Annexe 10 Education à l’environnement (Circulaire n° 77-300 du 29 août 1977)

(Programmation et Coordination : bureau DGPC 9)

Texte adressé aux recteurs, aux inspecteurs d'académie, aux chefs d'établissement et aux directeurs d'école.

Instruction générale sur l'éducation des élèves en matière d'environnement.

A une époque où la dégradation de son milieu de vie pose à l'homme des problèmes de choix déterminants pour son avenir, une éducation en matière d'environnement s'impose de toute évidence. Cette éducation répond par ailleurs au besoin généralement rencontré chez l'enfant et l'adolescent de comprendre la nature et le monde qui les entourent. Ainsi est-il apparu indispensable que l'école apporte aux élèves dès leur plus jeune âge et tout au long de leur scolarité, une formation qui leur permette de saisir les problèmes de l'environnement de façon intelligente et constructive.

Par environnement on entendra « l'ensemble, à un moment donné, des aspects physiques, chimiques, biologiques et des facteurs sociaux et économiques susceptibles d'avoir un effet direct ou indirect, immédiat ou à terme, sur les êtres vivants et les activités humaines ».

Il s'agit d'un domaine très vaste qui s'étend à toutes les formes du milieu de vie. C'est pourquoi l'environnement ne peut en aucun cas constituer une nouvelle discipline. Il doit « imprégner » l'enseignement dans son ensemble. Toutes les disciplines apporteront donc leur contribution à cette action éducative. La diversité et la complexité des problèmes posés rendent en effet nécessaire cette opération. Celle-ci pourra d'ailleurs conduire, lorsque cela sera possible, à la réalisation en commun, par les élèves et plusieurs enseignants d'un projet d'étude pluridisciplinaire.

La prise de conscience de ces problèmes suppose enfin une confrontation directe avec les réalités du milieu de vie.

I. CETTE ÉDUCATION AURA POUR OBJECTIF DE DÉVELOPPER CHEZ L'ÉLÈVE UNE ATTITUDE D'OBSERVATION, DE COMPRÉHENSION ET DE RESPONSABILITÉ A L'ÉGARD DE L'ENVIRONNEMENT

Une attitude d'observation.

L'élève apprendra à rester dans un premier temps un « observateur extérieur » du milieu à étudier. Il regardera sans rien perturber. Il est important notamment qu'il évite de détruire, sous l'effet de stéréotypes et de réactions instinctives. Il conviendra aussi qu'il apprenne à limiter les prélèvements dans la nature, en utilisant judicieusement dessins, photos, carnets de note...

Ce temps d'observation devra lui permettre en particulier d'apprécier les caractères d'équilibre et d'harmonie qui font la qualité d'un paysage, d'un site, d'une ville.

Une attitude de compréhension.

Il conviendra de faire comprendre à l'élève l'étroite interdépendance entre l'homme et son environnement. Ainsi, les effets sur le milieu de la destruction ou de l'introduction d'espèces animales ou végétales, les résultats de la transformation d'un paysage ou d'un quartier ou les conséquences irréversibles des pollutions et des nuisances sont autant de phénomènes qui lui permettront de saisir la part de responsabilité qui incombe à l'homme dans ses relations avec son milieu.

Une attitude de responsabilité.

Il est important que l'élève acquière une attitude de responsabilité à l'égard du devenir de son environnement. Aussi apprendra-t-il par exemple à s'abstenir de toute destruction ou perturbation inutiles, à éviter le gaspillage des matières premières par négligence ou irréflexion, à utiliser rationnellement les moyens techniques.

II. CET OBJECTIF PEUT ÊTRE ATTEINT D'UNE PART EN FAISANT APPEL A L'ENSEMBLE DES DISCIPLINES ET D'AUTRE PART EN METTANT L'ÉLÈVE EN RELATION DIRECTE AVEC DIFFÉRENTS MILIEUX DE VIE

1. Pour saisir rationnellement l'environnement, les élèves auront à acquérir un certain nombre de connaissances et de méthodes de travail

Cet apprentissage sera bien entendu adapté au niveau de développement de l'enfant et de l'adolescent et tiendra compte des études poursuivies.

L'acquisition d'un certain nombre de concepts est indispensable à la connaissance de l'environnement. Il sera possible de les faire saisir aux élèves à travers des exemples concrets pris dans différentes disciplines :

Le concept d’espace(sa détermination, son aménagement, sa gestion) pourra, par exemple, être perçu à travers l'analyse d'un schéma directeur d'aménagement urbain ou d'un plan d'aménagement rural ;

Celui de temps : l'étude des cycles de croissance d'espèces végétales forestières par exemple sera l'occasion de saisir la notion de saison ou de cycle biologique ; la notion d'ères et de temps géologiques pourra être acquise par l'étude de la formation et de la mise en place de roches ou de gisements fossiles (houille, pétrole...) ;

Les notions de relations et d'interactions (équilibre dynamique, interdépendance, seuil, facteur limitant) pourront être comprises en étudiant un écosystème (prairie, forêt, lac).

