IV.1.3. Le Social Report et la division des tâches entre l’économie et les autres sciences sociales

Pour Bell, ainsi que pour d’autres, le rapport social était le pendant du rapport économique du Council of Economic Advisers. En 1967, cette conception se transforma en proposition politique, lorsque le sénateur Walter Mondale proposa au Congrès un projet intitulé le Full Opportunity and Social Accounting Act. Mondale appelait à la production d’un rapport annuel ainsi qu’à la création d’un Council of Social Advisers à l’image du Council of Economic Advisers. La constitution d’un Council of Social Advisers était appuyée par de nombreux chercheurs en sciences sociales, lesquels enviaient la position privilégiée des économistes face au président. La crise sociale des années 1960 était l’occasion de réaffirmer leur expertise. Le projet de Mondale avait suscité le vif intérêt du monde scientifique comme du monde politique, à en juger par le nombre d’auditions qui avaient suivi l’introduction du projet au Congrès215. Cette idée fut explorée sous la direction de Rivlin, qui prévoyait l’après Report et se demandait quel rôle devraient jouer les chercheurs en sciences sociales dans le gouvernement. Dans son mémorandum du 10 septembre 1968, Rivlin relayait les diverses propositions d’institution d’un Council of Social Advisers ou d’extension du Council of Economic Advisers au social, incluant des non-économistes.

Olson s’opposait à la constitution d’un Council of Social Advisers différent du Council of Economic Advisers. Pour lui, comme pour Gorham, les économistes avaient leur mot à dire dans le conseil aux politiques sociales. Le terme « social » s’opposait au terme « individuel » et non au terme « économique »216. Olson considérait que le « social » devait s’analyser sous l’angle de la théorie du « choix public », mettant au centre les notions de choix collectifs, de biens publics et d’externalités, comme il l’avait fait dans son livre de 1965 consacré à l’analyse des groupes sociaux. Plus particulièrement, la pauvreté était une notion aux frontières des sciences sociales : c’était un problème social que les sociologues devaient légitimement étudier, mais elle était également un problème économique, car « si la pauvreté n’est pas un problème économique, alors rien ne l’est »217. Olson posait alors la question suivante : « les conseils sur les problèmes posés par la pauvreté devraient-ils venir d’un Council of Economic Advisers ou d’un Council of Social Advisers ? »218. Pour lui, ces frontières disciplinaires résultaient d’une évolution historique et institutionnelle de la science, dans la mesure où il pensait que fondamentalement, il « n’existe pas et ne peut pas exister de distinction non arbitraire entre les problèmes économiques et les problèmes sociaux »219.

Cette idée rejoignait l’avis de Marschak qui, pensait également impossible de distinguer clairement ce qui relève de l’économique ou du social220. Pour Olson, ce n’était pas l’avis isolé de quelques économistes intéressés par l’application de l’analyse économique hors de ses frontières traditionnelles. Il pensait que l’idée, soutenue par Bell, d’opposer l’économique et le social en créant un Council of Social Advisers, risquait de vexer bon nombre d’économistes, dont les habitudes de pensée étaient étrangères à ce type de distinction221. Dans son article de 1968, Olson nommait d’ailleurs onze économistes qui selon lui avaient effectués d’importantes contributions à la littérature en sciences politiques ou en sociologie, parmi lesquels Arrow et Buchanan222.

Rejoignant Olson sur ce point, Gorham répondit en 1969 à Mondale que l’idée de créer un Council of Social Advisers se fondait sur l’idée fausse qu’il existait une différence entre l’économique et le social, et que ces champs d’analyses différents étaient investis par des chercheurs d’horizons différents223. Finalement, la proposition de Mondale ne fut pas votée, renforçant l’argument d’Olson et la place des économistes dans la détermination des objectifs sociaux et la conduite des politiques pour y parvenir.

En participant à la rédaction du rapport social, Olson s’était forgé une idée des différences et possibles complémentarités entre l’approche économique et l’approche sociologique. Par exemple, dans le cadre de la rédaction de la partie consacrée à la participation politique, chacun avait tenté d’orienter le débat autour du problème qu’il jugeait fondamental, et qui était inspiré par son approche224. Par exemple, Verba et Gross voulaient que le sujet même occupe une place plus importante ; Reder et Mushkin voulaient mettre l’accent sur le thème des libertés individuelles ; les sociologues parsoniens voulaient se centrer autour de l’aliénation et de la structure sociale. Enfin Gorham et Olson voulaient centrer le chapitre autour des relations entre l’individu et le groupe, et notamment sur l’analyse de la bureaucratie225.

