Le courrier des lecteurs ou l’intensité de l’échange

Au début du journal, ce fut la lettre, ou mieux, la correspondance. Car c’est sous forme de correspondances commerciales et financières organisées par les grandes banques et les maisons de commerce que l’information commence à faire son chemin à la fin du Moyen Age. A la recherche de sa propre forme et de ses modes de présentation de l’information, le journal continue pendant longtemps à se servir des techniques de la correspondance. Ainsi, pour la presse d’Ancien Régime, la lettre reste l’unité de base de communication de l’information, tout aussi bien que la forme la plus courante de présentation de l’actualité455. Si le rapport de parenté historique entre la lettre et le journal se transforme dans une longue et solide influence de la première sur le second, c’est aussi parce que le journal est pris dans un dualité soulignée par Jean Sgard et Michel Gilot.456 D’une part, il relève des techniques de l’information et vise à la neutralité, à une sorte de degré zéro de l’écriture, d’autre part, il est proche du témoignage et de l’art de persuader, ce qui le projette dans la sphère de la littérature. Il en résulte des genres journalistiques différents, orientés vers la “‘ transmission de l’information brute ’” ou vers‘ ’“‘ la mise en forme personnelle ’”‘ , ’sans perdre de vue que, cette dualité peut se transformer souvent en dilemme, lorsque le journaliste hésite entre l’information technique et objective et l’expression d’une opinion personnelle, l’emploi d’une rhétorique. C’est ce même dilemme qui, selon les deux auteurs, est à l’origine du phénomène des “Spectateurs”, né dans les années 1720 du XVIIIe siècle pour leur version française, expression d’un journalisme contestataire, en rupture avec la presse d’institution représentée par la Gazette de France et le Journal de Savants, qui récupère et revalorise la forme épistolaire457.‘

Quels sont les traits des “spectateurs”, ces journaux à forme épistolaire, si en vogue dans la presse d’Ancien Régime, quelle est leur fonction et de quelle manière le Journal de Paris s’y apparente-t-il ? Jean Sgard et Michel Gilot réunissent sous le terme de “spectateurs”‘ ’“‘ tous les journaux dont les titres désignent un narrateur fictif ’”458 ’Ils représentent une forme personnelle de journalisme, qui privilégie la réflexion critique individuelle, ainsi que le témoignage, le regard direct sur la société et‘ ’“‘ la liberté de bavardage ’”‘ , ’qui repose sur un besoin constant de prendre la parole, de se mêler de tous les domaines, et de toucher à tous les aspects du genre humain, visant à une transformation d’ordre culturel459.

A la naissance du Journal de Paris le temps des “spectateurs” est déjà révolu. Le journal-entreprise à grand tirage, pourvu d’un système de distribution tentaculaire, qui organise l’information en rubriques régulières, nettement délimitées, assiégé par un public omniprésent, toujours plus désireux d’intervenir à sa rédaction, épris du savoir raisonné et encyclopédique et engagé à servir le bonheur public, est assez loin des “spectateurs”‘ ’contestataires des formes journalistiques canoniques, dont la vie est éphémère et le public indéfini460. ’Il y a, de surcroît, une distance considérable entre le journaliste-moraliste des “spectateurs”, narrateur fictif qui exalte la prise de parole à la première personne, l’expression libre et directe, le bavardage débridé, et l’équipe compacte des journalistes de Paris qui tentent de concilier leur qualité d’informateurs et de médiateurs impersonnels et impartiaux à celle d’auteurs exprimant leur point de vue et assignant à la variété de l’information une unité de ton. Cette unité se manifeste dans l’espace privilégié qu’ils assignent au courrier des lecteurs et à la manière dont ils sélectionnent et gèrent celui-ci, dans le but de construire indirectement une idéologie propre au Journal, qui réunit et lie l’ensemble des lecteurs. Tandis que le “nous” ou le “on” éditorial tend à l’expression neutre, impartiale, dépouillée des marques de l’individualité (bien que ces efforts soient souvent contredits par les partie pris évidents des rédacteurs), le courrier des lecteurs se présente comme le triomphe de l’intervention personnelle, de la prise de parole libre, ainsi que de la multiplicité infinie des points des vue, des propositions et des exigences.

Le “spectateur” est encore évoqué par quelques lecteurs du Journal de Paris, sans qu’il y ait pour autant beaucoup de nostalgie pour son modèle. Il peut arriver qu’une lectrice assidue de la feuille soutienne qu’un quotidien au service des mœurs, du bon goût et du bien public peut facilement remplir l’office de “spectateur addisonian”, par ses dispositions à‘ ’“‘ corriger des défauts et des ridicules ; donner de bonnes vues ; indiquer des actes de vertu et de courage ; analyser en peu de mots un bon Ecrit ; punir un mauvais Auteur en citant un trait de sa préface ’”461 ’Un autre trait du Journal qui évoque le modèle du périodique anglais serait‘ ’“‘ la forme frivole du badinage ’”‘ , sous laquelle se cache un ’“‘ fond de raison et de morale ’”‘ , ’et dont la fonction est de donner la chasse au ridicules, forme qui ne semble pourtant pas être agréée par l’ensemble du lectorat462.

En réponse à une lettre anonyme publiée par le quotidien, un lecteur prend la défense du Spectateur d’Addison et de celui de La Croix, en affirmant sa conviction que ce sont des‘ ’“‘ formes d’ouvrages très-agréables et très-utiles ’”463. ’Selon lui, la fonction du “spectateur” est celle d’“‘ observer et d’avertir les autres ’” et doit être remplie par des‘ ’“‘ hommes éclairés ’”‘ . ’Et c’est dans cette catégorie qu’il inscrit indistinctement‘ ’les auteurs de feuilles appelés “spectateurs”, les‘ ’“‘ Magistrats ’”‘ , ’les‘ ’“‘ Sergents ’”‘ ’et les‘ ’“‘ Inspecteurs ’”‘ , ’sans parler des‘ ’“‘ bons critiques de la Littérature ’”, tels Molière et La Bruyère, Boileau et Montesquieu. Malgré tout, ces réflexions sur la fonction sociale des “spectateurs” dans un sens élargi, ne contient pas de références au Journal de Paris, sauf la conviction que ce celui-ci devrait se pencher sur ce sujet.

Un autre correspondant, s’interrogeant en revanche sur le rôle de “spectateur” du quotidien, observe que celui-ci est largement‘ ’dépassé, sinon étendu et amélioré‘   ’:

‘On vous a exhorté, ce me semble, à faire de votre Journal un Spectateur dans le genre d’Adisson. Cette idée est bonne ; mais quand elle serait sans difficulté, ce qui n’est pas en France, celle que vous avez suivi vaut mieux. Le vrai Spectateur n’est pas seulement celui qui moralise sur les variétés des caractères, mais celui qui observe la société dans tous ses moyens d’être heureuse et c’est ce que vous faites464.’

Ce message de lecteur est on ne peut plus clair sur le rapport du public de la fin des années 1770 avec le genre de journalisme incarné par les “spectateurs”. Le public du Journal de Paris ne cherche plus la morale badine du Spectateur d’Addison, et ne se contente plus de son regard scrutateur sur la variété des caractères du genre humain. Une fois la liberté d’expression acquise comme qualité inaliénable du nouveau public, le temps du bavardage indiscret et de la pensée capricieuse du “spectateur” est décidément révolu. En revanche, le lecteur du Journal souligne l’avènement d’une nouvelle vision de la production périodique, dont la fonction principale est de participer à l’utilité sociale, au bonheur public. Et même si les pensées fugitives et les digressions badines sont encore tolérées dans le corps du Journal de Paris, s’inscrivant dans le mode “agréable”, indispensable à tout ouvrage, le public encourage décidément, avec de plus en plus d’intensité, le caractère utile de la feuille parisienne, son rôle actif dans la construction d’une société meilleure. Le lien le plus frappant entre le quotidien de Paris et le Spectateur d’Addison est constitué par la prise de parole libre, accompagnée de la franchise du langage, se maniefestant à travers le courrier des lecteurs. Un lecteur Anglais tel “Tom Reader”, ne peut être qu’enthousiaste de ce rapprochement, et qui plus est, il affirme sans hésitation que c’est justement à ses “‘ petites lettres ’”‘ ’que le Journal doit son succès, voire sa survie, dans un contexte plutôt hostile :

‘Dès que votre Journal parut, j’eus mille peines à le faire agréer. On le critiqua beaucoup : je le défendis avec chaleur. Enfin j’ai pris le dessus ; mais je vous en avertis, M le Journaliste, vous ne devez ce changement qu’à vos petites Lettres465.’

