. S. Georgoudi, ThesCRA V, p. 32-40 avec sources et bibliographie.