A – La place des politiques culturelles dans le champ des sciences humaines et sociales

Au travers de nos recherches, nous avons recensé cinq catégories d’ouvrages traitant des politiques culturelles : des ouvrages théoriques sur la dimension politique de la culture (notamment des études et rapports ministériels parus dans les revues Culture et Recherche, Développement culture ; des ouvrages institutionnels écrits par d’anciens hauts fonctionnaires, des ministres ; des réflexions engagées par des acteurs de la culture (directeurs de musée, administrateurs de théâtre, comédiens, artistes) ; des ouvrages articulant esthétique et politique ; et enfin des ouvrages sur la culture dont les auteurs sont des militants et des acteurs politiques.

Ainsi, nous avons pu constater que ce sujet est abordé selon différentes visions qui peuvent être néanmoins en synergie l’une avec l’autre. Une première approche, politique, est très nettement représentée dans ces ouvrages. Elle concerne des sujets aussi vastes que l’aménagement du territoire, la décentralisation culturelle, l’Europe et l’exception culturelle française, l’action culturelle, le rapport entre la culture et le lien social, etc… La deuxième vision est plus économique : elle est présentée à travers les travaux sur l’économie de la culture, sur les industries culturelles et sur les pratiques culturelles des français. Enfin nous avons remarqué la présence très soutenue d’historiens qui se sont intéressés à l’histoire des politiques culturelles ainsi qu’à leurs évolutions.

Un premier constat relève la faible quantité d’ouvrages émanant de chercheurs en sciences de l’information et de la communication. Certes certaines études peuvent avoir un lien plus ou moins fort avec notre sujet (tels que les travaux de Jean CAUNE et de Bernard LAMIZET sur la médiation culturelle et sur le rapport entre l’esthétique et la communication) ; mais le champ des politiques culturelles demeure encore aujourd’hui peu étudié par les S.I.C. Jusqu’à l’arrivée des S.I.C. dans le champ universitaire, l’analyse de la culture relevait des secteurs disciplinaires d’origine : théâtre, littérature, danse, cinéma, histoire de l’art ou sciences politiques. Les S.I.C. constituent un champ scientifique récemment constitué qui, en particulier, n’existe pas encore –en France- aux premiers temps de la grande époque de la décentralisation culturelle dans les années 60-70. La montée récente des S.I.C. explique leur activité encore insuffisante dans le domaine de la médiation culturelle, et, par conséquent, leur relative absence dans le monde des acteurs de la culture. Or nous estimons qu’il est de plus en plus essentiel de penser notre discipline comme un champ d’intervention dans le champ de la médiation culturelle. Et notamment dans notre cas précis, il impose de réfléchir à la question de l’identité dans le champ de la culture. Les S.I.C. proposent « aux sciences sociales déjà constituées un croisement de leurs problématiques, ou un élargissement de leurs curiosités ; en circulant entre les raisons locales de la sémiologie, de la psychologie sociale, de l’histoire ou de l’informatique, elle peut servir à compliquer notre idée toujours un peu réductrice de la raison en montrant dans celle-ci non un état, mais un processus jamais achevé de communication» 62 .

Une telle étude se voit comme un ensemble de recherches transversales qui tentent de construire une histoire des sciences humaines dans une approche transdisciplinaire de la médiation culturelle.

Un second constat nous amène à soulever l’hypothèse suivante : vaut-il mieux parler des politiques culturelles ou de la politique culturelle ? En effet, les bases de données, les titres des ouvrages, les discours que nous pouvons entendre sur le sujet abordent chacun à leur tour le sujet, ô combien épineux, de la politique culturelle française ou des politiques culturelles françaises. Au travers des réflexions que nous allons exposer ci-après, nous nous apercevons que définir l’expression «politiques culturelles »63 n’est pas une tâche évidente. Le sens de l’expression « politiques culturelles » n’est pas le même pour tous les acteurs du champ culturel, chacun s’accordant à donner sa propre définition. Nous allons dès à présent montrer comment l’évolution de la relation entre culture et politique aura influé sur la définition même des politiques culturelles.

Notes
62.

BOUGNOUX (1998), p. 116

63.

Nous avons choisi d’utiliser le pluriel dans la mesure où cette expression couvre un ensemble d’actions et de moyens.