Le succès de l’échange épistolaire dans le journalisme du XVIIIe siècle est lié à un long travail de recherche de sa propre forme et de ses propres modes d’énonciation. Le Journal de Paris incarne une étape tardive de cette recherche, avec son effort de concilier, sous une forme unitaire et cohérente, la voix impersonnelle et impartiale d’une équipe rédactionnelle, vouée à la médiation et hantée encore par l’idéal de l’information objective, et la liberté d’expression offerte à un lectorat composite, qui prend la parole à la première personne, exhibe ses dispositions et ses humeurs, vit ouvertement et intensément ses émotions et espère pouvoir les partager, et propose ses productions épistolaires imprégnées de la rhétorique du moi, au jugement public.

Dès sa naissance, le Journal annonçait qu’il se proposait d’être une “‘ correspondance familière et journalière entre les Citoyens d’une même ville ’”‘ , ’et à partir du 18 janvier 1777, avec l’introduction de la‘ Lettre aux Auteurs du Journal, ’il donnait libre voix à ses lecteurs, les invitant, comme il avait promis, à participer à la rédaction de ses feuilles. L’emploi du courrier de lecteurs présente plusieurs avantages pour le quotidien de Paris. Tout d’abord, il offre un moyen commode de présenter l’information quotidiennement. Les lettres publiées appellent d’autres lettres, des sujets lancés, souvent modestement, acquièrent une ampleur inattendue et cette correspondance parfois très serrée, souvent passionnante, représente une source d’information intarissable, au point que les rédacteurs affirment devoir faire des sélections assez sévères, écarter une multitude d’épîtres intéressantes prétendant à la publication. La “Lettre aux Auteurs du Journal” acquiert le statut de rubrique de la feuille, elle peut à la fois substituer ou s’introduire dans toute autre rubrique. Les détracteurs du Journal ne manquent pas de crier au remplissage466.

Un avantage considérable du courrier des lecteurs consiste dans l’idée de vivacité et de fluidité qu’il imprime au Journal. Malgré la structure tabulaire de la feuille, de sa monotone reproduction journalière, le Journal de Paris gagne la confiance d’un grand nombre de‘ ’lecteurs grâce à la multitude de voix, de tons et de sujets auxquels il donne accès à travers son courrier. Les lettres à la première personne créent à la longue un climat de confiance et de complicité entre les différents lecteurs qui lisent le‘ Journal ’tous les jours, en leur donnant le sentiment d’appartenance à une communauté. Comme dans un véritable échange épistolaire privé, la masse des lecteurs du Journal devient pour celui qui écrit ses “‘ confidents ’”467.

D’une part, les rédacteurs des lettres sont bien conscients que leurs petites productions sont vouées à un vaste public ‘ ( ’“‘ Je suis aussi de votre large confrérie ’”468, affirme un lecteur), ’ce qui conditionne sans doute leur façon d’écrire, d’autre part, ils s’adressent au Journal comme à une communauté restreinte de “confidents”, liés par la recherche de l’intimité et de la confiance dans l’échange. Confrères ou confidents, les lecteurs du Journal se sentent liés les uns aux autres par un fil invisible, et malgré leurs différences d’opinions et de positions, ils se trouvent réunis par les valeurs et les idéaux du Journal, à l’existence duquel ils participent activement et avec un sens de responsabilité. La force du quotidien est donc de rassembler et maintenir un lectorat qui le lit et l’écrit tous les jours. Un lecteur y exprime son adhésion en observant :‘ ’“‘ votre Journal offre un moyen simple de se communiquer ’”469. ’Pour un autre, le quotidien crée des liens interpersonnels mis sous le signe de l’utilité :‘ ’“‘ votre Journal [est] consacré (…) à servir de rapprochement entre l’homme qui désire de se rendre utile et celui qui a besoin qu’on le lui soit ’”470.

Nous allons explorer, dans ce qui suit, quatre aspects de l’usage du courrier des lecteurs dans le Journal de Paris : en partant de ce qu’en dévoilent les rédacteurs et les lecteurs eux-mêmes de son mécanisme, nous allons faire un essai de typologie des lettres insérées dans le Journal, relativement à leur nature, à leur fonction et à leur rapport à la feuille. Par la suite, nous allons découvrir la rhétorique employée par la lettre candidate à la publication, son ton et son style, et finalement, nous allons nous pencher sur la lecture du Journal comme processus vu dans sa complexité (les modes et les habitudes de lecture du quotidien, les motivations de‘ ’lecture et d’intervention à la rédaction du Journal, les stratégies d’écriture et de communication employées).

Quel est le mécanisme qui régit le courrier des lecteurs dans le Journal ? Quels sont les critères de sélection et d’insertion des lettres ? Les rédacteurs du quotidien et les rédacteurs des lettres publiées se partagent la tâche d’expliquer, par des bribes d’informations éparses à travers les numéros, la façon dont est géré le courrier d’un côté et de l’autre.

Les rédacteurs exposent dans des avis et des notes, quelques-unes des règles qui régissent la sélection des lettres du courrier. Lorsque une question est lancée au lectorat du Journal, et que les réponses arrivent à profusion, les rédacteurs sont obligés d’en choisir un certain nombre et d’en réfuter d’autres. Telle est la question du chevalier de Meude-Monpas,‘ ’“‘ un organe touchant est-il toujours une preuve de sensibilité ? ’”471, à laquelle s’empressent de répondre, selon les rédacteurs, ’“‘ un grand nombre de lettres ’”472 ’Le premier jour, ils décident de publier une seule lettre, à savoir‘ ’“‘ la plus courte et celle qui répond plus directement à la question ’”.‘ ’Pour le reste, ils projettent d’imprimer celles qui semblent avoir présenté “‘ les meilleures observations ’”‘ , ’tout en se réservant le droit de retrancher ce qui ne leur paraîtra‘ ’“‘ pas intéressant, ni propre à résoudre la difficulté proposée ’”.‘ ’Lorsqu’ils ont donc à faire avec des ondées de lettres en réaction à une question unique, les lecteurs proposent un enchaînement de lettres choisies, qui s’étendent parfois sur plusieurs numéros, et qui répondent à des critères tels la concision, la brièveté, le degré d’intérêt potentiel.

Une longue controverse supposant une série interminable de répliques peut également monopoliser plusieurs numéros du Journal et, si elle ne s’éteint pas par elle-même, les rédacteurs sont obligés d’y mettre un terme eux-mêmes, avant qu’elle ne devienne ennuyeuse pour le public. Telle est une longue controverse entre Mallet Dupan et un adversaire anonyme473, ’que les rédacteurs décident d’interrompre par une dernière lettre, contenant, en deux colonnes parallèles les objections et les réponses des opposants, et publiée sur deux numéros de Journal. La concession d’une dernière réplique d’une controverse à bout de souffle est accordée au nom du seul principe d’impartialité, que brandit si souvent l’équipe rédactionnelle, en revanche son interruption imminente est dictée par le danger de perdre‘ ’l’attention des lecteurs474. ’Ce sont surtout les traits de bienfaisance, touchant les sentiments d’un public prêt à s’émouvoir et à délier sa bourse qui produisent une quantité considérable de réactions de lecteurs, et devant l’avalanche de contributions écrites et matérielles, les rédacteurs avouent, désolés, qu’il leur est‘ ’“‘ impossible d’imprimer dans leur entier toutes les lettres ’”475 ’et peuvent proposer, en revanche, de désigner les sommes offertes ou les souscriptions476.

Les rédacteurs disposent également du pouvoir de publier dans l’ordre qu’ils choisissent, les lettres qui se trouvent dans leur possession. Ils peuvent donc décider d’invertir, à la publication, l’ordre dans lequel les lettres sont arrivées au bureau du Journal, ou encore, dans le cas d’une lettre emboîtée dans une autre, il peuvent les publier séparément, dans deux numéros différents, la lettre englobante succédant à la lettre englobée. C’est le cas de la seconde lettre de “L’Hermite de Senart” 477, ’qui, selon les dires de son auteur, contient une lettre du Curé de Pavant, que les rédacteurs avouent, dans une note en bas de page, avoir déjà publiée la veille.