Olson consacra ainsi un article en 1968 aux différences et complémentarités entre l’approche sociologique et l’approche économique. Il y développa l’idée que le cœur de la différence entre les deux disciplines n’était pas leur objet d’étude, mais leur méthode. Les économistes de l’ancienne génération n’avaient pas encore compris le caractère très général de l’applicabilité de la science économique, qui se définissait comme « une théorie du comportement rationnel » (Olson, 1968, p. 99). Bien que se référant aux membres de la Public Choice Society, Olson faisait écho à la conception que Becker développait également à la fin des années 1960 dans son cours de théorie des prix à Columbia (voir Becker, 1971a, pp. 1-7). Olson plaçait l’approche économique et sociologique aux deux extrémités d’un continuum, avec au milieu les sciences politiques, inspirées à la fois de l’approche parsonnienne (par exemple certains acteurs de la révolution behaviorale comme Verba) et de l’approche économique (Olson, 1968 ; voir aussi Barry, 1970). Parsons était donc encore considéré comme le représentant de l’approche sociologique américaine. Il centrait sa théorie sur l’importance de la socialisation et de la transmission des valeurs. Pour Olson, la théorie parsonnienne n’était pas une « théorie au sens où ce mot est utilisé dans d’autres disciplines », mais plutôt « un style de pensé » riche et varié (1968, p. 103)226. Aucune animosité n’apparaissait pourtant dans l’idée d’opposer la sociologie parsonnienne à la science économique. Néanmoins, Olson soulignait simplement leur caractère irréconciliable.

L’opposition de méthode entre les deux disciplines produisait une opposition de leurs prescriptions. L’expérience d’Olson dans la constitution d’indicateurs sociaux l’avait conduit à explorer l’idée, déjà présente dans son article de 1963, selon laquelle la croissance économique véhiculait des forces déstabilisatrices227. Pour Olson, l’idéal économique et l’idéal sociologique s’opposaient, car le second correspondait à une société dans laquelle l’intégration de ses membres était maximale, tandis que le premier concernait l’allocation optimale des ressources. Or l’allocation optimale des ressources impliquait une constance réallocation des facteurs, une instabilité sociale nuisant à l’idéal sociologique focalisé sur l’intégration.

Downs, tout comme Gorham, avaient exprimé leurs accord profond avec la vision d’Olson. C’était également l’avis d’un collègue d’Olson au Department of Health, Education, and Welfare, David Riesman, qui s’était attaqué à l’idée défendue par certains économistes, ainsi que les sociologues de tendance parsonnienne, que la croissance devait désormais s’arrêter. Pour lui, il fallait donc pondérer les avis des sociologues, car ils étaient en moyenne moins « brillants » que les économistes228.

Il est difficile de savoir si Olson s’était mal exprimé, ou si l’article de 1968 était une attaque déguisée contre la sociologie. De nombreuses réactions mettaient en avant son biais économique. Dans le regard de beaucoup de sociologues, la caractérisation de la théorie sociologique par Olson était trop imprécise. Bien qu’importante, l’analyse des valeurs n’était pas aussi centrale229. De plus, Olson pensait que le problème principal de la sociologie, était de maximiser l’intégration, soit minimiser l’aliénation des membres d’une société. Duncan, qui avait travaillé avec Olson sur les aspects relatifs à la discrimination et à la ségrégation du Report, pensait que tous les problèmes ne se réduisaient pas à un problème de maximisation et que c’était « pour cela que nous ne pouvons pas laisser tout cela [les problèmes sociaux] aux économistes »230. En particulier, l’approche économique était incapable de donner une réponse à la question de choisir différents buts particuliers de la société. Rivlin, avait également critiquée l’idée que le Report existait uniquement en raison de la présence d’externalités. L’existence du rapport provenait précisément du constat que tout n’était pas économique231. La défense de l’approche économique véhicula chez certains correspondants l’idée qu’Olson défendait une vision du « tout économique », ce qui obligea Olson à se justifier maintes fois. Néanmoins, dans une lettre du 4 janvier 1968 à Paul Halmos, sociologue à Cardiff, Olson avouait son désaccord total avec les parsoniens232.

