d) L’animation, une porte ouverte sur le monde ?

Les animations observées semblent avoir deux fonctions pour les enseignants108. Il s’agit souvent de faire découvrir l’environnement, la nature, le milieu de vie etc. aux élèves, c’est-à-dire de leur faire voir et leur faire faire des choses en lien avec un projet environnemental. L’animation a une fonction de l’ordre du vécu. Il est donc cohérent que les animations s’appuient fréquemment sur une approche sensible ou créative. C’est une contextualisation du savoir d’où la pédagogie de terrain, et sous insertion très fréquente dans le milieu de vie des élèves. Cela est particulièrement vrai pour les animations réalisées dans le cadre d’une sortie scolaire mais cet argument a aussi été mobilisé lors d’une animation en classe. De plus, les interventions en classe précèdent souvent une sortie sur le terrain. Ce n’est pas systématiquement la règle mais dans les territoires les plus dynamiques comme le Grand Lyon, c’est le cas.

Sur un autre plan, l’animation est souvent perçue comme une illustration, un exemple d’où la présence fréquente d’études de cas.

Enfin et surtout l’animation est pour les enseignants un moyen d’aborder l’environnement autrement, avec d’autres approches, d’autres outils. Cela peut paraître paradoxal dans la mesure où je viens de démontrer que les animations ont une forme scolaire. Il me semble que ce n’est pas de cela dont il s’agit. L’éducateur apparaît comme une personne ressource, ayant les savoirs, les compétences et les savoir-faire dont l’enseignant est dépourvu. Les domaines de compétences citées sont vastes : il s’agit tant de l’écologie, que des jeux éducatifs, que de la capacité à organiser et animer une sortie sur le terrain etc. Il me semble qu’il y a une réelle reconnaissance de la compétence des éducateurs à l’environnement de la part des enseignants rencontrés en animation, reconnaissance exprimée souvent en creux dans l’aveu de ne pas se sentir soi-même compétent.

L’éducateur à l’environnement est et reste une fenêtre ouverte sur le monde parce que même s’il adopte une forme scolaire, il sort l’enseignant et sa classe de l’école au sens propre (sortie scolaire) et au sens figuré, en amenant les élèves à des pratiques, et à un vécu qui ne sont pas les leurs habituellement à l’école, et parfois même chez eux. C’est ce qui légitime les interventions des éducateurs à l’environnement. Certains diront qu’il suffit de former les enseignants et il n’y aura alors plus besoin de partenaires extérieurs. C’est oublier qu’éduquer à l’environnement et animer d’autre part, sont deux métiers spécifiques qui nécessitent une réactualisation régulière de ses connaissances, un engagement et un investissement personnel qui ne sont pas accessibles à tous les enseignants. Non que ces derniers n’en aient pas la capacité mais ils n’ont souvent pas le temps ou simplement pas l’envie et l’institution n’a pas les moyens de former tout le monde. De plus, l’éducation au développement durable, dans sa nouvelle dénomination officielle, est une des éducations à particules dont les enseignants ont la charge avec l’éducation aux risques majeurs, à la citoyenneté, à la santé, l’éducation routière, l’éducation à la démocratie… Il est nécessaire d’admettre que les enseignants, aussi compétents soient-ils, ne peuvent pas être spécialistes et compétents en tout. Les partenariats extérieurs sont une nécessité pour ouvrir et élargir les pratiques de classe. Je ne peux qu’appeler les éducateurs à l’environnement à affirmer de manière plus marquée encore leurs choix pédagogiques sans hésiter à se démarquer de la forme scolaire et des pratiques enseignantes, parce que la confusion des rôles ne tend qu’à leur ôter leur légitimité. Si une fenêtre est ouverte, il reste une porte à ouvrir…

Notes
108.

A chaque animation observée, l’enseignant de la classe a été interrogé sur les objectifs qu’ils assignaient à cette animation.