Afin de dégager et analyser les représentations que les enseignant-e-s ont de l’ennui, nous avons pris en compte le rapport résumé, et plus spécifiquement les présences significatives53 et la classification ascendante hiérarchique pour chaque Classe.
| Classe 1 : forme réduite (Chi2) |
| ennui+ (13), pour (12), possi+ble (12), interet+ (12), je (9), comprendre. (9), trouv+er (9), essa+yer (9), qu+ (9), souvent (8), Niveau Général (8)54, reaction+ (8), pass+er (6), cours (6), humour+ (6), tout (6) |
La présence d’ennui n’a rien d’étonnant, dans la mesure où les questions posées sont dans un format écrit et que les questions portent explicitement sur l’ennui. Pour, catégorisé comme « marqueur d’une relation discursive », marque l’idée d’un échange, d’une intention, d’une conséquence, d’une cause ou d’une concession. On peut donc penser que face à l’ennui, le corps enseignant met en place une réflexion, ce qui confirme bien qu’il s’agit d’une problématique pour ces derniers et ces dernières. Cela est également confirmé par possible, laissant entendre qu’il ne s’agit pas d’une fatalité, mais que des choses peuvent être mises en place. La question de l’intérêt est également très présente à l’évocation de l’ennui en contexte éducatif. Ensuite, on trouve trois verbes ayant une présence significative dans cette Classe : comprendre, trouver et essayer. Ces trois verbes illustrent à la fois la compréhension avec comprendre, mais aussi la complexité de l’ennui avec trouver et d’essayer.
Le marqueur de la personne je met en évidence une implication directe de l’enseignant-e dans ce processus d’ennui, et dans le même champ représentationnel, réaction met en exergue le fait que l’ennui ne laisse pas l’enseignant-e indifférent, au contraire, l’ennui provoque. L’humour semble être un des moyens mis en place face à l’ennui, tout comme les trois verbes suivants : rappeler, agir et motiver. Une autre forme de réaction est la question de la participation dans le cours.
Souvent, marqueur d’une relation temporelle n’est pas à comprendre comme un ennui fréquent en classe, mais plutôt en terme descriptif une fois l’ennui constaté. Réaction confirme encore que les enseignant-e-s réagissent, ou non (avec passer). Une solution évoquée est l’humour.
Au niveau des variables, cette Classe est particulièrement représentative du discours d’enseignant-e-s intervenant en Lycée général. Il semble donc que la perception qu’ils et elles ont de l’ennui chez leurs élèves varient bien en fonction de variables d’ordre contextuel, avec le niveau d’enseignement. Cette première Classe est inscrite dans le constat de l’ennui, qui provoque de l’action, comme le montrent à la fois les verbes, la présence du je, et les solutions évoquées. Lorsqu’ils et elles constatent l’ennui des élèves, cela provoque l’action de leur part.
La classification ascendante hiérarchique nous indique les relations de proximité entre les présences significatives que nous venons d’évoquer55 . On distingue à l’intérieur de cette Classe deux grands axes. Dans la partie supérieure, dont le trait le plus caractéristique est possible, à proximité d’essayer, en lien avec l’humour. Ce même champ représentationnel est en lien avec les verbes agir et motiver, qui infèrent que face à l’ennui d’un ou d’une élève, il faut faire quelque chose. Il est alors possible de rappeler l’élève dans l’activité, ou lui poser une question, le solliciter pour de nouveau l’intégrer au cours. Le témoignage de cet enseignant en lycée technologique résume bien à la fois le constat et les réactions (terme lui-même présent et relié à la participation) :
| - « J’essaye de solliciter l’élève, lui poser des questions, l’intéresser. Le mieux, à mon avis, c’est de manier l’humour avec assez de finesse pour renouer un lien plus humain et laisser comprendre que j’ai remarqué l’ennui vécu par l’élève. » (Sujet 68) |
Dans la partie inférieure du dendogramme, le trait caractéristique, à l’exception de l’ennui, est l’intérêt, et notamment la question de trouver un intérêt. Ils et elles comprennent l’ennui des élèves, qui peu être de deux formes : l’ennui est considéré soit en général, soit relatif à une matière plus spécifique, comme l’illustrent bien les témoignages de ces deux enseignants intervenant en lycée général et en sciences, et les plus représentatifs de cette Classe 1 :
| - « De façon générale j’essaye d’intéresser mes élèves, même mauvais en mathématiques, en investissant beaucoup plus d’énergie car je pense que souvent l’ennui des élèves peut être généré par l’ennui du professeur lui-même ou simplement le fait que le professeur n’est pas investi à 100% dans ce qu’il fait » (Sujet 64) - « de façon générale et dans ma matière, j’essaye de combattre l’ennui en sortant quelque fois du cadre du cours : notions hors programme, activités ludiques, humour, investissement de tous dans la réflexion, amener des notions mathématiques en lui donnant une dimension géniale » (Sujet, 68) |
Pour résumer, cette première Classe, la plus importante du corpus, met en évidence que l’ennui est une problématique qui a du sens pour les enseignant-e-s, et qu’ils et elles ne sont pas indifférent-e-s une fois l’ennui constaté. Elle nous indique que les enseignant-e-s constatent l’ennui des élèves, et l’interprètent comme une demande de mise en activité. Pour autant possible et essayer positionnent le discours dans une dynamique relativement floue face à cette recherche d’intérêt. On pourrait alors extrapoler qu’ils et elles portent une sorte de responsabilité, et c’est ce que souligne le Sujet 64 cité ci-dessus, en évoquant la question de l’investissement.
Nous observerons particulièrement les variables relatives au niveau d’intervention, ainsi qu’au sexe des enseignants.
Variable signalétique pour l’analyse du corpus
Dendogramme de la Classification Ascendante Hiérarchique pour la Classe 1 en Annexes 2.1.