a) Des animations centrées sur les savoirs

Les éducateurs à l’environnement alignent le contenu de leurs animations sur les exigences scolaires. Ils accordent une place privilégiée à l’acquisition de savoirs. L’approche cognitive est présente dans 15 des 17 animations. Faire apprendre est un objectif dans 10 des animations (sur 17). C’est d’une manière générale, une finalité assignée de l’éducation relative à l’environnement avec pour devise « Savoir et comprendre pour mieux aimer et protéger ». C’est flagrant dans les entretiens106 où cette phrase revient régulièrement, formulée dans des termes très proches, voire identiques, comme si cela participait de leur culture professionnelle, et plus généralement de la culture du milieu de l’ERE.

Les savoirs mobilisés sont scolaires. Ils sont anonymes. Les éducateurs à l’environnement les mobilisent sans citer leur auteur ou leur contexte, sans faire référence non plus aux limites de ces savoirs et aux controverses affiliées. Ce sont des savoirs coupés de leur origine : le savoir savant. Ils sont donc présentés comme établis, stables et institués. Ils sont intemporels et apolitiques, d’où la faible propension à recourir à une approche critique (4 animations sur 17) ou au débat (1 animation). Le statut de ces savoirs s’explique par leurs origines. Les éducateurs à l’environnement puisent dans les programmes scolaires pour créer leurs animations ainsi que dans les instructions officielles qu’elles soient orales107 ou écrites. Les manuels sont aussi une ressource pour les éducateurs à l’environnement mais dans une moindre mesure.

A un savoir de nature scolaire correspond une forme elle-même scolaire. Les éducateurs à l’environnement instituent avec les élèves un rapport d’autorité qui est celui du maître à l’élève. Ils se posent comme détenteurs du savoir qu’ils sont chargés de faire découvrir aux élèves par la pédagogie de terrain (11 animations) ou de le délivrer tout simplement. En dehors des temps d’activités des élèves, les animations se réalisent souvent sur le mode du cours magistral dialogué où les questions posées aux élèves appellent des réponses courtes voir monosyllabiques. J’ai relevé à plusieurs reprises et dans plusieurs animations, que les élèves n’ont qu’à finir les phrases ou les mots de l’éducateur.

Les éducateurs à l’environnement observés en animation ont ainsi adopté un contenu et une forme scolaires. Aux mêmes mots, les mêmes maux. En adoptant la même approche que l’Ecole, les éducateurs à l’environnement rencontrent les mêmes difficultés En accordant une place prédominante aux savoirs à acquérir, les éducateurs à l’environnement sont dans la même illusion que l’école, à savoir que le savoir détermine et conditionne nos comportements. Or nous savons que nous ne fonctionnons pas ainsi. Même si les éducateurs à l’environnement ne positionnent pas explicitement leurs animations dans le champ du développement durable, ils en adoptent un des principes directeurs : éduquer à l’environnement, c’est d’abord transmettre des savoirs. La nature de ces savoirs (qui sont scolaires) rend difficile une pensée complexe.

Notes
106.

Ce sont les éducateurs à l’environnement qui formulent le plus souvent leurs objectifs en ces termes.

107.

Les instructions orales sont celles laissées par le personnel de l’Education Nationale comme les conseillers pédagogiques ou les IEN quand ils sont consultés sur des animations.