Un projet de recherche non titré, que les archives d’Olson à l’université du Maryland datent de la fin des années 1960, nous aide à comprendre cette opposition233. Olson affichait le désir de fonder les réformes politiques sur une démarche scientifique. Il considérait que la puissance de l’approche économique, par rapport à d’autres approches, provenait précisément de sa capacité à formuler des recommandations chiffrées. Certaines notions étaient, à ce titre, fondamentales. Pour Olson, les problèmes sociaux étaient réductibles à des problèmes d’externalités ou de biens collectifs. Par conséquent, la politique publique se résumait à un ensemble de décisions agissant sur les incitations individuelles (par exemple une politique de taxation optimale en cas de pollution). L’aspect quantifiable était assuré par la notion, elle aussi proprement économique, de coût d’opportunité. Les indicateurs sociaux étaient alors pensés par Olson comme un outil permettant la mesure d’un coût d’opportunité social, évaluant l’impact d’une décisions politiques sur le bien être de la société. Le principal reproche qu’Olson formulait à l’encontre de la sociologie structuro-fonctionnaliste provenait de son incapacité à formuler des recommandations chiffrées. Il reprochait aux « structuro-fonctionnalistes ordinaires » de ne pas disposer de notion équivalente à celle de coût d’opportunité234. Ceux-ci s’intéressaient à la fonction opérée par les structures sociales, une problématique bien peu utile au regard d’Olson lorsqu’il s’agissait de formuler des recommandations de politique publique235.

Bien qu’il était alors intéressé à l’analyse économique appliquée hors de ses frontières traditionnelles, Stigler critiqua violemment la construction d’indicateurs sociaux par Olson236. Celui-ci avait présenté son projet en 1969 dans The Public Interest en y rappelant que les indicateurs sociaux provenaient de la présence d’externalités non comptabilisées par les comptes nationaux. Tandis que certains sociologues et économistes écrivirent à Olson pour le féliciter du projet, Stigler s’en prit violemment à lui au travers d’une lettre qu’il envoya aux éditeurs du Public Interest. Pour Stigler, le travail d’Olson était fondé sur une « théorie économique erronée »237. Dans un premier temps, Olson ne pensa pas qu’il faille répondre aux critiques de Stigler, car bien que ce dernier fût un des économistes les plus importants de la profession, il avait des idées parfois « originales » et un goût prononcé pour la controverse (ibid.). Néanmoins, en se fondant sur sa propre expérience du milieu des économistes, Olson décida de répondre, car la vision de Stigler était beaucoup plus répandue qu’il ne l’avait cru en premier lieu. Sa réponse prit plusieurs formes. Son argumentaire fut développé dans un projet de recherche soumis aux Resources for the Future intitulé « The Organization of Information and Analysis Relating to the Quality of Life », daté du 4 septembre 1970, ainsi que dans une lettre à Stigler datée du 6 janvier 1971238.

La critique de Stigler à Olson était fondé sur le théorème de Coase (1960), car dans le cadre de comptes nationaux, peu importe que le pollueur paie les dépenses de ravalement d’un individu dont la façade était salie par la fumée d’usine ou que cette dépense soit supportée par la victime239. Par exemple, si la dépense était supportée par l’usine, elle serait comptabilisée comme un intrant parmi d’autres. Il insistait sur le fait que le PIB était une mesure non biaisée des externalités et des choix de société240. La réponse d’Olson (1970) soulignait que théoriquement, il était important de savoir qui était le payeur des réparations liées aux dommages infligées par la pollution. En effet, dans le cas où les externalités étaient internalisées, les niveau de production en seraient modifiés. Dans le cas où les dépenses totales de réparation effectuées par les riverains étaient supérieures aux profits du pollueur, toute internalisation des externalités mènerait l’entreprise à faire faillite. Ces réparations ne pouvaient donc pas être considérées systématiquement comme un intrant ordinaire.

Une entreprise payant une taxe destinée à cette réparation ne produirait pas autant qu’une firme ne la payant pas, du fait de l’incitation à réduire sa production, ce qui, en retour, réduirait les dépenses de réparation (ibid.). Olson soulignait également que le PIB sous-estimait les dommages psychiques : après que les riverains aient payé les réparations, ils doivent toujours supporter la fumée qu’ils continuent d’inhaler241.

