Partie 2 La gestion discursive du terrorisme par les politiques : rassembler et rassurer

En faisant du pouvoir politique la recherche d’un consentement social, nous pouvons interpréter les discours des dirigeants comme un ensemble de techniques de persuasion. Notre travail a distingué trois visées principales : la mobilisation, la réduction de l’incertitude et l’explication. Chacune de ces visées renvoie à des contenus thématiques et lexicaux différents et comprend des marques d’énonciation variables (notamment s’agissant de la présence de l’énonciateur dans le discours). Cette partie va s’attacher à décrire les caractéristiques des deux premières visées : la nécessité de mobiliser et de rassurer la population face aux incertitudes provoquées par les attentats.

L’analyse de contenu a montré une visibilité différenciée des trois registres de persuasion. Au niveau global, le registre de l’assurance (58,3% du contenu des discours) devance le registre de la mobilisation (27,3%) et celui de l’explication (14,3%). Toutefois, ces registres sont marqués par une variabilité temporelle. Par exemple, les arguments relevant de la mobilisation sont surreprésentés au cours des premiers jours suivant un attentat : ils correspondent à 62,5% des occurrences le jour même de l’attentat pour une visibilité moyenne de 43,5% lors des quatre jours suivants.

Cette surreprésentation provisoire nous a poussés en premier lieu à nous intéresser au registre de la mobilisation. Il se caractérise par la présentation d’un discours émotionnel (à l’aide de la dénotation d’un lexique affectif ou la connotation d’une figure victimaire) et d’une réprobation des terroristes qui vise à susciter une mobilisation nationale. Dans un second chapitre, nous montrerons que l’objectif de réduction des incertitudes est visé par la diffusion de la maitrise. Celle-ci s’illustre à la fois dans la présentation d’un ethos personnel maitrisé, des procédures de prévention et une maitrise de la communication. Dans un second temps, la maitrise prend la forme d’une quête de l’équilibre dans la répression qui s’actualise par la valorisation politique de la judiciarisation de la lutte antiterroriste. Cette stratégie se décline dans le refus d’une approche militaire (synonyme de dérèglement) et dans l’équilibre de l’approche judiciaire et policière entre efficacité de la répression et garantie des droits fondamentaux.