Les rédacteurs tiennent à quantifier les lettres reçues, ou mieux, à en souligner la quantité incalculable, ce qui correspond à un rapport d’échange très intense avec son lectorat et confirme le succès de la formule proposée. L’avènement de la machine aérostatique des frères Montgolfier donne lieu à une‘ ’“‘ prodigieuse quantité de lettres ’”478 ’et même le plus petit sujet, tel l’éclaircissement sur un titre de dignité du Moyen Age, fait l’objet de‘ ’“‘ plusieurs lettres ’”479.

La bienveillance des journalistes de Paris quant à l’insertion des lettres de lecteurs dans leurs feuilles n’est pas une donnée constante. Si un lecteur note‘ ’“‘ la facilité avec laquelle vous insérez les ’ ‘ Lettres qui sont adressées, lorsqu’elles portent avec elles un intérêt quelconque ’”480,‘ ’les rédacteurs n’hésitent pas non plus à refuser des lettres qui, à leur avis, ne conviennent pas, par leur forme, leur ton ou leur contenu, au Journal, et leurs justifications concises sont les seules traces repérables de ce fonds inconnu de lettres envoyées et jamais publiées. Tout d’abord, lorsqu’une lettre publiée joue le rôle d’intermédiaire pour un nouveau candidat au statut de correspondant du Journal, réel ou fictif qu’il soit, les rédacteurs rappellent que le quotidien est ouvert à tout le monde, pourvu qu’on respecte les règles du jeu481. ’Le jour où les journalistes se préoccupent du sort du‘ Courrier de l’Europe, ’dont le retard dans la distribution commence à devenir inquiétant, ils décident, par solidarité entre confrères, de ne pas publier la diatribe de leur correspondant, “M Embargo”, contre ce dernier,‘ ’“‘ quelque motif qu’il ait à se plaindre et quelque intérêt qu’il nous suppose à servir son ressentiment ’”482.‘ ’La justification de leur geste est double : non seulement il serait malhonnête de frapper un confrère en difficulté, mais ils voient dans le sort du‘ Courrier ’une possible projection de leur propre sort, ce qui les motive de s’apitoyer encore plus sur le malheur du périodique supprimé :‘ ’“‘ (…) nous avons éprouvé qu’on était assez puni de manquer à ses engagements avec le Public, et tout à la fois à déplaire au Gouvernement ’”483.

La raison du refus n’est cependant pas toujours spécifiée, surtout si les rédacteurs de la lettre ne dévoilent pas leur identité :‘ ’“‘ Si nous connaissions par leurs noms Messieurs les Lettrés de Senlis, nous leur ferions part des raisons qui nous font supprimer leur dernière Lettre, et nous présumons qu’ils en seront satisfaits ’”484.‘ ’Et si les anonymes ont peu de chances d’avoir des explications sur l’écart de leurs lettres à l’intérieur du quotidien, ils peuvent bénéficier en revanche d’une réponse hors-Journal, qu’ils sont invités à venir‘ ’chercher au Bureau485. ’De toute façon, il est évident que l’énonciation des refus de lettres par les journalistes entrouvre une petite fenêtre sur le processus d’élaboration de la matière du Journal, ainsi que sur le rapport du périodique avec une partie obscure, inconnue, de son lectorat, dont les interventions sont destinées à s’entasser dans les coulisses du périodique. C’est en même temps un témoignage minuscule, mais précieux, du travail de fourmis des journalistes de la feuille, de leur patient dépouillement de l’information, qui leur arrive sous forme écrite, avec pour seule garantie de véridicité, la bonne foi des lecteurs-rédacteurs désireux d’entrer en scène.

Les rédacteurs du Journal cultivent l’idée que les lettres insérées appartiennent par leur nature et leur fonction à la feuille quotidienne, tandis que celles qui sont objet d’un rejet, en sont écartées par incompatibilité avec cette même nature et cette même fonction. En 1789, les rédacteurs annoncent aux abonnés que, vu l’intensité des événements du moment, ils se voient obligés de fermer les portes du Journal aux avis “‘ n’ayant qu’un intérêt particulier ’”, pour donner plus de place aux‘ ’“‘ objets plus généralement intéressants ’”486. ’Parfois, les rédacteurs semblent hésitants quant à l’“appartenance” d’une lettre au Journal, et, se retranchant derrière une position de neutralité, résumée par la notion d’“impartialité”, ils renvoient au public la responsabilité d’en décider. C’est le cas de la lettre signée par le pseudonyme “Bradel fils”, qui est précédée par une note sommaire :‘ ’“‘ L’impartialité dont nous faisons profession nous a déterminés à insérer la lettre suivante ; c’est au public à prononcer ’”487.

La même neutralité s’avère bien commode lorsque les journalistes doivent lancer aux abonnés un nouveau projet proposé par un de leurs abonnés. Quelque attrayante qu’elle soit, une nouvelle entrée court toujours le risque d’un échec, et par conséquent, pour les journalistes, mieux vaut avertir le public d’emblée que c’est lui qui est responsable du sort de celle-ci, que de se prononcer eux-mêmes en faveur ou contre. Ainsi, lorsque un correspondant offre aux rédacteurs du Journal son “cahier” de traits historiques, ceux-ci répondent :‘ ’“‘ Nous acceptons avec reconnaissance le présent de notre Abonné. Son projet nous semble séduisant ; mais l’usage que nous en ferons sera entièrement subordonné à l’opinion de nos Lecteurs ’”488.‘ ’Les rédacteurs jouent aussi le rôle d’intermédiaires entre des correspondants qui‘ ’ne veulent, ou ne veulent plus, communiquer. C’est surtout le cas des polémiques où l’un des adversaires est contrarié ou ennuyé, au point qu’il charge les journalistes à répondre à son nom. Suite à une lettre sévère du marquis de Ximenez contre l’auteur anonyme d’un article sur le Chevalier de La Morlière, les rédacteurs interviennent pour annoncer que‘ ’“‘ l’Auteur de l’article que relève si gravement ici M le Marquis de Ximénès, ne croit pas devoir lui répondre afin de ne pas faire d’une plaisanterie une chose sérieuse ’”489.

Les lettres envoyées au bureau d’un journal quotidien n’attendent pas, tout retard étant interprété comme un manque d’intérêt de la part des rédacteurs, d’où la nécessité de fournir, de temps en temps, des explications quant aux insertions de lettres reportées. La publication d’une lettre signée par Rigaut, “Physicien de la Marine”, qui chargeait les journalistes de Paris de trouver une ingénieuse machine‘ ’“‘ pour la réduction des membres fracturé ’”‘ ’et de la faire graver aux frais de l’expéditeur, a été renvoyée, selon les rédacteurs, pour avoir attendu de pouvoir‘ ’“‘ remplir ses vues d’humanité ’”490.‘ ’La précision du contretemps de la part des rédacteurs est fondamentale pour la chronologie des lettres déjà insérées, qui ont un rapport les unes avec les autres. Ainsi, si une lettre est arrivée l’avant-veille,‘ ’“‘ trop tard pour être imprimée ’”491, ’les rédacteurs doivent prévenir, par exemple,‘ ’“‘ qu’elle est faite sans que l’Auteur ait connu celle insérée dans le n° d’hier ’”.

Lorsque les rédacteurs s’expriment sur le fonctionnement et la gestion du courrier des lecteurs, ils précisent les règles qui régissent son emploi, et donnent l’idée d’un parfait contrôle de leur part. Certes, le Journal de Paris est le journal de tous, ouvert à toutes les idées et à toutes les opinions, pourtant, il est en même temps un petit monde organisé par un ensemble de règles, qu’il faut connaître et respecter pour y accéder. Les interventions de l’équipe rédactionnelle sont censées mitiger, maintenir toujours un juste milieu dans les affrontements épistolaires, diriger le flux et l’action des lettres, organiser les voix, établir les limites de ce qu’on peut ou ne peut pas dire, sélectionner et coudre ensemble, dans l’ordre choisi, les lettres qui entrent tous les jours dans la structure du Journal.‘ ’Bref, les rédacteurs nous apparaissent comme les manipulateurs en chef de cette riche matière qui nourrit le quotidien. Faut-il tirer la conclusion que la masse des lecteurs-correspondants, qui fournit cette matière au Journal, est une force bien négligeable, parfaitement maniée par les‘ ’rédacteurs ? Un regard fugitif sur les moyens de persuasion des lecteurs pour faire insérer leurs productions dans les pages du Journal, nous révèle que la pression du public sur l’ordre imposé par les rédacteurs est considérable, et que, en réalité, lecteurs et rédacteurs constituent les deux forces qui oeuvrent, chacune à sa manière, à la fabrication de la feuille.

