Première partie : l’ennui comme objet de recherche

Il n’existe pas de consensus autour de l’apparition de l’ennui dans les civilisations occidentales. Sa définition trouble et polysémique inscrit d’emblée la problématique de l’ennui, et notamment autour des ambiguïtés qu’il peut véhiculer. Huguet dans son ouvrage L’ennui et ses discours (1984) rapporte trois thèses issues du Grand dictionnaire universel du XIXème siècle, afin de définir les origines de ce terme, dont deux qui mettent en lien l’ennui et la mort ; la troisième est celle retenue à l’heure actuelle : l’ennui dérive de odium (haine). La recherche sur les origines étymologiques du mot « ennui » proposée par Svendsen (1999) nous permet à la fois d’appréhender toute la complexité de ce phénomène, mais également de justifier dans notre travail un retour historique depuis l’Antiquité gréco-romaine jusqu’à nos jours : « En règle générale, les mots désignant l’ennui dans les différentes langues ont des étymologies difficiles à établir. Le français ennui et l’italien noia, qui tous deux, par le biais du provençal enojo, prennent leur racine dans le latin inodiare (« haïr » ou « détester »), remontent au XIIIème siècle. […] en eux se mêlent acedia, mélancolie et tristesse générale » (1999, p. 34).

Nous allons donc dans un premier temps remonter aux racines de l’ennui, avec l’objectif de déconstruire l’ennui du sens commun que nous connaissons toutes et tous, pour trouver les premières couches et les premiers sens de ce terme.