c) Un retrait récent

L’absence des questions éducatives au Grenelle de l’Environnement questionne l’engagement étatique actuel et à l’avenir. On peut se demander s’il constitue un tournant dans la politique menée jusque-là.Bettina Laville, conseillère d'Etat chargée de rendre un rapport sur la transparence des consultations régionales du Grenelle a ainsi reconnu  que « les participants au débat ont regretté que certains thèmes ne soient pas plus présents dans les rapports des groupes nationaux.[...] L’éducation à l’environnement a été considérée également […] comme une exigence majeure, traitée de manière beaucoup trop lapidaire dans les travaux nationaux du Grenelle, [...] » (LAVILLE B., Octobre 2007, p. 46). De la même manière, André Giordan, professeur à l’université de Genève et président de la Commission internationale de Biologie et Education regrette que « les discussions sur ce thème n’ont pas été possibles lors de la préparation du Grenelle : ni les acteurs de terrain, ni les spécialistes du domaine n’ont d’ailleurs été invités. Leurs écrits spontanés n’ont même pas été débattus ! 49  » La question de l’éducation est d’ailleurs absente du discours de clôture prononcé par le président de la République, Nicolas Sarkozy. Seul le « droit de savoir » et « de connaître la vérité sur les menaces d’aujourd’hui » est évoqué.

Certes le Grenelle de l’Environnement à l’Ecole ou « l’Ecole agit ! » a été mis en place en décembre 2007 pour répondre aux lacunes du premier Grenelle de l’Environnement. Mais c’est une opération de communication consistant simplement à faire un état des lieux des projets existants au sein de l’Education Nationale, et à les mettre en ligne. Seuls 119 projets ont été déposés, le seul enjeu étant une distinction honorifique des projets. Aucune aide financière, partenariale, technique ou pédagogique n’était apportée aux projets primés.

Figure 17 : Page du site Internet
Figure 17 : Page du site Internet http://www.lecoleagit.fr avec l’exemple d’un projet sur l’eau retenu entre 2008 et 2009

Le Grenelle de l’Environnement à l’Ecole illustre le resserrement du champ de l’ERE autour de l’Ecole. Seule l’Education Nationale a été concernée. Les autres acteurs de l’ERE notamment associatifs mais également politiques, sportifs n’ont pas été pris en compte. Ce Grenelle n’a pas de dimension partenariale. Même le comité national ne comprend pas de représentants du monde associatif à l’exception de Sébastien Genest, président de France Nature Environnement. Les présidents du CFEEDD (Collectif Français d’EEDD) et d’Ecole et Nature par exemple n’en font pas partie. Il se compose principalement d’universitaires et de hauts fonctionnaires de l’Education Nationale. On est tout à fait dans la lignée de la circulaire 2007 de l’Education Nationale où le terrain d’expérimentation privilégié des élèves doit être l’école elle-même. Le Grenelle de l’Environnement est une des manifestations visibles du retrait étatique en ERE. Ce n’est pas la seule. La fin de l’opération « Mille défis pour ma planète » abandonnée en 2005 en est un autre indice. Aucun autre appel à projets n’a été mis en place pour le remplacer. Le budget alloué aux DIREN* en matière d’ERE ont été en baisse pendant plusieurs années successives. Celui de la DIREN* Rhône-Alpes est par exemple passé de 45.000€ au temps de l’opération Mille défis à 25.000€ en 2006, puis 10.000€ en 2007. Il semble que son budget soit à nouveau à la hausse en 2009 (30.000€).

Le retrait étatique ne constitue pas un désengagement politique dans l’ensemble du champ de l’ERE. Il participe au mouvement général de décentralisation qui a débuté dans les années 1980. Ce sont aujourd’hui les décideurs politiques régionaux et locaux qui prennent en charge l’ERE.

Notes
49.

GIORDAN A., 24 octobre 2007, « L'EDD oubliée du Grenelle de l’Environnement », L’Expresso, revue électronique journalière disponible sur http://www.grainecentre.org/actugrenelle1.htm