Quelles sont donc les stratégies des lecteurs pour se faire publier ? Comment s’emploient-ils pour faire pression sur les rédacteurs du Journal ’et conditionner leur choix ? L’une des stratégies les plus communes pour presser les rédacteurs à publier une lettre c’est‘ ’invoquer leur impartialité. C’est au nom de celle-ci qu’on espère trouver une place dans les pages du Journal, et c’est toujours elle qui impose éventuellement le droit du lecteur qui a déjà publié, à une‘ ’“‘ dernière réplique ’”492 ’Certains lecteurs n’hésitent pas à réprimander leur journal préféré de ce qui, à leurs yeux, n’est pas digne de lui, voire de lui suggérer des corrections. C’est le cas de “L’Anti-Louangeur”, qui n’aime pas que le Journal accueille des nécrologies d’inconnus qui ne se sont distingués que par‘ ’“‘ des petites vertus privées ’” et par‘ ’“‘ un petit mérite domestique ’”‘  :

‘(…) se constituer en frais d’impression, pour louer des noms qui n’ont été publics que dans des registres baptistaires, et mortuaires de leurs paroisses ; convenez-en, Messieurs, on ne saurait pousser l’indulgence plus loin. Pour moi, je n’aurai jamais celle de la souffrir en vous. Je ne veux pas que vous ennuyiez vos Lecteurs ; assez d’autres ont la bonhomie de se charger de cette besogne. Si jamais vous les imitez, je vous promets une diatribe de ma façon bien nourrie d’épigrammes et de sarcasmes, et vous aurez encore l’impartialité de l’imprimer493.’

“L’Anti-Louangeur” se montre impitoyable avec un journal qui pousse son zèle d’appartenir à tous jusqu’à la démocratisation de l’espace des nécrologies. Le lecteur du Journal est dans un rapport de familiarité tel avec ce dernier, qu’il se permet de le couvrir de reproches, de lui rappeler qu’il n’a pas le droit d’ennuyer ses lecteurs, de le menacer par une vengeance à la hauteur, s’il devait ne pas tenir compte de l’avertissement et finalement, de lui imposer, au nom de l’impartialité, de le publier encore une fois, quelque déplaisant que soit le contenu de sa diatribe. Bref, le lecteur se comporte ici en despote absolu, qui dicte aux rédacteurs les modifications et les corrections à faire et impose ses interventions.

Le quotidien est désigné comme la terre d’accueil des lettres en vadrouille, qui ne trouvent pas de place ailleurs. C’est la lettre dont l’objet est la recherche du destinataire inconnu d’une autre lettre, que seul le Journal saurait dénicher494, ’c’est la lettre de l’étranger à Paris, qui ne connaît personne, et qui ne sait à qui confier sa “‘ détresse ’”495, ’c’est la lettre qui contient un objet rare ou une pièce unique confiés aux rédacteurs comme relique digne de conservation496, ’c’est aussi la lettre d’un aveugle-né qui, reconnaissant d’avoir trouvé un moyen de lire un extrait du quotidien,‘ ’“‘ ne peu[t] plus résister au désir d’[y] envoyer une lettre à [sa] façon ’”497,‘ ’et c’est encore la lettre dont le destinataire-aérostateur ne possédant pas d’adresse fixe, se pose sur le support mobile qu’est la feuille de Paris498. ’La lettre dans le Journal offre non seulement l’enivrement de la visibilité à grande échelle pour son auteur, mais aussi l’avantage de la circulation rapide dans l’espace-temps, susceptible de saisir au vol et de résoudre tout problème.

Cette image de lettre légère, aérienne, en manque de destinataire précis, qui survole le Journal à la recherche d’un appui, est magnifiquement illustrée par une lettre originale, rédigée par l’aérostateur Blanchard, pendant l’un de ses voyages aériens et lancée au hasard des courants d’airs sur la première ville. Les rédacteurs arriment cet objet volant et volatile à leur feuille, en précisant dans une note les circonstances précises qui ont acheminé la lettre au bureau du Journal : “‘ Trouvée à Saint-Armand en Artois, distant d’Arras de cinq lieues, par le Sr Lefelz, Fermier aud. Lieu, à 3 heures précises, après avoir vu passé le Ballon, le 18 avril ’”499 ’Mais de quoi peut avoir l’air une lettre écrite en vol et expédiée par la voie originale que nous venons de mentionner ?

‘Aux Auteurs du Journal,
En l’air, ce 18 avril 1786
On me trouve quelquefois original, j’ai beaucoup le plaisir à l’être ; c’est pourquoi dans ce moment, appuyé sur le bord de mon char, vacillant, planant à trois mille toises du globe terrestre, embrassant d’un coup d’œil l’orbe de l’univers, foulant l’immensité à mes pieds, je vous adresse la présente, que je me propose de jeter sur la première Ville que je pourrai découvrir en descendant.
Je vous ferai part de mes observations, lorsque, solidement appuyé sur la terre, je pourrai, à mon aise, faire le résultat de mes calculs.
J’ai l’honneur d’être, etc.
Signé, Blanchard, Citoyen de Calais, Pensionnaire du Roi500.’

Bien qu’insérée à la rubrique “Physique”, la lettre volante de Blanchard ne contient, à vrai dire, aucune information d’ordre scientifique. D’ailleurs, l’auteur lui-même explique que le vacillement de l’engin ne lui permet pas de rendre compte par écrit de ses derniers calculs, chose qu’il ferait une fois les pieds bien plantés sur terre. Qui plus est, l’ivresse de l’expérience du vol, donnée à si peu de mortels, lui inspire le désir de noter et de communiquer ses sensations, et particulièrement celle d’être le maître d’un univers qu’il embrasse d’un seul coup d’œil, d’une immensité qu’il foule sous ses pieds. Il va de soi que les pensées organisées, épurées d’emphase et transformées en calculs exacts sont renvoyées au moment de l’atterrissage, au moment où l’ivresse et l’enthousiasme que procurent le vol se calment, laissant de la place au travail de la raison. Il est intéressant de voir cette petite lettre originale, qui voyage dans l’espace par la force du vent, s’imposer à la publication, malgré son défaut d’information. Peut-on refuser une place à une lettre qui est arrivée presque par elle-même au bureau du Journal ? Elle s’y insère avec le même naturel, la même autosuffisance et la même autodétermination avec laquelle elle avait trouvé son chemin jusqu’à destination : on dirait que sa publication n’est presque plus une question qui concerne le travail de sélection des rédacteurs. Le cas de la lettre volante est, certes, unique, pourtant ce n’est pas le seul exemple de production épistolaire qui, poussée comme par une force toute propre, s’impose à la publication, au-delà même des considérations rédactionnelles et de son système de règles.

De plus, cette lettre tombée du ciel a une pure fonction de don au Journal, que nous avons retrouvée dans d’autres nombreuses lettres. Un abonné fait don au Journal d’une copie de son cahier de traits historiques, résultat de ses lectures et de ses réflexions familiales, et met le sort de ce dernier, en toute confiance, entre les mains des rédacteurs : “‘ je vous l’envoie, et vous en ferez tel usage que bon vous semblera. Je me repose entièrement sur votre goût, votre discernement, et l’expérience que doivent vous avoir donné vos fréquentes relations avec le public ’”501 ’La lettre-don, tout comme les idées qu’elle contient, deviennent la propriété des rédacteurs, qui peuvent s’en servir selon leur gré, voire ont le droit de destruction‘  : ’“‘ imprimez-la ou rejetez-la ’”502, invite un correspondant, pendant qu’un autre s’exclame‘ ’“‘ une idée me vient, je vous l’envoie ’”503, ’pour ajouter par la suite, modestement‘ , ’“‘ vous en ferez l’usage que vous jugerez à propos ’”.

