6-2-2- Retour sur les différents résultats dégagés

Au regard de ces différents résultats, nous retiendrons un certain nombre effets. Tout d’abord, en termes de variables positionnelles, nous constatons que les garçons déclarent plus s’ennuyer que les filles de manière générale. Nous l’avons évoqué, cela pourrait être le résultat d’une disposition à l’ennui plus forte chez les hommes que chez les femmes (Farmer et Sundberg, 1986 ; Kass et Vodanovich, 1990 ; Seib et Vodanovich, 1998 ; Sundberg et al., 1991 ; Tolor, 1989). Cependant, il nous semble qu’en contexte scolaire, et d’autant plus avec de jeunes élèves, l’analyse de ces résultats la plus probable serait plutôt liée au fait que les filles sont plus « scolaires », et l’ennui n’est pas scolaire ; mais également que les garçons auraient plus de facilité à s’exprimer dans l’espace scolaire.

Ensuite nous avons avancé l’hypothèse que l’habillage de la tâche aurait un effet sur l’ennui, et ce en fonction de la hiérarchie des matières scolaires. Nous constatons effectivement un effet de l’habillage de la tâche, mais pas exactement selon la hiérarchisation des matières scolaires à l’école. Conformément aux stéréotypes genrés rattachés aux matières scolaires on a une différence d’ennui déclaré en fonction des matières scolaires. L’habillage de la tâche où les élèves, filles comme garçons, déclarent le plus s’ennuyer est le français. Cela va dans le sens des recherches d’Archer et Macrae (1991), qui font état d’une assimilation des matières féminines comme ennuyeuses. Dans la mesure où le français est plutôt lié à la sphère féminine, et les mathématiques à la sphère masculine, et que le masculin tout comme les sciences sont la norme dominante, cela expliquerait cette dominance de la matière « français » qui ennui, et ce quel que soit le sexe de l’élève.

En termes d’habillage de la tâche, les mathématiques et le jeu ennuient donc moins que le français, et il n’y a pas de différence significative entre les deux. On peut comprendre ces résultats de différentes façons. Que l’on ne puisse pas dissocier les mathématiques du jeu accentue encore plus la différence entre le français et le « reste », comprenant alors une matière scolaire et une matière non scolaire. Comme nous l’avons souligné, on aurait pu penser que le jeu serait l’habillage où le moins d’ennui serait déclaré. Or ce n’est pas le cas. Les mathématiques, de par leur importance dans le système scolaire, et plus largement social, n’ennuient pas, tout comme jouer pour un jeune élève n’ennuie pas.

Ces représentations des matières scolaires ont des conséquences en termes de déclaration d’ennui, mais également en termes de performance aux résolutions des énigmes. Nous avons constaté que les moins bonnes performances sont lorsque l’habillage de la tâche est « français », et que là encore, il n’y a pas de différence entre les filles et les garçons.

Enfin, nous avons noté un lien entre l’ennui et les performances aux trois énigmes. Les élèves déclarent s’ennuyer dans 32% des cas lorsqu’ils et elles n’ont pas réussi les énigmes, alors qu’ils et elles déclarent à 82% ne pas s’être ennuyé-e-s lorsque les trois énigmes ont été réussies.

Au regard de ces résultats, on pourrait émettre deux hypothèses. Il y aurait un effet de médiation, à savoir que l’habillage de la tâche en français induirait de l’ennui, engendrant alors un échec à la résolution des énigmes.

une médiation de l’habillage de la tâche en français, qui induirait alors de l’ennui, engendrant alors un échec à la résolution des énigmes. Ou bien, l’ennui serait une justification à postériori, lorsque les élèves ne sont pas parvenus à résoudre les énigmes, puisque le questionnaire d’évaluation de l’ennui a été proposé après la tâche. Même si ils et elles n’ont pas connaissance à ce moment de leur évaluation aux énigmes, on peut cependant penser qu’ils et elles ont une idée de leur performance.

Il paraît donc intéressant, afin d’approfondir ces pistes, et de mettre en évidence un effet médiateur de l’ennui, d’interroger les élèves sur l’ennui avant la présentation des énigmes, puis après réalisation de la tâche, afin d’en mesurer les effets.