A/ 1890-1914 : Genèse et développement des associations militant pour réformer la ville

Durant le quart de siècle s'étendant de l’Exposition universelle de Paris en 1889 à l’été 1914 se créent ou se développent des mouvements et des associations qui rassemblent des élites sociales et professionnelles, françaises et internationales, cherchant à améliorer la situation des classes laborieuses et à combattre les maux censés être causés par l’industrialisation.

Vers 1890, cela fait déjà longtemps que la « question sociale » est perçue comme une question urbaine, particulièrement depuis les grandes enquêtes sur la pauvreté de la première moitié du siècle (Chadwick244, Villermé puis école leplaysienne). Autour de l'objectif de réforme du logement populaire se constitue un mouvement européen. La « Société française des habitations à bon marché » (SFHBM), créée suite à l’Exposition universelle de 1889, en fait partie245. Un certain nombre de philanthropes se retrouvent également au sein de l’Alliance d’hygiène sociale, fondée en 1902 par l’ancien président de la République Casimir Périer et dirigée par Léon Bourgeois, animateur du courant « solidariste ». Les bourgeois animés par le désir de la « réforme sociale », comme Georges Risler, figure importante du Musée social et de la SFHBM, y côtoient des notabilités savantes locales246, dans le sillage desquelles de nouveaux acteurs entrent dans le débat sur l'amélioration du cadre urbain.

L’essor de certaines professions constitutives des classes moyennes (médecins, architectes et ingénieurs) et le développement des services techniques municipaux s’accompagnent en effet de la structuration en associations professionnelles ou interprofessionnelles qui réclament un rôle d’expertise auprès des détenteurs du pouvoir, tant à l’échelle nationale que locale. Avant 1914, les responsables politiques prennent également conscience de l’atout que peut constituer l’échange de savoirs et d’informations dans un contexte d’accroissement de l'intervention de la puissance publique.

Notes
244.

Patrice Bourdelais, Les épidémies terrassées. Une histoire de pays riches, Paris, Éditions de La Martinière, 2003, chapitre 4.

245.

Roger-Henri Guerrand, Propriétaires et locataires : les origines du logement social en France, 1850-1914, Paris, Quintette, 1987 et Une Europe en construction : deux siècles d’habitat social en Europe, Paris, La Découverte, 1992.

246.

Tels les hygiénistes Albert Calmette à Lille ou Jules Courmont à Lyon, que nous verrons à l'œuvre dans la suite de l'enquête.