3. Les développements durables en action

Le développement durable a structuré les différentes lois qui ont régi l’aménagement et l’urbanisme de ces dix dernières années. A chaque loi correspond une vision de la notion et des critères d’application différents.

a) Un développement durable pluriel

Trois dispositifs introduisent le développement durable en urbanisme et en aménagement du territoire. Il s’agit de la LOADDT, la loi SRU et la loi sur l’intercommunalité. A chaque dispositif correspond une nouvelle vision du développement durable.

  • La LOADDT créé des structures provisoires (pays et agglomérations) qui associent le rural et l’urbain. Elle met ainsi en place un maillage qui permet les chevauchements et vise à l’équilibre entre l’espace rural et l’espace urbain.
  • La loi sur l’intercommunalité crée un autre maillage urbain avec des structures pérennes (communautés de communes et communautés d’agglomération) qui ne permet pas de chevauchement et qui vise à renforcer les pôles urbains.
  • Contrairement aux deux lois précédentes, la loi SRU mobilise un maillage déjà existant : l’échelle communale. Il y a donc de fortes contradictions entre les différentes lois qui portent le développement durable à l’échelle locale.

François Mancebo en conclut que « tenter de concilier [la LOADDT et la loi sur l’intercommunalité] relève d’une gymnastique improbable » (MANCEBO F., 2006, p. 73).

Le développement durable est également une notion centrale des Agendas 21. Ces documents correspondent à la déclinaison locale et régionale du programme Action 21 signé à Johannesburg en 2000 par les pays présents au sommet. Il se décline en actions visant à mettre en œuvre le développement durable à l’échelle mondiale. Les Agendas 21 locaux visent à mettre en œuvre, à grande échelle, une démarche de développement durable en vue d’atteindre, à petite échelle, les objectifs du programme cadre : Action 21. De nombreuses villes européennes ont adopté ce type de document à la suite de la Charte d’Aalborg signée en 1994. En 2006, le comité 21 recensait 80 Agendas 21 en France mis en place par des communes, mais également par des collectivités de plus grande taille. Des régions telles Rhône-Alpes ou le Limousin et des départements se sont engagés dans des processus d’Agenda 21.

Là encore, les mises en application du développement durable sont hétérogènes et hétéroclites. François Mancebo (2006) les classe en quatre catégories. Il y a celles centrés sur l’effet planétaire des comportements et les gestes au quotidien, celles centrées sur la qualité de vie, celles focalisées sur la diversité culturelle et enfin, celles qui relèvent d’une planification volontariste. La diversité des échelles et des formes des Agendas 21 locaux ne me semble pas poser de problèmes a priori, puisqu’il s’agit bien d’un document qui s’adapte au contexte local. En revanche, certaines collectivités semblent utiliser l’Agenda 21 pour répondre à des attentes locales, (affirmer leur identité et s’affirmer indépendamment du niveau supérieur du maillage territorial) et non pour atteindre des objectifs environnementaux globaux, ceux déclinés par le programme d’Action 21. C’est une forme d’instrumentalisation de l’Agenda 21 qui devient un outil de marketing territorial. « Il s’agit le plus souvent pour ces villes de marquer, par des politiques urbaines originales, leur indépendance à l’égard de toute tutelle ou pour se positionner dans le réseau urbain mondial » (op. cit, p. 49). C’est un autre exemple de l’instrumentalisation politique de la notion déjà mise en évidence dans la première partie. Le développement durable n’est plus ici un instrument politique à petite échelle mais à grande échelle, celle des collectivités territoriales.

La question de l’échelle d’application du développement durable est problématique. Le développement durable est censé permettre l’articulation du local et du global mais comment ? A quelle échelle doit-on prendre des mesures concrètes : communale, supra communale, régionale, nationale ? L’échelle locale est-elle le niveau d’échelle efficient pour mette en œuvre le développement durable ?