Cependant, tous les lecteurs ne sont pas aussi généreux avec leurs lettres et beaucoup d’entre eux tiennent à ce que leurs productions épistolaires soient publiées, d’où l’emploi astucieux de toute une série de tactiques de persuasion. La “lettre-don” est contrastée par la “lettre-essai”, par laquelle l’auteur se‘ ’propose de tester la bienveillance des rédacteurs., dans l’intention d’en envoyer d’autres, une fois cette première acceptée. Telle est le lettre du président de la Société des Adelphes, qui se présente comme “‘ avant-propos ’”‘ , ’qui‘ ’“‘ nous fera connaître si vous agréez d’entrer en correspondance avec nous ’”504.‘ ’Un autre lecteur intéressé aux projets d’embellissement de la capitale, offre sa contribution en envoyant au bureau deux lettres-échantillons et en assurant que si celles-ci étaient agréées,‘ ’“‘ vous en recevrez la suite sans beaucoup de délai ’”505 ’C’est ainsi qu’une partie du courrier des lecteurs du quotidien évolue sous la forme de l’offre amiable : si vous publiez ma lettre, je promets de vous en envoyer d’autres. Pour attirer l’adhésion des rédacteurs et assurer la publication de leurs lettres, beaucoup de correspondants présentent celles-ci comme des fragments d’un ouvrage unitaire, déjà existent, que la structure du Journal contraint au morcellement. La première lettre sert d’appât pour les journalistes et pour le public et contient la promesse d’une suite encore plus intéressante. Certains correspondants ont également recours à l’astuce de la préface : après une longue introduction, où il parle de tout et de rien, le lecteur signant “Fulvius” révèle sa stratégie :

‘Comme cette lettre a déjà quelque étendue, vous voudrez bien me permettre qu’elle me serve de Préface ; un Auteur ordinaire a du goût pour les préfaces ; or me voilà Auteur aussi si vous imprimez cette lettre. Je ne serai pas, en tout cas, le premier de vos Correspondants qui vous aura écrit seulement pour vous promettre de vous écrire. Mais si je promets, je tiendrai parole (…)506.’

Parfois, le correspondant est en possession de lettres ou de papiers inédits, qu’il offre aux rédacteurs seulement au fur et à mesure qu’ils sont publiés507 ’D’autres fois, en revanche, le correspondant ne possède pas la suite, mais promet de répondre ponctuellement aux rédacteurs, à chaque fois que sa dernière lettre paraît dans le Journal, comme il advient dans le cas du “Solitaire des Pyrénées”.

‘Il me prend fantaisie d’entrer en correspondance avec vous. Cette fantaisie ne sera peut-être pas autant de votre goût que du mien ; mais si les lettres que je vous destine ne vous plaisent pas, elles ne vous fatigueront plus longtemps. Si vous imprimez les premières, je vous enverrai d’autres ; et le moment où vous cesserez de m’imprimer je cesserai de vous écrire. Je n’appellerai point de votre jugement ; vous connaissez mieux que moi ce qui convient au Public qui vous lit, et je m’en rapporterai à votre goût sur ce qui peut intéresser le sien508.’

Qui plus est, “Le Solitaire” propose deux longues lettres farcies de digressions au quotidien, en renvoyant à la troisième le ‘ “plan de travail” ’ qu’il compte suivre dans sa correspondance. Dans ces cas, le courrier des lecteurs fonctionne moins comme échange spontané et inconditionné, mais plutôt comme commerce. C’est dans ces termes que se présente, d’ailleurs, une lettre signée par Feydel : “‘ Je vais vous proposer un marché. Permettez-moi de répondre deux mots à la Lettre de M Mentelle, insérée dans votre Journal d’hier ; et je vous conterai en revanche une anecdote qui vous ferait plaisir ’”509. ’Lorsque les conditions de l’échange sont accompagnées par des reproches adressés aux rédacteurs et mêlées de prières d’insertion de la dernière lettre, on assiste plutôt à un marchandage entre le correspondant et le Journal :

‘(…) vous vous rappellerez, Messieurs, que je ne dois donner aucune suite à la correspondance que je vous ai offerte, qu’autant que vous m’en marquerez votre contentement, en publiant les lettres que je vous écrirai. Je vous ai adressé, il y a quelques jours, une seconde, que vous n’avez point encore insérée dans votre Journal. je ne continuerai que quand celle-là aura été placée ; mais je vous prie de vouloir bien y mettre celle-ci dès demain, s’il est possible (…)510.’

Pourtant, les stratégies des correspondants pour se faire imprimer ne se limitent pas à la pure négociation avec la rédaction du Journal.“Le Solitaire des Pyrénées” décide de faire pression sur la feuille en douceur, à savoir de ne pas attendre la publication de sa première lettre pour envoyer la seconde, puisque, dit-il, “‘ la distance qui nous sépare suspendrait trop longtemps l’empressement peut-être un peu puérile que j’ai de voir mes rêveries imprimées ’”511.‘ ’En réalité, le lecteur désintéressé qui suspend le calcul et donne libre voix à son enthousiasme enfantin de voir publier ses productions dans le Journal n’emploie qu’une technique rhétorique différente de persuasion, et la pression de ces correspondants enflammés sur les rédacteurs n’est pas moindre.

La supplication au nom de l’intérêt collectif est un autre moyen largement répandu parmi les correspondants et non dépourvu d’efficace :‘ ’“‘ Persuadé que les événements tout à la fois rares et intéressants pour des cœurs sensibles et pour le bon exemple, attireront, au moins pour un moment, l’attention du Public et principalement la vôtre, je vous supplie d’insérer cette Lettre dans vos Feuilles ’”512.‘ ’Pour faire publier sa lettre, Linguet utilise la logique de la compensation ; si, pendant son silence, le Journal a publié d’autres lettres sur un sujet qui le concerne, le droit de reprendre la parole s’impose sous peine de lèse-impartialité513. ’Il y a aussi des des correspondants obstinés qui, malgré le refus de la part des rédacteurs de les publier continuent à insister et, dans l’espoir de plaire, sont disposés à changer de sujet en un tournemain. Feydel en est un, et sa lettre du 18 décembre 1788 au Journal commence par ce virement :‘ ’“‘ Eh bien, Messieurs, parlons d’autre chose, puisque vous ne voulez pas imprimer ma réponse à M Viallon. Je prends pour sujet l’Almanach de Liège 1789, que j’ouvris hier par hasard chez un libraire (…) ’”514. ’L’insertion d’une lettre peut devenir l’également l’objet d’un pari lancé par son auteur aux rédacteurs : “‘ Vous insérez quelquefois dans votre Journal des lettres qui vous sont adressées, mais sûrement vous ne placerez pas celle-ci, et même vous seriez fort embarrassés d’y répondre ’”515.

Tous ces exemples illustrent la pression du public sur les rédacteurs du Journal de Paris, qui, d’une part, affirment leur autorité et imposent leur règles quant à la gestion du‘ ’quotidien, et d’autre part, font de l’expression libre de la masse des lecteurs, à travers l’accueil d’un vaste courrier, l’une des clés de leur succès. Le public du‘ Journal ’n’est pas un protagoniste qui répond poliment à l’invitation de participer à la rédaction du quotidien, sans y interférer pour autant de façon décisive. D’une certaine façon, il possède un pouvoir égal, sinon plus étendu que celui de l’équipe de journalistes-propriétaires.

Pour se faire publier, les lecteurs ont recours, nous l’avons vu, à une large palette de moyens rhétoriques, recouvrant la supplication et la menace, la négociation directe et le défi, la générosité inconditionnée et l’insistance obstinée. En outre, les lettres frayent leur chemin vers la publication avec la conviction manifeste qu’elles répondent au but du Journal et que leur intérêt pour le genre humain tout entier ne saurait être négligé. Des sujets tels l’utilité et la préservation publique et la bienfaisance acquièrent le statut de‘ ’“‘ titre[s] d’admission ’”516 ’au Journal et garantissent “‘ des droits de publicité ’”517 ’fréquemment invoqués dans l’incipit ou à la fin des lettres. Il est intéressant de voir comment une rhétorique qui vise avant tout d’obtenir l’adhésion de l’équipe des rédacteurs avant la publication, se transforme en une rhétorique “publicitaire” des valeurs de la feuille quotidienne. Certaines lettres invoquent, pour forcer les portes du Journal, l’empressement et l’urgence.‘ ’“‘ Je m’empresse de faire connaître à ma Patrie, par la voie de votre Journal, la découverte la plus utile et la plus précieuse de l’humanité ’”518, ’assure un lecteur‘  ; ’“‘ J’imite votre exemple louable ; je me hâte de vous annoncer une découverte qui intéresse l’humanité entière (…) ’”519,‘ ’promet un autre. Ce dernier déclare qu’il embrasse l’exemple des rédacteurs, autrement dit, qu’il appartient à la grande famille d’émules qu’ont suscitée les idées proposées par les journalistes, raison suffisante pour faire accepter sa lettre.

