Inscriptions des paides aph’hestias filles.

Nous avons cinquante neuf dédicaces, dont une trentaine concernant des filles. Certaines ont été faites par la Boulè et le Dèmos (IG II2 3477, 3518, 3554, 3569, 3647), la plupart par la famille (IG II2 3475, 3480, 3491, 3492, 3499, 3519, 4069 et 4070). Cinq inscriptions mutilées ne permettent pas de retrouver l’identité de la fille (IG II2 3492, deuxième quart du Ier av. J.C. ; IG II2 3569, Ier ou IIème ap. J.C. ; IG II2 3477, 2ème moitié du IIème av. J.C. ; IG II2 3498. IIème/Ier av. J.C. ; IG II2 3727, datation incertaine). Il n’y a aucune inscription datée avant la fin du IIème av. J.C.

[Accès à la note 1939 : K. Clinton, op. cit., p. 98-114.]

[Accès à la note 1940 : Elle faisait partie d’une grande famille, du génos des Eumolpides. Son père ne peut être identifié avec certitude parmi les membres de la famille. E. Kapetanopoulos, « Flavius Hierophantes Paianieus and Lucius Verus », REG 83 (1970), p. 63-69 + stemma. Il suggère qu’elle était la fille de T. Fl. Léosthènès, III fils de T. Fl. Léosthènès II, et qu’elle s’appellait « [φλαβία εἰσιδώ]ρα » (p. 64 n. 4).]

N° 2 - Epiphaneia II, fille d’Athènagoras du dème de Mélitè (EK 16)

Sa statue fut dédiée par ses grands-parents maternels. Elle appartenait au génos des Kèrykes et à une grande famille, de nombreux membres occupèrent des charges politiques ou sacerdotales notamment la prêtrise de Sarapis à Délos, sur plusieurs générations. Elle était la fille d’Athènagoras IV (PA 218 ; EK 41926) qui fut éphèbe en 106/5 av. J.C. (FD III, 2, 25, I, 6). Elle était la nièce de Mènias, sœur de son père, canéphore lors de la pythaïde d’Agathoclès en -106/5 (FD III, 2, 30, 4), et sous-prêtresse d’Artémis à Délos. Elle était apparentée à Soteira II, cousine de Mènias, qui fut canéphore d’Asclépios à Délos (n° 21 Tableau Canéphores). (Cf. informations sur sa famille et stemma dans Canéphores : FD III, 30, 4 : Mènias). Sa mère était peut-être Nymphô de Sphettos (ID 2237, 5 et 2238, 3 ; PA 11149 ; LGPN II, Νυμφώ, p. 343, 1 fille de Dionysos de Sphettos et d’Epiphaneia de Marathon).

N° 3 et 5 – Timothéa, fille de Mèdeios III du Pirée et Lamidion, fille d’Apolèxis d’Oion.

Timothéa fut honorée d’une statue par ses parents. Elle appartenait à une grande famille, importante au cours du IIème et Ier av. J.C. Elle faisait partie du génos des Eumolpides et des Etéoboutades. Elle était la fille de Mèdeios III (PA 10099 ; S.P. 127), fils de Mèdeios II, archonte éponyme en -75/4 et éxégète des Eumolpides, qui épousa sa cousine Diphila.

Sa grand-mère, Philippè II, fut canéphore lors des Délia, sous-prêtresse d’Artémis à Délos, et prêtresse d’Athéna Polias. La sœur de Philippè, Laodameia, fut canéphore aux Délia et Apollonia de Délos (n° 11 et 25 Tableau Canéphores ; n° 10 Prêtresse d’Athéna Polias). Lamidion était la fille de Laodameia II, fille de Lysandros IV du Pirée, petit-cousin de Mèdeios III et d’Apolèxis III (LGPN II, Ἀπολῆξις, p. 42, 18), fils de Philokratès I d’Oion. (Cf. informations sur leur famille et stemma dans Canéphores : n° 11 et 25.)

N° 6 - […]knia, fille de Polycharmos du dème d’Azénia.

Elle fut honorée par la Boulè. Son père fut archonte, fils lui-même d’un exégète pythocreste, et petit-fils d’un stratège des hoplites, archonte et épimélète à Délos.

N° 7 – Philètô, fille de Kléoménès du dème de Marathon

Son père était Kléoménès II, fils de Mantias II, thesmothète au début du Ier ap. J.C. (IG II2 1730, 13). Son arrière grand-père, Kléoménès I, était le frère de Panarista qui fut ergastine en -103/2 (IG II2 1034, Tableau B, n° 8 Tribu Eantide, cf. stemma sous Panarista).

