3 – 2 – La Fête du livre

Cette manifestation, créée par la municipalité précédente462, fut à l’origine d’une nouvelle « bataille ». En accord avec la majorité des libraires toulonnais, la Fête du livre permettait des rencontres entre des auteurs d’ouvrages édités dans l’année et leurs publics. Le conseil municipal était simplement chargé de valider le budget pour la communication et l’installation du chapiteau. Un prestataire de service privé, l’Agence Acte Public Communication basée à Paris, était chargé de l’organisation auprès des éditeurs, tant dans le choix des auteurs que dans la conclusion des contrats passés avec eux. Mais l’arrivée du Front national entraîna une refonte de cette organisation. Quelques mois après la victoire de la municipalité frontiste, la manifestation s’est déroulée dans une ambiance extrêmement houleuse même si la mairie n’a réussi à imposer qu’un seul stand : celui du journal Présent. Les libraires de la ville de Toulon ont tenté, par la rédaction d’une Charte définissant le rôle et le statut de cette manifestation, de résister aux pressions du Maire qui leur demandait de prévoir la présence d’auteurs et de maisons d’édition de ses amis.

Ces libraires ont été amenés à rencontrer Jean-Marie LE CHEVALLIER lors de nombreuses réunions durant lesquelles les pressions ont été de plus en plus fortes. En effet, la mairie n’a pas hésité à laisser entendre que de nombreux marchés publics (bibliothèques, écoles, administrations municipales) pouvaient facilement être confiés à d’autres librairies, notamment celles qui sont proches du F.N.463 La tension s’est peu à peu dissipée après qu’un libraire eut accepté d’avoir sur son stand la présence de quelques auteurs d’extrême droite. Mais le calme ne dura que peu de temps, la mairie apprenant le choix fait par l’Agence Acte Public Communication, d’honorer Marek Halter à l’occasion de l’édition suivante de la Fête du livre. Jean-Marie LE CHEVALLIER adressa un courrier à l’agence afin de lui faire part de son mécontentement et l’informer de la réservation de stands pour les éditions Difralivre 464 , National Hebdo, Les Editions nationales.

La municipalité s’obstinant à imposer la présence de stands de maisons d’édition d’extrême droite, la quasi-totalité des libraires et des maisons d’éditions décida de créer une nouvelle manifestation, symboliquement nommée Salon du livre antifasciste en réponse au changement de nom de la mairie, qui décida de lancer la « Fête pour la liberté du livre ».

Jean-Marie LE CHEVALLIER avait par ailleurs refusé d’honorer Marek HALTER dans le cadre de la Fête du livre en estimant que ce choix n’était «pas opportun», et qu’il souhaitait «ouvrir plus démocratiquement» cette manifestation à des auteurs et à des éditeurs d’extrême droite. Un hommage à l’écrivain a donc été rendu à Châteauvallon, le 22 novembre 1996, au T.N.D.I. devant une assemblée de 600 personnes.

Malgré de multiples protestations locales, régionales et nationales relayées par les médias465, la Fête pour la liberté du livre eu bel et bien lieu et Monsieur le Maire décida que Brigitte BARDOT en serait la marraine466. Deux éditions suivirent mais face aux faibles taux de participation et de fréquentation, la manifestation ne fut pas reconduite au bout de trois ans de gestion frontiste.

Notes
462.

François TRUCY (UDF) fut maire de Toulon de 1983 à 1995.

463.

Ce réseau d’institutions culturelles proches du F.N. sera présenté dans la cinquième et dernière partie de cette thèse.

464.

Les éditions Difralivre sont une émanation de la maison de diffusion de Présent.

465.

Deux reportages furent diffusés à cette occasion. Antenne 2 dans son journal de 20h proposa un reportage sur la « Foire du livre à Toulon », et F.R.3. dans l’édition nationale du 19/20 parla de la « Polémique autour de la fête du livre de Toulon ».

466.

Ce qu’elle accepta et qui lui permit d’officialiser ses relations avec le Front national.