2) L’intelligibilité de l’événement : l’inscription dans un monde de désordre

Les discours antiterroristes construisent le problème du terrorisme comme relevant d’organisations violentes, inspirées par le fondamentalisme religieux, et se fondant sur la déterritorialisation de leurs structures et de leurs actions. Ce récit intègre les attentats labellisés « Al-Qaïda » (11 septembre 2001, Karachi, Madrid et Londres) dans une narration politique spécifique : ces attentats constituent une aggravation de la menace terroriste sans conduire, en France, à un bouleversement du cadre cognitif de la lutte contre le terrorisme, dans la mesure où le système français s’adapte constamment à la menace.

Toutefois, le référentiel sectoriel de la lutte antiterroriste est relié à un référentiel global ; nous pouvons ainsi interpréter les discours antiterroristes comme une subdivision, dans l’espace de la violence politique, d’un méta-discours sur le désordre et les risques. Ce récit global regroupe, outre le terrorisme, un ensemble de menaces d’ordre économique (la dérégulation économique issue de la mondialisation), démographiques (l’immigration, la surpopulation) et écologiques (le réchauffement climatique et la multiplication des catastrophes naturelles afférentes) qui pèsent sur la société. La construction rhétorique de ce référentiel global se déploie à partir d’une réflexion préalable sur l’intelligibilité historique de l’événement du 11 septembre 2001.

Nous verrons dans un premier temps comment les locuteurs politiques ont évalué la portée historique des attentats du 11 septembre 2001 à l’aide de processus de désignation et des usages politiques du passé. Ces références consacrent l’hypothèse de la naissance d’une nouvelle période historique. Structurées autour de trois énoncés, les représentations politiques font du désordre la logique dominante de cette nouvelle ère historique.