9-2- Les champs représentationnels dégagés

9-2-1- L’élève en difficulté

Nous allons dans un premier temps observer les présences et les absences significatives de cette Classe. Puis, dans un second temps, nous observerons les rapports de proximité entre les présences significatives, afin de dégager les grands champs représentationnels à l’intérieur de cette Classe.

Tableau 33 : Formes réduites des présences et absences significatives classées selon la métrique du Chi2
  Classe 2 : forme réduite (Chi2)
Présences significatives Difficulté77 (173), lacune (29), suivre. (28), personnalis+er (25), aide+ (25), avec (21), retard+ (20), remedi+er (19), parent+ (19), comprendre. (18), comprehensi< (17), base+, prise+ (17), soutien+ (17), arriv+er (15), confi+ant (15), equipe+ (15), concentration+ (14), gros+ (12), reprendre. (12), contrat+ (12), effort+ (12), projet+ (12)
Absences significatives propos+er (-38), ennu+yer (-32), ennui+ (-14), act+ion (-14), acquerir. (-13), bonne+ (-13), laiss+er (-11), facile+ (-11), compet+ent (-11), commentaire+ (-10)

La présence la plus significative de cette Classe est la variable concernant les profils d’élèves en difficulté. On peut donc déjà affirmer que la Classe 2 est représentative du discours des enseignant-e-s ayant évalué un relevé d’élève en difficulté scolaire. Cela est confirmé par lacune. On trouve un certain nombre de champs qui balayent des moyens à mettre en œuvre :

  • le constat, autour des lacunes, du manque de bases, du retard, de la concentration, et gros qualifiant les difficultés, mais dans une dynamique plutôt positive (comprendre, compréhension, confiant, effort, arriver) :
  • les possibilités de remédiations, par la personnalisation, l’aide, le verbe remédier, prise, pour la prise en charge, le soutien, les projets, ou encore reprendre ;
  • les acteurs, par l’intermédiaire d’avec, les parents et l’équipe. On peut noter que les parents sont cités, et ont un poids dans le discours plus important que l’équipe éducative. Cela rejoint les différentes recherches autour du niveau scolaire de l’élève, résumées par Lautier (2001) : « En gros, on relève une difficulté à définir la réussite et une tendance lourde à expliquer l’échec par le milieu socioculturel des familles » (p. 57).

Proposer est l’absence la plus significative. On peut alors penser par rapport aux présences significatives qu’un élève en difficulté ou en grosse difficulté, ayant du retard, des lacunes est aidé, mais pour autant, on ne lui propose pas, on remédie selon un certain nombre de moyens à disposition du corps enseignant. On peut également noter qu’ennui et ennuyer sont significativement absents. Cela signifierait alors que l’ennui n’est pas lié aux élèves en difficulté. La représentativité de la variable du niveau est également renforcée par le terme bonne, qui lui est significativement absent, tout comme facile.

Cette première analyse des traits lexicaux typiques met bien en évidence que nous avons affaire aux représentations ayant trait aux élèves identifiés comme en difficulté scolaire. Nous notons que la variable signalétique « difficulté » est la plus représentative. On trouve aussi mais de façon beaucoup moins puissante la variable sexe avec fille (Chi2 = 9). On peut donc penser que les observations sont assez conformes aux représentations plus générales de l’élève en difficulté, qui est communément anonyme et dont les causes de non réussite sont attribuées à des raisons externes (Lautier, 2003), même si à l’intérieur de cette variable « en difficulté » se dégage aussi le fait d’être une « fille ».

Nous avons donc affaire aux représentations d’un élève en difficulté. La classification ascendante hiérarchique de cette Classe78, qui nous indique les rapports de proximité entre les termes, va nous permettre dans un second temps de mettre en évidence les grands thèmes, et donc dans notre cas, les moyens de remédiation les plus courants lorsqu’un ou une élève est en difficulté scolaire.

Une première lecture de l’arborescence permet de dégager trois grandes thématiques, en fonction des ramifications. Dans la partie supérieure, on dégage tout un champ lexical relatif à la prise en charge de l’élève, notamment par l’intermédiaire du projet personnalisé, lui-même lié selon l’arborescence à l’équipe éducative, et au terme de confiance. Il est également fait référence aux parents et au psychologue (liés dans l’arborescence), autour de la rencontre. La prise en charge par un orthophoniste est à envisager, en lien avec une aide individualisée. Dans la partie supérieure de l’arborescence, on trouve des traits lexicaux plus en lien avec les difficultés (mathématiques et langue), axées autour de la progression, la proposition de remédiation étant le contrat pour aider. Nous avons donc affaire à une prise en charge collective de l’élève, dont les difficultés semblent plutôt interprétées comme étant en lien avec des « pathologies », ou en tout cas nécessitant un traitement (psychologique, orthophonie…)

Encadré 17 : Une prise en charge collective de l’élève en difficultés
- «  (…) soutien
- RASED
- Peut-être orthophoniste pour l’aider en français » (Sujet 42)

- « (…) Entretien individuel avec l’élève (mise en place d’un programme personnalisé) et avec la famille
- Mise en place d’un soutien (étude…) » (Sujet 117)

- «  (…) mise en place d’une équipe éducative PPRE79 » (Sujet 49)

- « Un PPRE pour tenter de cibler les problèmes que rencontre cette élève avec tous les partenaires éducatifs.
Envisager un contrat avec le RASED si l’élève peut avoir besoin d’attention particulière au plan comportemental ou sur l’entrée dans les apprentissages. » (Sujet 145)

- « réseau d’aide, assistant social, suivi psychologique pour essayer de comprendre cet élève, de cerner ses caractéristiques (…) rencontre avec les parents » (Sujet 160)

On observe, lorsque l’on extrait les citations en fonction des sujets les plus représentatifs de cette Classe, d’abord qu’ils sont issus de la seconde question, ce qui semble cohérent puisqu’il s’agit de la question relative aux remédiations, mais surtout que ces solutions collectives, dans la rédaction proposée par les sujets, arrivent en fin de proposition, après qu’aient été mises en place des techniques plus individualisées.