N° 8 – Claudia Alcia, fille de Tib. Claudius Hipparchos du dème de Marathon

Elle était la tante du célèbre Hérode Atticus, orateur et exégète des mystères d’Eleusis. Son épouse, Régilla, fille d’un pontifex maximus et petite-fille d’un pontifex maximus fut prêtresse de Déméter Chamynè à Olympie où le couple dédia des statues à leurs effigies et à celles de leurs enfants et où ils participèrent aux réfections du sanctuaire1927.

N° 12 et 17 - Junia Mélitinè, fille de Junius Patrôn du dème de Bérénikidai et Junia Neikostratè fille de Junius Ménnèas du dème de Bérénikidai.

Junia Mélitinè fut hiérophantide (Supra Hiérophantide n° 9). Elle était la tante de Junia Neikostratè, laquelle fut honorée d’une statue par l’Aréopage et le Démos, avec son tuteur Gaius Cassius qui assuma les dépenses. Son père Junius Ménnèas, frère de Mélitinè, fut pais aph’hestias (K. Clinton, pais aph’hestias n° 31) et mourut probablement lorsque sa fille était enfant1928. La grand-mère de Junia Mélitinè et de Ménnèas était Flavia Laodameia, prêtresse de Déméter et Korè (prêtresse n°14, cf. Informations sur la famille et stemma. Chapitre 4, B-1, 3 : Prêtresses de Déméter et Korè à Eleusis.).

N° 13, 19, 21, 22, 23 et 24 - Nummia Kléô, fille de L. Nummius Andréas de Phalère ; Claudia Praxagora, fille de Claudius Démostratos de Mélitè ; Claudia Thémistokleia et Claudia Ménandra, filles de Claudius Philippos de Mélitè ; Honoratianè Polycharmis / Phainarétè, fille d’Honorius Polycharmis ; Junia Thémistokleia.

Elles faisaient parties d’une famille importante, ancienne, influente dont les membres occupèrent de nombreuses charges, politiques et religieuses. Epiphaneia II qui fut pais aph’hestias (n°2) au début du Ier av. J.C. était une de leurs ancêtres, de même que la canéphore et sous-prêtresse Mènias (FD III, 2, 30, 4) et la canéphore Soteira (n° 21 Tableau Canéphores). Elles étaient issues du génos des Kèrykes où les hommes étaient dadouques de père en fils depuis que Tib. Claudius Léonidès I de Mélitè (connu aussi comme Léonidès VII de Mélitè) avait épousé une fille de Thémistoclès IV d’Hagnonte. Il devint le premier dadouque de la famille de Léonidès de Mélitè. Il était le petit-fils de Léonidès V, lui-même petit-fils de Léonidès III, frère de Mènias. Ainsi, sur plusieurs générations les filles de cette famille accomplirent le service de pais aph’hestias.

Nummia Kléo appartient par alliance à cette famille. Sa mère, Nummia Bassa de Gargettos (EK 76), fille du héraut sacré Nigrinus (EK 91 ; K. Clinton, n°5 Héraut), épousa L. Nummius Andréas du Phalère (EK 104) ; puis en deuxième noce Aelius Praxagoras de Mélitè, qui fut dadouque (EK 96 ; K. Clinton, n°23 Dadouque).

Du deuxième mariage de sa mère Bassa, naquit Phillistè (EK 106) qui épousa Tib. Claudius Dèmostratos de Mélitè (EK 8), fils du dadouque Sospis I (K. Clinton, n°20 Dadouque). Dèmostratos fut archonte en 170/1 ou 172/3 ap. J.C.

De leur union naquit Claudia Praxagora (EK 94). Elle épousa Lucius Gellius Xénagoras I (de Delphes) qui fut prêtre d’Apollon Pythien et archonte à Athènes en 183/4 ap. J.C. (EK 46). Il était le fils de Lucius Gellius Xénagoras de Delphes, prêtre d’Apollon Pythien (EK 45). Claudia Praxagora et Lucius Gellius Xénagoras eurent deux fils, dont Lucius Gellius Xénagoras II (EK 47) qui fut pais aph’hestias (K. Clinton, pais aph’hestias n° 44), stratège des hoplites et archonte en 213/4 -219/20 av. J.C. Son fils, Polyzélos II fut pais aph’hestias au début du IIIème ap. J.C. (K. Clinton, pais aph’hestias n° 49) et sa fille, Dionysia, épousa P. Pomponius Hégias II, petit fils d’Aelia Epilampsis, prêtresse de Déméter et Korè à Eleusis. Elle devint la grand-mère d’un hiérophante (EK84 et IG II2 2342 où est retracée sa généalogie). Dionysia fut archèïs à Delphes lorsque son oncle, Lucius Gellius Dèmostratos, était prêtre d’Apollon Pythien (SEG XXIII, 482).

