c) Un partenariat utilitariste et dominant

Les associations s’inscrivent dans la perspective d’un partenariat reposant sur la co-construction, c’est-à-dire un partenariat de développement mutuel, 6ème niveau du gradient de partenariat de Lucie Sauvé (2001-2002). Cela ne signifie pas qu’elles sont en permanence dans la co-construction dans le cadre des projets partenariaux qu’elles mettent en place. Ce type de partenariat est même rarement observable dans le champ de l’ERE parce qu’il est très exigeant et qu’il requiert de nombreux savoir-faire dans la manière de monter un projet. Néanmoins la co-construction est une dimension forte et prégnante de la culture associative. C’est la référence en matière de partenariat. Le GRAINE Rhône-Alpes, qui regroupe de nombreuses associations d’ERE, tente de véhiculer cette pratique et la met en œuvre de manière presque systématique dans les différents projets qu’elle mène. Il faut reconnaître que c’est une exception dans le champ de l’ERE. Il n’en demeure pas moins que la co-construction est un idéal auquel aspire la majorité des associations d’ERE. Dans le cadre des partenariats noués avec l’Ecole en tant qu’institution, et avec les écoles, la co-construction est presque impossible.

l’Ecole se place dans la perspective d’un partenariat instrumental et dominant, premier degré du gradient de partenariat de Lucie Sauvé (2001-2002).

‘« Le partenariat est un incontournable, il est à visée utilitariste dans une dominante clairement scientifique et l’institution se doit de rester le partenaire dominant et méfiant. Affirmant une certaine vision du monde, celle de l’école, elle a tendance à verrouiller en affichant haut et fort sa responsabilité et son rôle d’école de la République. » (BRUXELLES Y., 2006-2007).’

L’enseignant est le porteur de projets, ce qui signifie qu’il en est l’initiateur et le responsable. Toute action menée dans sa classe ne peut se réaliser sans lui et reste sous sa responsabilité et en sa présence. La charte d’intervention en milieu scolaire destinée à tout intervenant du milieu associatif dans le domaine de la prévention collective des conduites à risque de l’Académie de Lyon102 mentionne que « toute intervention d’association en milieu scolaire [se réalise] dans le respect de la responsabilité pédagogique des enseignants », conformément à l’article 6 du décret n°92-1200 qui définit la procédure d’agrément. Le même BIR ajoute que « toutes les activités des associations auprès des élèves doivent se dérouler en co-animation avec un membre de la communauté éducative » ce qui implique que l’éducateur a l’environnement n’a ni la responsabilité ni la maîtrise de son intervention tant dans l’animation que dans le contenu. D’ailleurs le respect des programmes scolaires est un préalable indispensable à tout partenariat exprimé dans le décret 92-1200 qui en fait un critère d’obtention de l’agrément. Le partenariat se réalise au bénéfice de l’enseignant et de ses élèves.

‘« L’intérêt est pointé sur les enseignants : « mieux connaître et utiliser les ressources et compétences offertes, enrichir leur réflexion, améliorer leurs connaissances, diversifier les exemples et les situations pour les élèves […], bénéficier de financements et de soutien logistique pour monter un projet », pour le ou les partenaires, « mieux adapter ses compétences spécifiques, ses informations […], valoriser l’apport de ses compétences, mieux connaitre les missions et les spécificités du système éducatif, participer à la création des actions de formation et d’éducation en EEDD, à la production de documents et d’outils sur le long terme. […] » (BRUXELLES Y., 2006-2007, p. 163) ’

L’association peut espérer en tirer une certaine légitimité et de nouvelles compétences, c’est aussi un bénéfice pour l’institution scolaire.

Le partenariat association/ Ecole est déséquilibré en faveur de l’institution scolaire. Les associations sont essentiellement des ressources à la disposition de l’Ecole. Ceci est moins vrai pour les associations d’éducation populaire qui font de l’accompagnement au projet, mais ce sont les seules. La grande majorité des partenaires associatifs intervient en prestataire pour réaliser une ou plusieurs animations dans la classe. On est loin de la co-construction espérée. Ce qui est d’ailleurs assez cohérent par rapport à la position institutionnelle.

La légitimité est au cœur des rapports complexes qu’entretient l’école avec ses partenaires associatifs. Deux des entretiens103 ont fait émerger que derrière la question de la légitimité se cache celle du professionnalisme des associations. L’Education Nationale se positionne comme la seule institution en charge de l’instruction. Par la même, l’enseignant est le professionnel de référence en la matière. Il a acquis un niveau de compétences élevé, sanctionné par des diplôme (BAC +3) et complété par un stage pratique d’un an validé par l’I.U.F.M* (remarque valable avant la réforme Darcos actuellement en cours). Les éducateurs à l’environnement ont souvent une qualification moindre. La grande majorité dispose d’un B.T.S104 Gestion et protection de la nature, option animation dont la dimension pédagogique est relativement limitée. Les enseignants et les éducateurs à l’environnement ne sont pas sur un pied d’égalité. D’autre part, le recours à l’origine à des intervenants bénévoles pour intervenir dans les classes (années 1970) pourrait avoir porté atteinte à l’image des associations. Sylvie Babin, chargée de mission à la DAAC* de l’Académie de Lyon, a souligné le manque de formation de certains bénévoles au départ. La situation a beaucoup évolué depuis, grâce notamment à la professionnalisation de ces associations et aux efforts de formation qu’elles ont réalisés, mais il est possible que la forme associative ait conservé une image d’amateurisme. Quoiqu’il en soit, le caractère instrumental et dominant du partenariat Ecole/ association d’ERE appuie l’hypothèse d’une reprise de la culture scolaire par les associations d’ERE. L’analyse d’animations d’ERE réalisée sur le thème de l’eau tend à valider cette hypothèse.

Notes
102.

BIR 21 2008-2009 de l’académie de Lyon, disponible sur : http://www.ac-lyon.fr/bir-n-21-du-9-fevrier-2009,127415,fr.html , consulté le 7 juin 2009

103.

Sylvie Babin et Frédéric Villaumé.

104.

Brevet Technique du Supérieur, niveau BAC + 2