2.2 La réprobation des terroristes

Le second mouvement de la binarisation consiste dans la disqualification de l’ennemi et son assimilation à des symboles maléfiques. Celle-ci s’est inscrite, au préalable, dans une lexicalisation des réactions des locuteurs face à ce mal et parmi les sentiments éprouvés dans les discours, l’horreur prenait une place non négligeable. A la différence de la compassion, l’indignation commence par une transformation de la pitié en colère. Ce processus simule un engagement qui passe par le discours accusatoire. L’analyse de contenu nous a signalé la prégnance de cette thématique réprobatrice.

Avec une moyenne de 3,9 occurrences par discours, la réprobation est le troisième registre le plus fréquent de notre corpus. Nous avons rassemblé sous cette thématique « réprobatrice » les mots et les syntagmes désignant une qualification morale de l’acte (barbarie, lâcheté, sauvagerie, dégoût, indignation, haine, saleté) et de ses auteurs (salaud, fanatiques), des mots porteurs d’une charge affective (terrorisme, violence, agression, brutalité, massacre), la qualification médicale (fléau, folie, aveugle, poison) et, enfin, les arguments considérant l’absence de justification des actes terroristes. La thématique « réprobatrice » connait une relative régularité avec quelques variations temporelles (3,9 occurrences/discours dans la première semaine, 5,2 dans la seconde et 2,6 dans la troisième). Près de 80% des discours contiennent au moins une référence dénonciatrice. Au-delà de l’analyse de contenu, la réprobation passe par différents procédés énonciatifs. A l’appellation terroriste des actes violents s’ajoutent une évaluation d’immoralité à l’encontre des auteurs, une pathologisation de leurs pratiques violentes et l’évocation de leur puissance.