Les périodes postérieures aux attentats voient les responsables gouvernementaux réclamer le soutien de l’opposition tandis que les membres de cette dernière revendiquent la suspension de leur fonction intrinsèque.
La situation politique analysée pourrait être désignée par le terme de dépolitisation si on lui donne le sens limité de suspension des luttes partisanes. Cette signification se fonde sur la définition originelle de la politisation chez Daniel Gaxie qui voit cette dernière comme « l’attention accordée au déroulement de la compétition politique » (Gaxie, 1978 (2002), p. 46). Cependant, cette définition est affaiblie par sa dimension circulaire et la plasticité même de la notion de politique 595. En outre, les ressources en terme de processus de requalification (Lagroye, 2003, p. 360) ou d’élargissement de la conflictualité (Bacot, 1991, p. 86) nous semblent plus adaptées596. Il nous faut donc trouver une expression plus appropriée.
Nous nommerons cette temporalité « abaissement de la configuration partisane » pour signifier à la fois, l’insatisfaction du terme de dépolitisation pour désigner cette situation et pour montrer une baisse et non, une suspension, de la conflictualité partisane. Selon nous, cette dynamique se constate à un double niveau : d’une part, quand un attentat survient (et donc que le terrorisme s’impose, de l’extérieur du champ politique, comme un problème public), les acteurs politiques revendiquent une modification des relations internes qui aboutit à une baisse de la concurrence ; d’autre part, le sujet « terrorisme » n’est pas utilisé comme un thème politique ouvert à la confrontation d’idées.
Daniel Gaxie reconnaissait, toutefois, cette ambiguïté fondamentale. La plasticité du label politique dépend de l’usage qui en fait par les acteurs. « [Il] n’existe pas de problème politique en soi. Les problèmes politiques sont en réalité ceux que le personnel politique définit ou se voit imposer comme enjeux et qu’il constitue comme tels. L’attention accordée aux événements politiques ne peut dès lors se limiter au seul “jeu politique”, mais s’étend nécessairement aux thèmes débattus au sein du champ politique » (Gaxie, 1978 (2002), p. 47).
Voir chapitre supra.