Le débat ne mobilisait pas d’arguments nouveaux. Néanmoins, il opposait deux visions de l’application des outils de la science économique au social. La vision de Stigler, défendait le marché et le système des prix comme l’indicateur privilégié des phénomènes sociaux, rendant inutile la création d’indicateurs sociaux. L’expression des comportements sociaux des agents passait nécessairement par les interactions marchandes. Cette vision rappelait celle de Becker, dont les liens avec Stigler se resserraient à l’époque. La vision d’Olson était différente. Dès sa thèse, qui appliquait la notion de passager clandestin à l’analyse des groupes sociaux et politiques, il avait considéré les externalités comme un frein majeur à l’allocation optimale des ressources par le marché. La présence d’externalités permettait aux économistes d’investir les problèmes sociaux, lesquels surgissaient nécessairement des interactions entre les individus, et les externalités que ces membres faisaient subir aux autres. L’action publique devait donc concevoir un système d’incitation afin d’agir sur les comprotements individuels et la fourniture de biens publics. Par conséquent, ce débat montre bien que l’utilisation de la science économique hors de ses frontières traditionnelles ne fut pas le travail exclusif d’économistes ultra-libéraux, centrés autour de l’université de Chicago, et dont la conception principale serait de considérer que tout aspect de société a une valeur marchande.

Au travers de l’action des membres du Council of Economic Advisers ainsi que de la construction des indicateurs sociaux par Olson, la Guerre contre la pauvreté construisit une conception du « social » encadrant l’intervention publique. Ce fut l’occasion pour les économistes de revendiquer une expertise aussi importante que celle des sociologues. Se distinguant des sociologues par leur méthode, et non par leur champ d’analyse, l’apport spécifique des économistes fut suscité à propos d’un grand nombre de sujets en rapport avec les politiques sociales des années 1960.

Notes
215.

Olson, 10 Sept 1968, MOP, Boîte 90, dossier « R ».

216.

Olson à Bell, 15 août 1968, MOP, Boîte 89, dossier « E ».

217.

Mémorandum d’Olson, 10 septembre 1968, MOP, Boîte 89, dossier « E ». Cette phrase apparaît également dans l’article d’Olson, « Economics, Sociology and the Best of All Possible Worlds », The Public Interest, vol. XII, 1968, p. 97.

218.

« Should advice about the problems of poverty come from a Council of Economic Advisers or a Council of Social Advisers? » (ibid., p. 3). 

219.

« In short, there is not and cannot be any non-arbitrary distinction between economic and social problems » (ibid., p. 3).

220.

Marschak à George Katona, 16 Juillet 1965, JMA, Boîte 194, dossier « Woytinsky ». Pour plus de détails sur le contexte de cette correspondance, voir notre section sur le capital humain, infra.

221.

Olson à Bell, 8 septembre 1968, MOP, boîte 71, dossier « Bell ».

222.

Olson cite aussi Black, Boulding, Downs, Harsanyi, Albert Hirshman, Lindblom, Rottenberg, Schelling et Tullock. Notons qu'Olson ne citait pas explicitement Becker, qui faisait probablement partie des « autres, tout aussi importants, [qui] pourraient être nommés » (Olson, 1968, p. 98).

223.

Il est peut être nécessaire d’apporter une clarification : au travers de l’histoire d’Olson et du Department of Health, Edication, and Welfare, il semble que l’idée souvent sous jacente selon laquelle l’application de la science économique à des domaines hors de ses frontières traditionnelles serait le travail exclusif d’économistes néolibéraux, centrés autour de l’université de Chicago, et dont la conception principale serait de considérer que tout aspect de société doit avoir une valeur marchande, soit erronée. Il semblerait que les motivations soient beaucoup plus larges que celles-ci et que l’utilisation de l’économie au « social » ait motivé des partisans de l’intervention gouvernementale et du social engineering.

224.

Cet exemple montre bien que ce qui relève du politique dans les années 1950 releve également du « social » dans les années 1960 : ces domaines ne sont donc pas figés, mais dépendent bel et bien des préoccupations contingentes à une époque.

225.

Olson à Bell, 5 avril 1968, MOP, Boîte 71, dossier « Bell ». Rappelons que Verba était le coauteur, avec Gabriel Almond, de The Civic Culture (1963), et montrait comment la culture et l’éducation permettaient la stabilité de la démocratie américaine.

226.

« Indeed, it is not a theory in the sense in which that word is used in some other disciplines. It is rather an uncommonly rich and varied style of thought […] ».

227.

Mancur Olson (1963), « Rapid Growth as a Destabilizing Force », Journal of Economic History, vol. 23, n° 4, pp. 529-552.

228.

« Il y a un biais élitiste dans la sociologie, aussi bien radicale que conservatrice, et dans le postultat que « les masses » ne devraient pas désirer plus, même lorsque dans les faits, c’est le cas » (Riesman à Olson, 2 janvier, 1969, MOP, Boîte 89, dossier « R »).

« There is an elitist bias in radical as well as conservative sociology and in the assumption that « the masses » shouldn’t want more even when, in fact, they do »..