Souvent, les lettres des lecteurs prétendent à la publication en raison d’une fonction réparatrice ; elles soutiennent sauver le Journal de quelque injuste mais compréhensible négligence, combler une lacune, remplir une absence, trouver remède à un oubli, dénicher une omission. Leurs auteurs véhiculent l’idée que, malgré leur soin d’exactitude et leur vigilance sur l’actualité, les rédacteurs ne parviennent pas à maîtriser une information trop vaste et trop rapide, ce qui légitime une fois de plus les interventions des correspondants, sans lesquelles le Journal aurait un caractère lacunaire. Une abonnée s’indigne que le quotidien n’ait pas parlé‘ ’de la dernière nouveauté parisienne, l’ouverture du Lycée, établissement d’instruction pour les gens du monde :

‘Comment, Messieurs, vous faites le Journal de Paris, et vous n’avez pas encore rien dit de ce qui fait courir et discourir tout Paris depuis un mois ? (…) vous n’avez pas seulement consacré une ligne à l’annonce d’un établissement destiné à donner aux personnes du monde, de tout sexe et de tout âge, des cours d’instruction solide sur tous les genres de connaissances qui peuvent éclairer, éclairer le goût et orner la raison ?520

Il est, certes, difficile, de tenir tête à un reproche de lectrice et les journalistes non seulement publient sa lettre comme réparation, mais sentent le devoir de se justifier dans une note. Un lecteur observe l’étonnement général de plusieurs souscripteurs de voir manquer des pages du Journal ’“‘ une chanson qui a eu un assez grand succès il y a quelques mois ’”521 ’un autre note le silence du quotidien‘ ’“‘ sur la mort d’un homme justement recommandable ’” et conclut que cet oubli est dû à un défaut d’information des rédacteurs. C’est également l’opinion d’un lecteur informé plus que les rédacteurs à propos d’un ouvrage méritant, présenté, à ses yeux, de façon trop superficielle :

‘Je ne suis point étonné que malgré votre désir d’être utile à vos Lecteurs autant qu’il en est en votre pouvoir de l’être, vous vous soyez contentés d’annoncer simplement le titre de l’Almanach du Voyageur à Paris, sans prévenir son utilité ; je sens combien il doit vous être impossible de vous occuper généralement de tout ce qui paraît dans le genre ; souffrez que pour entrer dans vos vues générales, je prévienne vos Lecteurs sur l’utilité réelle de cet Ouvrage (…)522.’

Le public du Journal est devenu donc conscient de son rôle et de son pouvoir : il exerce sa pression sur le quotidien pour faire publier ses idées et ses demandes sous forme de lettres, et en même temps il lui fournit des compléments d’information, il supplée à ses manquements et à ses oublis. C’est un public actif et réactif qui rédige le Journal à la première personne et qui complète à la fois le travail des journalistes attitrés. Tout à coup, le Journal de Paris se révèle comme production collective autour d’un noyau central, établi par l’équipe rédactionnelle.

Encore à la recherche d’une forme qui lui est propre, le journal de la fin de l’Ancien Régime, dans sa nouvelle formule quotidienne, confie donc une bonne partie de son espace à cette forme primaire du discours journalistique qu’est la lettre. Comme le notait Alain Nabarra, le recours prolongé du journal à la lettre comme mode d’énonciation et comme principe d’organisation est compréhensible, vu les nombreux points communs des deux : écritures dans le présent, à caractère fragmentaire et périodique, dont les ruptures spatiales et temporelles conditionnent la production et la réception523. Pour un quotidien, l’emploi du courrier des lecteurs est un moyen commode et rapide de s’alimenter d’informations, se transformant en tribune publique ouverte à tous. L’insertion des lettres de lecteurs a pour effet une réaction en chaîne, puisque les lettres en attirent d’autres, si bien que les rédacteurs ont souvent l’embarras du choix. Mais surtout, la lettre est une forme d’énonciation ouverte qui embrasse aisément une grande variété de styles, de voix et de sujets. On pourrait faire un essai de typologie des lettres de lecteurs du quotidien, en fonction de leur mode d’énonciation de l’information, mais aussi de leur autonomie en relation avec le Journal auquel elles sont adressées.

Quelle est la manière des correspondants de présenter l’information au Journal ? Le plus souvent, ceux-ci prennent la plume pour communiquer directement leurs réflexions, leurs opinions, leurs sentiments, ou pour relater des évènements dont ils affirment avoir été témoins. Nombreuses sont cependant les exemples de lettres emboîtées, qui stratifient l’information. Dans ce cas, l’auteur confie aux rédacteurs une lettre ou un paquet de lettres qu’il affirme avoir reçues ou dont il a hérité et qu’il considère dignes de la curiosité et de l’intérêt publics. Laus de Boissy consigne au Journal la traduction d’une lettre qu’on dit avoir été trouvée dans les papiers de Richard Steele, précisant dans sa propre lettre que la version française est fidèle et espérant de la voir publier524. Un lecteur signant “LCDP” envoie au bureau du quotidien des lettres “‘ dont l’Auteur n’existe plus ’”‘ ’et qu’il a dépouillées au préalable de‘ ’“‘ détails et de confidences particulières ’”525. ’Un correspondant anonyme confie aux journalistes une lettre qu’il vient de recevoir d’un ami voyageant en Ecosse, relatant l’histoire extraordinaire d’une victime de l’amour526. ’Stimulé par la masse des lettres‘ ’“‘ sur différents sujets, et de différents tons ’”527 ’publiées dans la feuille de Paris, un lecteur se propose de‘ ’“‘ rendre une partie du plaisir que vous m’avez procuré ’”‘ ’et pour cela faire, il vide une malle de lettres de‘ ’“‘ plus une famille ’”‘ , ’contenant aussi des correspondances complètes, pour en faire don de quelques-unes au quotidien. Il peut arriver que des lecteurs se servent de leurs correspondances privées pour en‘ ’fournir des morceaux au quotidien : tel est l’exemple de “A, Abonné” qui, pour illustrer les mauvais effets que peuvent avoir les spectacles sur l’esprit des jeunes gens, offre au Journal des morceaux de sa correspondance avec son neveu, “Etudiant au collège du P”528.

C’est ainsi que les lettres du Journal s’enchaînent et s’emboîtent, se déploient et s’imbriquent les unes dans les autres, se succèdent en séries, se regroupent en îlots par sujets et s’attirent indéfiniment vers le bureau de la rédaction. La plupart d’entre elles sont adressées directement aux rédacteurs, même si parfois, le vrai destinataire visé est la masse du lectorat. D’autres, s’adressent à un tiers, le Journal étant dans ce cas l’intermédiaire ou le support de correspondances entre lecteurs.

Un trait intéressant de la “Lettre aux Auteurs du Journal” est son éventuelle autonomie par rapport au texte auquel elle est destinée. Elle peut être insérée dans les pages du Journal de Paris, comme elle peut être publiée ailleurs, telle quelle, ou en effaçant ses marques épistolaires, ce qui signifie qu’elle s’adapte facilement à la variété d’un périodique journalier, mais aussi qu’elle elle peut vivre par elle-même, en dehors de celui-ci. Telle est la lettre adressée au Journal de Paris et publiée finalement ailleurs. Dans une intervention de 1789, Marie-Joseph Chénier apprend aux rédacteurs l’existence d’une telle lettre qui, en raison de son étendue inappropriée au Journal, a été publiée par une autre voie :

‘Vous avez inséré dans votre Journal du 27 août une lettre sur la censure du Théâtre. J’y avais répondu sur le champ ; mais la réponse étant beaucoup trop étendue pour votre Journal, je l’ai publiée par une autre voie. Elle est imprimée à la suite de ma dénonciation des inquisiteurs de la pensée, qui paraît aujourd’hui chez la Grange, libr., rue Saint-Honoré. (…)529.’

