Les premières définitions élaborées dans le champ des sciences sociales ont été développées à partir de l’exemple historique de la Terreur (1793/1794) et d’un début de formalisation juridique à la suite de la Convention pour la répression et la prévention du terrorisme de Genève du 16 novembre 1937, sous l’égide de la Société des Nations130.
Ces définitions ont distingué la visée politique et l’emploi de la terreur comme déterminants spécifiques de cette forme de violence ouvrant la voie à une indétermination intrinsèque. Le terrorisme est « un terme utilisé pour décrire les méthodes ou les théories encadrant les méthodes par lesquelles un groupe ou un parti organisé cherche à atteindre ses objectifs par l’usage systématique de la violence » (Hardman, J. B. S., 1948, « Terrorism », Encyclopaedia of the Social Sciences, 14 : 575-80, cité dans Crenshaw, 1972, p. 383). Si Hardman insiste sur la théorisation de l’usage systématique de la violence à des fins politiques, d’autres auteurs soulignent l’emploi de la peur pour contraindre un adversaire131. Centrées sur l’emploi de la terreur, ces définitions tendent à devenir « pléonastique » (Glaser, 1973, p. 829) au point d’utiliser les termes terreur et terrorisme de manière synonymique (Roucek, 1962, Walter, 1964, Chaliand et Blin, 2006).
Dans un contexte historique marqué par les luttes de libération nationale (Indochine et Algérie notamment), les recherches académiques sur le terrorisme vont s’inscrire dans une perspective stratégique plus appuyée. Celle-ci se définit « à travers le type de lutte clandestine qu’[elle] met en œuvre et les instruments militaires qu’[elle] utilise. Finalement est terroriste le groupe minoritaire qui conteste par une violence intense la légitimité des gouvernants » (Crettiez, 2000, p. 202). Cette approche en termes de techniques de déstabilisation politique trouve sa source dans les travaux sur les stratégies insurrectionnelles.
Voir chapitre 2 supra.
Jerzy Waciorski définit le « terrorisme » comme « une méthode d’action par laquelle un individu contribue à produire de la terreur afin d’imposer sa volonté » (Waciorski Jerzy, 1939, Le terrorisme politique, Paris, A. Pedone, p. 98, cité par Crenshaw Hutchinson, 1972, p. 383). Josef Roucek propose une lecture sociologique du « terrorisme » : « it is a person or thing or practice that causes intense fear and suffering, whose aim is to intimidate, subjugate, especially as a political weapon or policy. In politics, its main function is to intimidate and disorganize the government through fear […] » (Roucek, 1962, p. 166).