Il se dégage de la partie intermédiaire de l’arborescence des traits lexicaux cette fois plus en lien avec un bilan et des difficultés dans la classe. En effet, les lacunes et présent ont une forte proximité, tout comme reprendre et bases, compréhension et difficultés, domaine et programme. Dans ce cas de figure, les difficultés observées semblent moins « irrémédiables », c’est-à-dire qu’il s’agit bien du début de l’année, et qu’il est encore possible de mettre en place des choses, notamment après avoir identifié précisément les lacunes. Dans ces conditions, les remédiations possibles sont la mise en place de soutien, en lien avec un bilan précis. Le groupe est évoqué en lien avec le constat, et il est fait référence aux efforts.

Encadré 18 : Constats, bilans et remédiations au sein de la classe
- « De nombreuses difficultés à prévenir liées à la compréhension dues aux lacunes antérieures. » (Sujet 42)

- « Les résultats sont nettement insuffisants. L’élève semble fragile dans d’importants domaines de compétences, français et maths. Le plus préoccupant étant que les lacunes portant sur les techniques mais aussi sur la compréhension et l’assimilation de notions abstraites. L’élève risque donc de se retrouver en très grande difficulté, voire s’acheminer vers un échec. » (Sujet 67)

- « -Nécessité de faire un bilan précis des compétences acquises et celles qui nécessitent une remise à niveau
- Aide, soutiens personnalisés dans différents domaines
- Reprendre les bases solides dans différents domaines (…) » (Sujet 117)

- « - une activité de soutien pour apprendre à travailler seul face à un énoncé, une production
- et travailler les apprentissages sur la durée
- apprendre à apprendre une leçon. » (Sujet 248)

On peut noter que dans ce cas, la plupart des citations sont extraites de la question précédente, c’est-à-dire sur les prédictions. Là encore, cela semble assez logique, il s’agit d’un bilan.

Enfin, la partie inférieure de l’arborescence est plutôt relative à la recherche de causes, d’explications. Arriver et suivre sont en lien avec enseignant et échec, tout comme retard et accumulé, proche de précédent et gros, ou manque et concentration liés à problèmes.

Encadré 19 : Recherche d’explications
- « Il est nécessaire de mettre en place de la différenciation pour cet élève qui traîne un lourd retard dès le début de l’année. Il est nécessaire de regarder les résultats des années précédentes pour voir si ce retard est cumulé ou s’il est lié à des problèmes temporaires. » (Sujet 36)

- « Beaucoup de lacunes à combler, gros retard par rapport aux compétences exigibles en CM2. Il semble difficile de rattraper ce retard rapidement. » (Sujet 49)

- « Difficile, maintien probable en Cycle 3. Soit probablement : comportement perturbateur, effacement total, car découragement, impression de trop de difficultés, de trop de retard, de manques. » (Sujet 92)

- « Aura des difficultés en écriture de texte, en mathématiques, qui plus est en géométrie. La mémorisation des leçons sera difficile en raison des difficultés de concentration. Il sera à motiver et nécessitera de multiples mobilisations. » (Sujet 133)

Évidemment, les citations sont très proches en termes de contenu, dans la mesure où nous observons les rapports de proximité, et particulièrement entre la partie supérieure de l’arborescence, qui met bien en avant une proposition de remédiation extérieure et les deux autres branches. Pourtant, selon le découpage de cette classification, dans un premier temps le logiciel a différencié la partie que l’on peut nommer « Recherche d’explications » des deux autres, qu’il a ensuite distinguées. La différence entre ces deux thématiques semble être en termes de projection. En effet, la partie inférieure fait plutôt référence à des difficultés antérieures, alors que les deux autres thèmes sont plus en lien avec l’année en cours, et autour de deux moyens : l’individualisation ou la prise en charge par des acteurs extérieurs au groupe classe.

En résumé, il se dégage nettement un profil d’élève en difficulté, qui a accumulé un certain nombre de lacunes et de retards antérieurs, notamment autour de la méthodologie et des bases. Et une fois ce constat posé, les enseignant-e-s proposent des remédiations à l’intérieur du groupe classe, pour tenter de palier à ces difficultés ; puis une prise en charge hors de la classe.

Notes
77.

Il s’agit de la variable signalétique « difficulté ».

78.

Dendogramme de la Classification Acendante Hiérarchique pour la Classe 2 en Annexes 6.1

79.

Les Programmes Personnalisés de Réussite Educative (PPRE), datant de 2005 et concernant l’école et le collège, sont des dispositifs d’aide et de soutien pour la réussite des élèves, s’il s’avère qu’un élève a des difficultés ou des lacunes au niveau de compétences ou connaissances indispensables.