Si le quotidien a perdu une lettre qui lui avait été adressée, il a pu, en revanche, lui faire publicité lors de sa parution comme ouvrage individuel. Il existe aussi des lettres adressées au Journal et, apparemment, jamais publiées. Jean-François de La Harpe en mentionne une dans une lettre adressée à Monsieur Lamin, Prieur de Samois : “‘ Je ne suis point surpris que les auteurs du Journal de Paris aient refusé votre lettre. Voulez-vous que Satan, comme dit l’Evangile, combatte contre lui-même ? ’”530 ’La Harpe exprime également au prieur l’intention de publier sa lettre refusée dans “‘ son journal ’”‘ , ’à savoir le Mercure de France, mais finalement il change‘ ’d’avis et se justifie : “‘ Je serai fort aise d’en orner mon journal ; mais permettez-moi de vous observer que ce serait renouveler la guerre et une guerre interminable contre des ennemis invisibles qui ne subsistent que guère ’”531.

La correspondance inédite de Chompré avec un ami de province contient plusieurs références à des lettres expédiées au bureau du Journal au nom de ce dernier, sans d’autres mentions concernant leur publication ou leur refus‘ .532 ’Parmi les commissions faites pour le compte de son ami le 20 avril 1779, figure l’envoi d’une‘ ’“‘ longue dissertation sur l’abbé des Brosses ’”‘ , ’non publiée par le Journal. Chompré commente de façon synthétique et avec une lucidité crue ce refus :‘ ’“‘ Je suppose qu’il y a eu trois raisons pour ne pas l’insérer dans cette feuille : 1- l’anonyme. 2- la longueur. – la médiocrité pour ne pas dire pis. ’”533 ’Le Journal fournit lui-même un autre exemple de lettre qui lui est adressée et dont la publication est refusée. Il s’agit d’une lettre de réclamation de la part du chevalier de Segrave, auteur d’une Machine appelée “Polychreste”, doublement fâché du plagiat de son invention et du fait que les rédacteurs lui aient déjà refusé deux fois les lettres à ce sujet :

‘Comme je m’étais imaginé que le but de votre Journal était de faire connaître au Public les objets dont il importait d’être informé, un de mes amis vous a remis de ma part, il y a quelque temps, une lettre qui était certainement dans le cas, puisque c’était pour empêcher que le Public ne fût la dupe d’une fraude très grossière. Pour des raisons que je respecte, puisque je les ignore, vous avez jugé à propos de lui refuser d’insérer ma lettre dans votre Journal (…) Messieurs, pour éviter le reproche qu’on serait très fondé à vous faire, comme c’est la troisième fois que je m’adresse à vous pour cet objet, je me flatte que vous ne refuserez dans votre prochaine feuille ma juste réclamation534.’

Pour compléter notre typologie de lettres autonomes par rapport au quotidien, ajoutons les lettres publiées dans le Journal de Paris et republiées par la suite séparément. Après avoir fait leur fortune en tant que parties du corps du Journal, certaines lettres sont également attachées à d’autres textes ou sont rééditées individuellement. L’édition des Œuvres du marquis de Villette de 1788 contient une lettre ayant pour références “A M de Corancès ; Au Château de Villette”, qui avait déjà été insérée dans le Journal de Paris le 2 juillet 1784, à la rubrique “Anecdote ”, sans être signée. Pour le reste, il‘ ’suffit de comparer l’incipit des deux versions, pour voir qu’elles sont identiques à un mot près :

‘Je suis dans le voisinage d’une petite Ville où il existe un homme qui vaut la peine de vous être annoncé. Vous publiez [avez raconté] tant de traits de courage et d’intrépidité, que peut-être ceux qui font de belles actions, regardent-ils, comme la portion la plus flatteuse de leur récompense, l’honneur d’être nommés dans votre Journal. Mais celui dont j’ai à vous parler, ne sait pas même s’il existe un Journal de Paris (…)535.’

La lettre peut être aussi objet de réimpression par extraits. Morcelée et isolée de son texte d’accueil, qui lui avait assigné un certain sens et une certaine portée, la lettre réduite à un extrait acquiert aussi une nouvelle fonction. Tel est l’Extrait du Journal de Paris, en date du 15 août 1784, N°228, ’de 3 pages‘ , ’qui cite un morceau d’une lettre du quotidien proposant la création d’un‘ ’“‘ institut de bienfaisance ’” pour les mères-nourrices, suivi d’une note de la part de l’éditeur. Celui-ci explique que‘ ’“‘ les vues de bienfaisance répandues dans cet écrit, les grandes vérités qu’il renferme, ont tellement frappé tous ceux qui l’ont lu, qu’on a généralement désiré de voir établir dans la seconde Ville du Royaume l’Institut de Bienfaisance en faveur des pauvres mères qui nourrissent leurs enfants ’ ”536. ’Cette remarque est suivie d’une explication de l’aide concrète que recevront les mères-nourrices hors d’état de gagner leur journée, et d’un modèle de souscription pour le nouvel établissement. Découpée de son contexte, la lettre du Journal passe de l’énonciation d’un projet de bienfaisance visant un public de “‘ lecteurs sensibles ’”‘ ’à sa mise en œuvre concrète par souscription. Dans ce cas, la lettre sort du Journal pour faire son propre chemin vers la réalisation de son contenu.

Les lettres qui nourrissent le‘ Journal de Paris ’contiennent en même temps des informations intéressantes quant au processus de lecture. A part la conscience d’être adressée à une lecture publique, la lettre au journal n’est nullement différente de la lettre d’une correspondance privée. Le lecteur parle volontiers de soi-même, de son état d’esprit à la rédaction, du moment et de l’endroit où il préfère se mettre en communication avec le Journal, de son rapport avec le quotidien, de ses habitudes de lecture de la feuille, ainsi que des effets que celle-ci a sur lui. Comment les lecteurs témoignent-ils de la lecture et de la rédaction du Journal ? C’est ce que nous nous proposons de voir dans le chapitre suivant.

Notes
455.

Alain Nabarra, “La lettre et le journal, la lettre dans le journal”, L a Lettre aux XVIIIe siècle et ses avatars, Actes du colloque international tenu au Collège universitaire Glendon, Université York, Toronto, Canada, 29 avril-1er mai 1993, (Toronto,Editions du Gref, 1996).

456.

Jean Sgard et Michel Gilot, “Le Journalisme masqué, Personnages et formes personnelles”, Le Journalisme d’ancien régime, Questions et propositions, Table ronde CNRS, 12-13 juin 1981, (Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 1982).

457.

Sur près de 1000 titres de journaux publiés jusqu’en 1789, Jean Sgard et Michel Gilot comptent, dans leur étude, 112 “spectateurs” parus entre 1711 et 1789. (“Le journalisme masqué”, p.290.) Selon Alain Nabarra, le genre des journaux épistolaire va s’essouffler vers la fin de l’Ancien Régime et, en 1789, sur 380 journaux recensés, on n’en compte plus que neuf. Il note qu’avec la Révolution, cette forme de journalisme se révèle, face à une nouvelle réalité, “inadaptée”, “dépassée”, “artificielle”. (“La lettre et le journal, la lettre dans le journal”, p.316.)

458.

“Le journalisme masqué”, p 287.

459.

Ibidem, p 286, 291.

460.

Ibidem, p. 304-309.

461.

Journal de Paris, 6 juin 1777, “Aux Auteurs du Journal de Paris”.

462.

Ibidem, 28 novembre 1781, “Variété”.

463.

Ibidem, 20 juin 1777, “Sur le Spectateur Anglais et sur celui de M de la Croix”.

464.

Ibidem, 5 novembre 1777, “Lettre aux Auteurs du Journal de Paris”.

465.

Ibidem, 4 mai 1777, “Lettre”.

466.

Mémoires secrets, 1er janvier 1779, En parlant de la naissance du Journal général de France, les Mémoires soulignent l’allusion au remplissage que le nouvel quotidien fait à l’adresse de son concurrent : “(…) il embrasse tous les objets, et chaque feuille, loin d’offrir beaucoup de remplissage, comme le Journal de Paris, présentera de quoi satisfaire l’intérêt, la curiosité et le goût des lecteurs”.

467.

