2.2 Le manuel comme un élément d’interaction

Comme l’affirme Guy Rocher, chercheur de l’Université de Montréal, dans son essence le manuel est un outil inerte et sans vie, passible de devenir un simple objet dans une étagère quelconque. Ainsi, il ne se compose comme un instrument social et d’apprentissage que lorsqu’il est mis en contact avec les acteurs du système d’enseignement, plus précisément l’enseignant, les apprenants et les savoirs en situation d’interaction.

« Ce qui donne vie à un manuel scolaire, c’est quand il se transforme en objet d’actions et d’interactions sociales, qu’il entre en service entre les mains de différents acteurs, poursuivant des intérêts divers et qu’il devient le centre d’un ensemble d’interventions individuelles ou collectives et d’un réseau de communication. C’est ce que j’appelle le système social du manuel scolaire. » (Rocher, 2007 : 14)

De même qu’une loi, le manuel scolaire devient vivant quand il est manipulé par les acteurs du système d’enseignement, à partir de leurs réflexions, compréhensions et commentaires. Même en le considérant comme l’élément porteur du savoir savant à travers une transposition didactique, et pour cette raison fréquemment vu comme l’essentiel du processus d’apprentissage, nous pourrions affirmer qu’il serait en fait un élément qui gagne du sens au fur et à mesure de son utilisation et de sa conséquente reconstruction par les autres acteurs.

Nous voyons ainsi l’importance d’un choix approprié aux intérêts de l’enseignant et des apprenants, en ce qui concerne non seulement les contenus qui seront appris et sa progression, mais aussi la méthodologie et l’approche adoptées ; cela parce que les acteurs doivent se sentir à l’aise pour manipuler le matériel, mettre en œuvre les activités et les adapter à leurs besoins.

De ce fait, le rôle de l’enseignant comme responsable pour le choix du manuel est fondamental. Il doit prendre en considération les intérêts des apprenants pour qu’ils veuillent et puissent participés aux discussions thématiques et aux activités suggérés. C’est à partir de ces thèmes que les classes seront conçues et s’ils ne sont pas adaptés à son âge, à son niveau ou à ses centres d’intérêt, l’apprenant ne se sentira pas invité et engagé dans les activités et, par conséquent, dans son apprentissage.

Par contre, si le manuel est approprié aux intérêts des acteurs du processus, il devient un élément connecteur entre les agents, favorisant du côté de l’enseignant l’organisation du cours, le choix des textes et l’adaptation des contenus aux différents besoins et du côté de l’apprenant les débats dans le groupe, son engagement dans l’apprentissage des contenus et sa participation aux activités.

Nous voyons le manuel comme un élément qui incite et motive une interaction entre les acteurs, créant en classe une liaison et une harmonie qui proportionnent une ambiance agréable et favorable à l'éducation. Cette question joue un rôle très important en classe et, pour cela, la problématique de l’interaction est un concept discuté vivement par des professeurs et chercheurs de différents domaines de la linguistique et de la didactique (Kerbrat-Orecchioni, 1990 ; Traverso, 1999 ; Vion, 1992). De cette façon,

« L’interaction est ainsi conçue comme une action réciproque, conflictuelle ou coopérative, où les interlocuteurs se trouvent dans une relation d’interdépendance qu’ils acceptent et qu’ils exploitent en vue de l’accomplissement de leurs buts relationnels ou de leurs fonctions sociales. » (Andrade et Araújo e Sá, 2005 : 170)

Si cette notion d’interaction est déjà très importante dans une situation d’apprentissage d’une discipline quelconque, elle devient encore plus importante dans le cas des langues étrangères dont la position de l’individu est très vulnérable, vu qu’il doit assumer naturellement une condition active dans les conversations et dans l’interaction avec son interlocuteur, ce qui exigent de lui une sécurité affective importante.

Ainsi, un manuel adapté aux besoins de l’enseignant et de l’apprenant permet l’acquisition des savoirs prévus par les contenus, tout en créant une atmosphère positive à l’attitude des individus à l’intérieur et à l’extérieur de la classe, dans des situations réelles d’utilisation de la langue étrangère.