Le frère de Claudia Praxagora, Tib. Claudius Philippos (EK 105) eut deux filles : Claudia Thémistokleia et Claudia Ménandra (n° 21 et 22), toutes deux furent hiérophantides. Les deux sœurs partagent une même dédicace et les bases de leurs statues furent retrouvées à proximité l’une de l’autre. Philippos fut dadouque(K. Clinton, n°24 Dadouque) et archonte en 193/4 (IG II2 2125).

Honoratianè Polycharmis, dite aussi Phainarétè (n°23), était la fille d’Honoratianus Polycharmis et de Claudia Thémistokleia (n° 21). Sa fille Junia Thémistokleia (n°24) fut la dernière pais aph’hestias connue de la famille, au milieu du IIIème ap. J.C.

[Accès à la note 1944 : Stemma simplifié. J’ai favorisé l’identité sous laquelle ils sont enregistrés dans le LGPN, mais pour plus de compréhension en ce qui concerne la filiation généalogique, les liens de parentés et les alliances avec les autres jeunes filles ayant accompli des charges à Athènes, est mis entre parenthèse leur n° dans la filiation grecque, sous laquelle ils sont répertoriés dans le stemma de E. Kapetanopoulos, BCH 92 (1968), Stemma B et C.]

[Accès à la note 1945 : E. Kapetanopoulos, BCH 92 (1968), p. 501-504 émet des doutes sur sa filiation.]

***

Ces jeunes filles, lorsque nous connaissons leur parenté, appartenaient au même cercle social que celles que nous avons rencontrées et qui jouaient un rôle dans la sphère religieuse athénienne. D’ailleurs, parmi les paides aph’hestias ou dans leur parenté, certaines d’entre elles furent arrhéphores, canéphores ou ergastines (n° 2, 3, 5, 7). Parmi les cinq inscriptions mutilées, trois mentionnent des jeunes filles qui furent aussi canéphores1929 :

  1. IG II2 3477 : honorée par la Boulè et le Dèmos comme pais aph’hestias, canéphore pour les Panathénées et lors d’une pythaïde (n°31 Tableau Canéphores). La prêtresse de Déméter et Korè était Habryllis, fille de Mikion de Kèphisia ;
  2. IG II2 3498 : Canéphore pour Sarapis (n° 33 Tableau Canéphores). Dédicace faite lorsque Charion était prêtresse de Déméter et Korè ;
  3. IG II2 3727 : Canéphore pour Isis (n° 34 Tableau Canéphores).

De plus, Tertia fille de Lucius (n° 10), fut érrhèphore d’Athéna Polias sous la prêtresse Stratokleia (n° 16) et Canéphore aux Eleusinia et Epidauria (n° 46 Tableau Canéphores).

Certaines de ces filles étaient apparentées à des prêtresses de Déméter (n° 12, 17), d’autres à des hiérophantides comme Athènaïs (n° 9) petite fille d’une hiérophantide qui lui dédia sa statue. Elle officia pendant que sa grand-mère était en charge ou encore Poplia Aelia Herennia II (n°20) fille de Poplius Aelius Apollonios du dème d’Antinois était la fille de la hiérophantide Poplia Aelia Herennia I. Plusieurs membres de sa famille occupèrent des postes religieux et politiques importants (n° 11 Supra Hiérophantide). Les mêmes situations (familles riches, influentes, jeu d’alliance et stratégies familiales) se retrouvent.

Notes
1926.

PA = J. Kirchner, Prosopographia Attica ; SP = J. Sundwall, Supplement to J. Kirchner’s Prosoprographia Attica, Nachträge zur P.A. ; EK = E. Kapetanopoulos, « Leonides VII of Melite and his Family », BCH 92 (1968), p. 493-518.

1927.

M. Woloch, op. cit., Claudius n° 31, Stemma sous Claudius I ; Ol. 288, 610, 612, 619, 620. Sur Hérode Atticus, cf. W. Ameling, « Herodes Atticus », Subsidia Epigraphica n°11 (1983), 2 Volumes, Hildesheim.

1928.

K. Clinton, op. cit., n° 38 p. 111.  

1929.

D. J. Geagan, « Children in Athenian Dedicatory Monuments », p. 170-172 pense que la charge de pais aph’hestias était plus honorifique que la canéphorie.