229.

Eckaert à Olson, 20 octobre 1967 MOP, boîte 89, dossiers « E » ; Massell à Olson, 7 décembre 1967, MOP, boîte 89, dossier « M »).

230.

« The notion you express that all problems should be put in terms of optimization and that Marshall et al. have perfected the theory we need is precisely the reason why we cannot leave the whole game to the economists » (Duncan à Olson, 25 juillet 1969, MOP, Boîte 1, dossier « D »).

231.

Rivlin à Olson, 9 mai 1969, MOP, Boîte 89, dossier « R ».

232.

Olson à Halmos, 4 janvier 1968, MOP, Boîte 89, dossier « H ».

233.

Ce projet s’inscrit dans la lignée des travaux et des projets sur la notion de « qualité de vie » sur lesquels Olson travailla immédiatement après sa participation au rapport social (MOP, Boîte 83). Le paragraphe qui suit, exposant la vision d’Olson et sa critique du structuro-fonctionnalisme, est tiré de la lecture de ce projet.

234.

« L’argument implicite est plutôt que les [problèmes sociaux] ne peuvent pas être abordés de manière intelligente sans faire l’usage implicite ou explicite du concept de coût d’opportunité, et, par conséquent, ne peuvent être correctement analysés dans les termes d’au moins la plupart des paradigmes structuro-fonctionnalistes » (ibid., p. 20).

« The principal point is rather that they [the social issues] cannot be assessed intelligently without either explicit or implicit use of the concept of opportunity cost, and therefore cannot be properly understood in terms of at least most structural-functional paradigms ».

235.

Olson pensait qu’un structuro-fonctionnaliste analysant les superstitions d’une tribu pourrait conclure que la fonction de ces superstitions est d’augmenter la solidarité de ses membres. Cependant, la question importante, pour Olson, est plutôt de savoir quel coût ces superstitions font peser à la société tribale.

« Yes, superstition may be functional in a tribe, because it increases tribal solidarity, or whatever. But what is the cost of this superstition in terms of the erroneous understandings of cause-and-effects relationships that it creates ? » (ibid., p. 20).

236.

Stigler travaillait alors avec Victor Fuchs (du NBER) sur des problématiques liées au droit. De plus, il était un des principaux soutiens de Becker, dont il lu et commenta presques tous les travaux depuis 1957. Il fut également un soutien financier important de Becker, au travers de son accès aux fonds de la Charles Walgreen Foundation.

237.

Olson à Bell et Kristol, 2 janvier 1971, MOP, Boîte 2, dossier « B ».

238.

Olson à Stigler, 6 janvier 1971, GSP, Boîte 11, dossier « Olson ». Le projet de recherche est joint à une lettre d’Olson à Joseph Fisher (alors président du Resources for the Future) du 4 septembre 1970 (MOP, Boîte 1, dossier « F »).

239.

De son aveu même, Stigler avait été fasciné par la réponse de Coase (1960) au problème des externalités, que ce dernier avait dû défendre bec et ongles devant les principaux membres du département d’économie de Chicago, notamment Friedman (Stigler, 1988).

240.

Pour Olson, le contentieux entre les deux hommes se situait autour de la phrase suivante : « la limite la plus remarquable des statistiques du produit national est qu’elles ne mesurent pas correctement les coûts et bénéfices « externes » qui ne sont pas intégralement incorporés dans les prix de marchés. Elles négligent ou expriment de manière erronée les coûts que ces actions font peser à la société, telles que l’émission de pollution, laquelle n’apparaît pas dans les dépenses de la firme ou de l’individu qui en est responsable. De manière similaire, elles négligent ou établissent de manière erronée la plupart du bénéfice social provenant des activités, telles que la recherche fondamentale, ne rapportant pas à leur pourvoyeur de fonds des profits proportionnels aux gains dont bénéficie la société » (Olson, 1969a, p. 8, cité dans une lettre d’Olson à Stigler du 6 janvier 1971, GSP, Boîte 11, dossier « Olson »).

« The most notable limitation of the national income statistics is that they do not properly measure those "external" costs and benefits that are not fully reflected in market prices. They neglect or misstate the costs to society of those actions, such as the generation of pollution that does not show up in the expenses of the offending firm or individual. They similarly neglect or misstate much of the benefit to society of those undertakings, such as basic scientific research, that do not bring the sponsor’s profits proportional to society’s gain ».

241.

Olson à Bell et Kristol, 2 janvier 1971, MOP, Boîte 2, dossier « B ».