1-1) Syèris, la diaconos.

Au IIIème av. J.C., l’inscription de la base d’une statue, aujourd’hui perdue, rappelle le service de Syèris en tant que diaconos pour la déesse Athéna Polias à Athènes 1580 :

‘« Συῆ[ρις … ] γ̣ου
Σ….
Λυσ[ιμά]χης
διά[κο]νος
ἡἐν τ[ῶι ἱε]ρῶι.
εἰκών με [ἥδε] σαφὴς δηλοῖ
τύπου˙ ἔ[ργα] δὲ καὶ νοῦς
[νῦν ζ]ῴει παρὰ πᾶσι σαφῆ
[σε]μνὴ δὲ με μοῖρα
[ἤ]γαγεν εἰς ναὸν περικαλλέ[α]
Παλλάδος ἀγνῆς,
[οὗ] πόνον οὐκ ἀκλεᾶ τόνδε
ἐλάτρευσα θεᾶι

Νικόμαχος ἐπόησεν. »
« Syèris fille de [………] du dème de S[…], diaconos de Lysimachè dans le sanctuaire, dont ce portrait est une fidèle ressemblance. Mes actes, aussi, et mon âme maintenant présentés clairement devant tous. Un destin heureux me conduisit au plus beau temple de Pallas la révérée. Là, je servis la déesse avec ardeur et non sans renommée …
Nichomachos fit cette statue. »’

L’inscription nous apprend qu’elle servit durant la prêtrise de Lysimachè II, la référence aux Moires peut indiquer qu’elle fût tirée au sort parmi plusieurs autres femmes mais nous avons aussi noté que les prêtresses pouvaient nommer leurs plus proches collaborateurs, ce procédé étant un moyen de favoriser l’entente entre celles qui devaient œuvrer ensemble, pour un meilleur service de la divinité1581. Sa mention comme diaconos de Lysimachè pourrait signifier que la prêtresse la désigna1582 pour être à ses côtés, au quotidien, et l’assister. Cette formulation marquant l’appartenance témoigne d’un lien entre elles. Il est possible que Syèris fût en service pendant un temps assez long auprès de Lysimachè. Elle assista ainsi la prêtresse dans le service de la déesse et en reçut une certaine gloire, concrétisée par l’honneur de se voir accorder le droit d’élever une statue à son effigie sur l’Acropole. Pausanias1583, à son époque, vit la statue de Syèris, qu’il précise être celle d’une vieille femme (presbutis), prés du temple d’Athéna. A propos de la tête d’une vieille femme retrouvée en marbre, copie d’époque romaine dont on pensa un temps qu’il s’agissait de Lysimachè, il est possible que cette représentation fût en fait celle de Syèris (Fig. 221).

La position de Syèris devait être assez élevée dans la hiérarchie du personnel cultuel d’Athéna Polias. Qu’elle fût une assistante proche de la prêtresse est confirmée par le rôle tenu par les seize diakonoumenai (διακονούμεναι) qui assistaient le collège des seize femmes de l’Elide dans la célébration des Héraia: « Il y a aussi les seize femmes qui, selon le même principe, servent d’assistantes aux seize qui organisent le concours 1584  ». La mention « selon le même principe » indique qu’elles étaient choisies parmi les différentes tribus de l’Elide, comme le collège des seize femmes et parmi des gynaikes, elles-aussi respectables et honorables mais probablement moins âgées, pour suppléer aux seize vénérables. Le fait qu’elles étaient seize comme le collège Eléen signifie que, comme Syèris, elles-aussi avaient un lien direct avec les femmes qu’elles assistaient.

Le terme diaconos (διάκονος) signifie « servir, être le serviteur de ». La diaconos était généralement la personne chargée de l’entretien du sanctuaire, mais elle n’était pas une simple servante. La relation privilégiée qu’elle avait avec celle qu’elle assistait, suggérée par ces deux exemples, indique que la diaconos était une proche collaboratrice sur laquelle la prêtresse pouvait s’appuyer. Si les diakonoumenai assumaient leur charge à l’occasion de la fête des Héraia, Syèris assumait la fonction journellement, suppléant la prêtresse, prenant éventuellement part à l’organisation des fêtes, ainsi que le faisaient les diakonoumenai.

L’inscription est malheureusement lacunaire sur le passage concernant son identité, mais elle devait probablement venir d’un milieu assez aisé pour soutenir le coût d’une statue. Sa démarche n’a pas le même impact que celle de Myrrhinè, prêtresse d’Athéna Nikè, deux siècles précédents (Cf. Chapitre 4, 1-2, B-2). Il ne s’agit pas de revendiquer une position sociale mais d’affirmer son importance en tant que Syèris, diaconos aux côtés de Lysimachè II, prêtresse d’Athéna Polias, du génos des Etéoboutades.

Notes
1580.

IG II2 3464.

1581.

J.A. Turner, Hiereiai, p. 140.

1582.

B. Holtzmann, L’Acropole d’Athènes, p. 222 pense que c’était peut-être le cas.

1583.

Pausanias, I, 27, 4.

1584.

Pausanias, V, 16, 3 (éd. Belles Lettres, 1999, J. Pouilloux, A. Jacquemin, M. Casewitz)