Des disciplines semblent favoriser l'acquisition de certains de ces concepts (la biologie pour ceux de vie et d'écosystème et la géographie pour celui d'espace), mais en réalité d'autres disciplines peuvent y contribuer, ainsi la structuration de la notion de temps fait intervenir la géologie, la biologie, l'économie, l'éducation physique, l'histoire, les mathématiques, la musique, la philosophie, la physique...

Les méthodes de travail que les élèves devront pratiquer ne se différencient pas fondamentalement de celles préconisées d'une manière générale.

Elles devront cependant insister tout particulièrement sur trois points :

1. L'utilisation de moyens d'investigation et d'analyse, c'est-à-dire :

La collecte des informations, leur classement, leur utilisation et leur interprétation ;

L'utilisation et l'exploitation de toutes les sources de documentation ;

L'usage des procédés d'enquêtes réalisées par groupes et individuellement (entretiens, relevés, plans, notes, photos) ;

L'entraînement au « tâtonnement » expérimental et à l'expérimentation.

2. La capacité à réaliser des synthèses et à appliquer les résultats acquis dans la résolution de problèmes concrets ou l'analyse de situations nouvelles ;

3. La maîtrise des moyens d'expression indispensable à tous les stades du travail.

Chaque enseignant trouvera dans le contenu de sa discipline les occasions d'appliquer ces méthodes, mais pour étudier plus globalement certains problèmes de l'environnement il devra souvent faire appel à d'autres disciplines que la sienne.

2. L'éducation à l'environnement s'appuiera sur une découverte concrète du milieu et dans toute la mesure du possible sur un projet interdisciplinaire

Ce projet sera élaboré en fonction de l'intérêt des élèves et des questions qu'ils se posent. Sa mise en œuvre pourra comprendre différentes phases :

Un temps de maturation, de réflexion et d'interrogation aboutissant à la formulation, par les élèves, de problèmes qui détermineront le choix du milieu à analyser et les moyens nécessaires ;

Une exploration globale du milieu choisi sera l'occasion de préciser le projet d'étude qui les concerne ;

Une analyse des problèmes posés en référence aux connaissances acquises, et aux moyens spécifiques des diverses disciplines intéressées aboutira pour chaque groupe à une première représentation du milieu étudié ;

La mise en commun des travaux réalisés conduira à une première synthèse faisant ressortir les nécessités :

D'un approfondissement de l'étude ;

Du retour dans le milieu sur des thèmes mieux élaborés ;

D'une adaptation des moyens d'investigation ;

De l'acquisition de connaissances nouvelles, etc. ;

Une évaluation permettra de dégager les cohérences et les contradictions, de formuler des propositions concernant les actions nouvelles, etc.

Une telle démarche, possible au niveau de chaque discipline, gagnerait cependant à être conduite par une équipe associant des enseignants de différentes disciplines, le chef d'établissement, et, éventuellement, des personnes extérieures compétentes.

Elle suppose une exploration dans le milieu environnant de l'élève ou de l'établissement (le quartier, la commune, le canton, une entreprise industrielle ou agricole...), mais elle pourra être complétée efficacement par la découverte d'un milieu différent. Cette découverte se fera si possible grâce à la transplantation de la classe dans des structures d'accueil favorables à l'initiation à l'environnement. Ce dépaysement et la totale disponibilité provoqués par cette mutation permettront en effet à l'élève, dans la plupart des cas, d'avoir une vision plus clairvoyante et plus critique de son milieu habituel de vie.

II. POUR ACCOMPAGNER CETTE ACTION ÉDUCATIVE, DES DISPOSITIONS SERONT PRISES TANT AU NIVEAU PÉDAGOGIQUE QU'AU NIVEAU DE L'ORGANISATION ADMINISTRATIVE

Une documentation sur l'environnement sera regroupée et systématisée. Elle s'appuiera notamment sur la production déjà réalisée par le Centre national de documentation pédagogique, à laquelle s'ajoutera un apport documentaire extérieur au ministère de l'Education. Cette documentation permettra aux enseignants de compléter leurs connaissances, mais elle leur donnera également des informations d'ordre pratique et matériel.

Il conviendra d'insister sur son caractère régional. A cet égard les centres régionaux et départementaux de documentation pédagogique auront à jouer un rôle important de production, de diffusion et de relais. Ils travailleront en relation étroite avec les organismes particulièrement concernés par l'environnement : parcs naturels nationaux et régionaux, agences financières de bassin, organisations d'études d'aménagement d'aires métropolitaines (OREAM), ateliers d'urbanisme, services éducatifs des archives...

Dans les stages de formation initiale et continuée des enseignants, l'initiation à l'environnement devra être prise en compte.

Les directeurs d'école et les chefs d'établissement prendront les dispositions nécessaires afin de permettre les sorties des classes sur le terrain et de rendre possible une coopération entre les enseignants. Il est important en effet que les enseignants disposent de la liberté d'initiative qui donnera toute son efficacité à cette action éducative, dont le caractère pragmatique permettra aux élèves de confronter leurs connaissances à une expérience vécue et de faire ainsi l'apprentissage de leurs responsabilités face à leur propre milieu de vie.