4.2.1 Modifications Temporelles

La première grande modification faite au sein du CELIN et qui pourrait, conséquemment, apporter de forts changements dans l’organisation du cours et des séances est le temps prévu et le temps effectif d’utilisation du manuel. Nous avons déjà vu (cf. Chapitre VI) que les auteurs ont imaginé trois parcours possibles pour l’utilisation de la méthode : le parcours intégral, d’environ 120 heures, le parcours fondamental d’apprentissage, d’environ 80 heures, et le parcours fondamental allégé, d’environ 70 heures.

Ce qui déterminerait le choix pour un parcours au détriment d’un autre serait, en réalité, les caractéristiques de chaque groupe, comme ses intérêts, ses besoins ou ses connaissances par rapport au processus d’apprentissage de langues étrangères avec une bonne maîtrise, par exemple, des stratégies d’apprentissage. Ainsi, selon les auteurs (Baylon, Campà et al., 2000b : 16), le parcours de 80 heures supposerait un groupe dont les apprenants ont un nombre réduit d’heures de cours ou que « leur profil permet de traiter certains aspects en « travail autonome » ». Il fallait donc prévoir un travail individuel de la méthode pour que tous les contenus conçus soient réalisés.

Dans le cas du parcours fondamental allégé, cette modification devient encore plus profonde, avec un allégement important des activités et le maintien de la partie Interculturel. Ce choix se présente, même pour les auteurs, comme très restreint, à tel point qu’ils affirment que

‘« cette modalité n’est envisageable que dans le cas de groupes de « vrais-faux débutants », d’apprenants de langues proches ayant une bonne formation de base ou visant des compétences partielles, ou bien encore s’il s’agit de groupes d’apprenants travaillant en semi autonomie. » (Baylon, Campà et al., 2000b : 16)’

En prenant en considération les apprenants brésiliens, il fallait donc imaginer qu’il suffirait d’organiser le cours en 70 heures, puisque nous avons bien évidemment des langues proches ; ou au moins un cours de 80 heures, considérant de façon pessimiste que le groupe pourrait ne pas avoir une bonne formation de base linguistique.

Mais l’application de ces parcours est totalement différente au CELIN. Le cours de français niveau débutant (livre 01 des toutes les méthodes) est développé en 04 semestres de 60 heures chacun, ou l’équivalent de 240 heures de cours, ce qui donne le double de ce que les auteurs de la méthode ont imaginé. Comme eux même l’affirment, ces parcours ne doivent pas être pris de manière figé et inflexible, au contraire, mais de toute façon il est difficile de penser qu’un changement si important n’apportera pas de conséquences significatives au niveau méthodologique.

Dans ce cas aussi, les justifications sont multiples, mais elles sont fortement liées à la structure déjà existante antérieurement dans le Centre de Langues, avec la méthode précédente. Une des manières les plus utilisées pour organiser un cours dans sa totalité est de considérer la quantité et l’organisation des unités dans le manuel. Habituellement, et dans le cas de deux méthodes adoptées avant Forum, ce nombre est de 12 unités, regroupées en 4 grandes parties, s’adaptant facilement à la structuration du cours en 4 semestres.

La modification est apportée donc par la méthode Forum, qui totalise 9 unités dans son manuel, regroupées en 3 grandes parties, appelées modules. Une adaptation plus directe à cette organisation obligerait un changement de la structure du cours globalement, non seulement pour le niveau débutant mais aussi pour l’intermédiaire, ce qui a motivé plusieurs doutes et discussions avant l’adoption effective du matériel.

Curieusement plusieurs professeurs, notamment les plus anciens, dénonçaient par exemple un manque de temps pour développer toutes les activités, particulièrement au cas où le niveau débutant suivrait la méthode et serait développé en 3 semestres, comme il a été postulé.

De cette manière, le groupe a décidé de l’adopter mais en maintenant sa répartition en 4 semestres. Cette décision a affecté la base fondamentale du manuel et ses 3 modules ont été décomposés et, par conséquent, ont perdu leurs caractéristiques de base, c’est-à-dire, la ligne qui reliait ses unités. Ainsi, les trois premiers semestres ont maintenu le travail de 2 unités (niveau 01 – unités 01 et 02 ; niveau 02 – unités 03 et 04 ; niveau 03 – unités 05 et 06) et au quatrième semestre on travaille les 3 dernières unités, le seul module à garder le regroupement conçu par les auteurs de la méthode.

Cette décomposition des modules interviendra donc dans la conception interne du manuel, qui utilise des personnages et des histoires en commun pour fusionner les unités et leur donner une signification collective, comme nous en avons parlé dans cette étude. En réalité, cette procédure est importante dans la mesure où elle apporte au contexte des situations qui se développeront, aidant l’apprenant dans sa compréhension globale.

Pourtant, quand ses unités sont très espacées, cette notion se perd et la tendance est que le professeur travaille chacune de manière individuelle. Nous avons pu noter à partir des enregistrements de classe qu’aucune référence aux personnages du module 2, qui ont été présentés dans le début de l’unité 4 , n’a été faite dans les unités 5 et 6 par les professeurs. Cela nous prouve que la notion d’existence d’un fil conducteur pour unir chaque module est disparue pour les enseignants du CELIN.

La notion de thématique par unités et non plus par module aide aussi les professeurs au moment de trouver des activités pour compléter les séances ; avec plusieurs unités on a une possibilité plus grande de diversifier les contenus interculturels et, par conséquent, enrichir ce qui est présenté en classe.

De toute façon, il n’est pas possible pour nous d’affirmer que les modifications pratiquées par les professeurs ont comme origine la modification temporelle du manuel, puisque ces changements existaient aussi quand le centre utilisait d’autres méthodes, mais il est indéniable que le fait d’avoir moins d’unités dans un semestre et, par conséquent, beaucoup plus de temps, oblige le professeur à chercher d’autres sources informatives et pédagogiques pour ses classes, et non plus seulement celles présentes dans le manuel.

De cette manière, la programmation de la classe commence à souffrir des modifications que nous classifions ici d’ « internes » et « externes » et que nous irons détailler par la suite.