1777, n°57, 26 février, Arts, Lettre aux Auteurs de ce Journal. Du 25 Février 1777.

Messieurs,

Le beau Tableau de Greuze, adjugé le 20 de ce mois à la vente de l’Hôtel d’Aligre, a donné lieu à un faux bruit qu’il est nécessaire de détruire. Ce tableau avait été précédemment payé sept mille deux cent livres à la vente du cabinet de M le duc de Choiseul ; M Paillet l’ayant exposé à celle-ci, pour un sol de moins, annonçant bien publiquement qu’il était marchand, à cette somme ; l’adjudication s’en est faite à lui-même après deux seules enchères d’un sol chacune ; cette conduite a surpris, elle a même été blâmée par quelques personnes qui regrettent sans doute ce précieux morceau : on a répandu qu’il était retiré.

Il est une marche ordinaire pour ceux qui sont chargés de pareilles ventes, mais elle peut varier selon les circonstances, et l’on n’a pas cru lorsqu’il s’agissait d’un objet dont le mérite était si généralement reconnu et la valeur si assurée, devoir être obligé de suivre la lenteur ordinaire des enchères, faire espérer à moindre prix quand on est certain de celui que l’on aura, c’est perdre le temps et abuser les Spectateurs. L’Amateur distingué qui possède actuellement ce morceau admirable, a témoigné au moment même de l’adjudication la joie qu’il avait d’en être devenu le propriétaire. Ainsi nous pouvons dissuader ceux qui sont dans l’erreur et donner des preuves de la bonne foi que nous nous ferons toujours un devoir d’observer dans les affaires publiques et particulières qui nous sont confiées relativement à notre état.

J’ai l’honneur, etc, Signé Mercier.