8-3-2- Comment est compris l’ennui des élèves

Les deux questions suivantes du questionnaire traitent plus précisément du commentaire final et donc de l’ennui, puisque la question traite la compréhension de l’ennui dans le commentaire du relevé de notes. On distingue dans les remarques faites sur le commentaire que l’ennui prend sens lorsqu’il s’agit de garçons en réussite. Or, dans le cas de prédiction pour l’année, l’ennui était présent, également en contexte de réussite scolaire, mais cette fois un peu plus proche des filles. Concernant la question sur la remédiation, on trouve cette même configuration : l’ennui est employé en réussite, et plutôt lorsqu’il s’agit d’un garçon.

Il est intéressant de noter qu’à cette question, la variable du sexe de l’élève a moins d’effets différenciateurs, et encore moins en cas de difficulté. Les représentations sont assez identiques, et mettent en avant le fait que l’année scolaire va être difficile. Lorsque les sujets sont en position de juger un ou une collègue, la variable contextuelle est plus forte. De même, beaucoup moins de termes sont évoqués quantitativement.

En revanche, en cas de réussite scolaire de l’élève, le sexe de l’élève opère un effet de différenciation. On peut donc affirmer que l’ennui prend particulièrement sens pour les enseignant-e-s en contexte de réussite scolaire. A cette question de la compréhension du commentaire, on observe que l’ennui et le français sont des termes très signifiants. Dans le cas de filles en réussite, la présence des termes parents, mais également du terme enfant (assez partagé avec les garçons en difficulté), positionnent la compréhension du commentaire sur un versant plutôt pédagogique. La tendance dans les données recueillies, met plutôt en évidence une représentation au niveau scolaire, sur un versant plus didactique lorsqu’il s’agit des garçons. En effet, il semble que les sujets ne comprennent pas bien le commentaire, notamment en fonction des résultats et des connaissances acquises de l’élève garçon.

Nous sommes donc bien dans le triangle didactique Savoir/ Professeur-e/ Elève lorsqu’il s’agit d’un garçon en réussite, alors qu’avec une fille, le commentaire est mis en lien avec la pédagogie, soit à un niveau de compréhension et d’analyse supérieur, englobant le niveau didactique. De nouveau, on constate une différenciation, cohérente avec les remédiations évoquées, mais en contexte cette fois de difficulté. Les différences représentationnelles ont donc un effet différenciateur dans le cas du sexe de l’élève, et ce quel que soit la position scolaire. Lorsqu’il s’agit d’une fille en réussite, l’analyse du commentaire de l’enseignant est de type pédagogique et lorsqu’il s’agit d’une fille en difficulté, les remédiations proposées sont également pédagogiques. Quand il s’agit d’un garçon en réussite, les sujets évoquent l’aspect didactique, et c’est également le cas lorsque l’on a affaire à des garçons en difficulté puisque les remédiations sont de l’ordre de l’apprentissage, des acquis etc.

Cependant à la question spécifique de la compréhension de l’ennui, les différentes pistes de compréhension ne fonctionnent pas, et plus précisément, sont exactement opposées. En effet, nous ne validons pas notre hypothèse selon laquelle le « don », la précocité ou être surdoué est attribué aux garçons. Cela qui est également opposé aux résultats obtenus dans la première partie de la recherche. A cette question précise, le fait d’être « précoce » est en lien avec les relevés de filles en réussite. Dans le même ordre d’idée, à l’opposé de ce que l’on vient de dégager concernant une distinction entre pédagogique vs didactique, cela ne semble pas valable lorsque l’on se penche sur la question spécifique de la compréhension de l’ennui. En effet, en difficulté scolaire, les questions soulevées sont autour des activités ou des bases, donc plutôt autour des aspects didactiques. Dans le cas de garçons, il est fait référence aux apprentissages, mais aussi au sens de l’école, et au décrochage scolaire. Nous sommes donc plus proche cette fois de la pédagogie. Si l’on centre le discours des sujets plus particulièrement sur l’ennui (et c’est bien le cas pour cette question, puisque le mot ennui est exactement au centre du repère, et uniquement à cette question), la cohérence que l’on a pu dégager dans le discours des enseignant-e-s, (en recoupant leurs projections, les outils dont ils et elles disposent, et de façon générale le commentaire) n’est plus valable, voire même est opposée.

Ces différents résultats mettent bien en avant toute la complexité de solliciter l’ennui en contexte éducatif. Ils mettent également en avant l’intérêt de l’utilisation méthodologique de la triangulation, afin de confronter les différentes représentations parfois opposées, afin d’en dégager à la fois les significations, mais aussi dans le contexte éducatif les conséquences. C’est pour ces différentes raisons que nous avons analysé les quatre questions, mais cette fois ensemble, afin de dégager plus précisément les champs représentationnels qu’ont les enseignant-e-s. Mais avant de passer à ce second traitement du corpus, nous nous sommes également penchée sur les questionnaires qui ont été retournés remplis, mais que nous n’avons pas pris en compte dans l’analyse, du fait comme nous l’avons souligné, de leurs réponses paraticulières.