Journal de Paris, 3 mai 1781, “Variété” : Je suis Français, et je ressemble aux amants heureux de mon pays, qui ne peuvent guère passer de confidents ; 13 juin 1786, “Variété” : “J’ai pensé, Messieurs, que ce petit projet patriotique pourrait obtenir une place à la suite des plans plus vastes que vous avez offert dans vos Feuille consacrées tout à la fois à l’utilité et aux plaisirs du Public, dont vous êtes devenus les Confidents”.

468.

Ibidem, 16 septembre 1779, “Aux Auteurs du Journal”.

469.

Ibidem, 5 juin 1782, “Aux Auteurs du Journal”.

470.

Ibidem, 11 novembre 1785, “Bienfaisance”.

471.

Ibidem, 23 octobre 1785, “Variétés”.

472.

Ibidem, 28 octobre 1785, “Variétés”.

473.

Ibidem, 1er décembre 1786, “Variété”.

474.

L’impartialité dont nous faisons profession nous a déterminés à imprimés la Lettre qu’on va lire, quoiqu’elle nous parût plus propre à prolonger qu’à terminer une controverse dont le fonds a désormais peu d’intérêt pour le Public”, Ibidem.

475.

Ibidem, 11 janvier 1787, “Bienfaisance”.

476.

Ibidem, C’est suite aux nombreuses lettres arrivées en réaction à la publication par le Journal de Paris d’un extrait du rapport de l’Académie des Sciences sur la construction d’un nouvel Hôtel-Dieu, que celui-ci décide de publier les sommes souscrites par les lecteurs.

477.

Ibidem, 22 juin 1777, “Seconde lettre de l’Hermite de Senart”.

478.

Ibidem, 13 septembre 1783, “Physique”.

479.

Ibidem, 6 octobre 1785, “Variétés”.

480.

Ibidem, 24 janvier 1782, “Musique”.

481.

Feydel propose aux journalistes de leur envoyer une lettre d’un certain M Benoît, “qui a voyagé, qui a beaucoup vu et peu retenu, qui sait son Paris sur le bout du doigtet qui “écrit en ce moment à son neveu pour lui donner quelques petits avis sur la conduite privée que doit tenir à Paris ou Versailles un Représentant de la Nation. Voulez-vous publier la lettre de M Benoît ?”, leur demande Feydel, et les rédacteurs lui répondent : “Nous imprimerons avec plaisir la Lettre de M Benoît, pourvu qu’elle ne sorte point des bornes que nous sommes prescrites”, Ibidem, 8 avril 1789, “Variété”.

482.

Ibidem, 16 août 1777, “Variété”.

483.

Ibidem.

484.

Ibidem,5 mai 1777, “Variété”.

485.

L’anonyme qui nous a envoyé un billet hier soir entre 6 et 7 heures, et dont nous n’avons point fait usage, est prié d’envoyer chercher la réponse ce matin, Ibidem, 14 février 1777, “Avis”.

486.

Ibidem, 8 novembre 1789, “Supplément”.

487.

Ibidem, 28 juillet 1777, “Aux Auteurs du Journal”.

488.

Ibidem, 31 décembre 1782, “Histoire”.

489.

Ibidem, 19 janvier 1786, “Variétés”.

490.

Ibidem, 25 octobre 1782, “Bienfaisance”.

491.

Ibidem, 17 octobre 1778, “Aux Auteurs du Journal”.

492.

Ibidem, 15 février 1781, “Aux Auteurs du Journal”.

493.

Ibidem, 8 février 1784, “Variété”.

494.

J’ai reçu, Messieurs, un petit Ecrit très intéressant: comme je ne sais à qui adresser la réponse, permettez-moi de me servir de votre Journal pour prier l’Auteur de se faire connaître, ou de m’indiquer une voie par laquelle je puisse lui faire passer quelques réflexions (…)”, Ibidem, 3 mars 1785, “Variété”.

495.

Ibidem, 20 mars 1785, “Variété”.

496.

Ibidem, 11 août 1785, “Belles-Lettres”: Je trouve dans mon porte-feuille une Pièce de vers dont j’ignore l’auteur, et que je ne me rappelle pas d’avoir vue dans aucun Recueil de Poésie. J’ai l’honneur de vous l’envoyer dans la persuasion que vous la jugerez, comme moi, digne d’être conservée, en l’insérant dans votre Journal.

497.

Ibidem, 5 mai 1785, “Variété”.

498.

Comme il est difficile de savoir au juste l’adresse d’un Aérostateur, je vous prie d’insérer dans vos prochains Journaux, la lettre suivante, qui pourra parvenir à M Blanchard lors de ses apparitions sur la terre”, Ibidem, 27 octobre 1785, “Variété”.

499.

Ibidem, 24 avril 1786, “Physique”.

500.

Ibidem.

501.

Ibidem, 31 décembre 1782, “Histoire”.

502.

Ibidem, 15 juin 1783, “Variété”.

503.

Ibidem, 10 octobre 1783, “Variété”.

504.

Ibidem, 16 mars 1786, “Variétés”.

505.

Ibidem, 8 juin 1786, “Variété”.

506.

Ibidem, 18 décembre 1777, “Lettre aux Auteurs du Journal”.

507.

Je viens de trouver, Messieurs, dans des papiers qui ont été laissés à ma disposition quelques lettres dont l’Auteur n’existe plus et qui m’ont paru mériter d’être conservées. Si les deux que je joins ici vous semblent aussi intéressantes qu’à moi, je les verrai avec plaisir paraître dans vos Feuilles, et je pourrai vous envoyer encore quelques-unes de la même main (…)”, Ibidem, 13 juillet 1786, “Variété”.

508.

Ibidem, 25 juin 1786, “Variété”.

509.

Ibidem, 13 mai 1787, “Variété”.

510.

Ibidem, 11 juin 1777, “Aux Auteurs du Journal”.

511.

Ibidem, 11 juillet 1787, “Variété, Seconde Lettre du Solitaire des Pyrénées aux Auteurs du Journal”.

512.

Ibidem, 5 octobre 1785, “Variété”.

513.

Lettre de M Linguet aux Auteurs du Journal, Voulez-vous bien, Messieurs, me faire plaisir d’insérer cette lettre dans votre plus prochain journal. vous avez donné place, pendant mon long silence, à des articles qui exigent cette compensation de votre part, si, comme je le crois, vous êtes impartiaux (…)”, Ibidem, 4 août 1778, “Lettre de M Linguet aux Auteurs du Journal”.

514.

Ibidem, 18 décembre 1788, “Variété”.

515.

Ibidem, 26 septembre 1777, “Aux Auteurs du Journal”.

516.

Ibidem, 6 mars 1785, “Musique”.

517.

Ibidem, 8 février 1782, “Evénement”.

518.

Ibidem, 10 novembre 1783, “Médecine”.

519.

Ibidem, 14 mai 1781, “Variété”.

520.

Ibidem, 5 février 1786, “Variétés”.

521.

Ibidem, 12 octobre 1782, “Belles-Lettres”.

522.

Ibidem, 16 avril 1783, “Livres divers”.

523.

“La lettre et le journal, la lettre dans le journal”.

524.

Journal de Paris, 29 avril 1781, “Aux Auteurs du Journal”.

525.

Ibidem, 13 juillet 1786, “Variété”.

526.

Ibidem, 27 février 1787, “Variétés”.

527.

Ibidem, 9 juillet 1782, “Variété”.

528.

Ibidem, 9 novembre 1785, “Variété”.

529.

Ibidem, 10 septembre 1789, “Variété, Lettre de M Chénier aux Auteurs du Journal”.

530.

Correspondance inédite de Jean-François de la Harpe.

531.

Ibidem.

532.

J’ai envoyé le jour même ta lettre au Journal de Paris”.(8 février 1778) ; “J’ai envoyé, mon cher ami, ta lettre aux journalistes de Paris. (22 mars 1780), Correspondances littéraires érudites, philosophiques, privées ou secrètes.

533.

Ibidem.

534.

Supplément au Journal de Paris, 20 octobre 1787.

535.

Oeuvres du marquis de Villette, A Edimbourg, 1788, Lettre XXVIII, p 155-160; Journal de Paris, 2 juillet 1784, “Anecdote”. Les mots entre crochets appartiennent à la version du Journal de Paris.

536.

Extrait du Journal de Paris, en date du 15 août 1784, n°228.