3/ Édiles, administrateurs et réformateurs municipaux

‘« Il est désormais impossible d’ignorer les événements de la vie municipale en France et à l’étranger ; les administrateurs sont tenus d’être constamment à l’affût des moindres perfectionnements apportés aux rouages édilitaires, à l’outillage urbain. Chaque jour voit se produire le libre échange des idées et des initiatives et les municipalités qui se tiendraient volontairement en dehors de ces informations intercommunales ne tarderaient pas à porter la peine de leur ignorance. » 333

Les associations de villes ne datent pas d’hier : sans remonter jusqu'au temps des cités grecques, la Hanse et les ligues urbaines des villes de l’Empire à l’époque médiévale en sont un bon exemple334. Or, au moment où l’industrialisation et l’urbanisation provoquent des réflexions chez les hygiénistes ou du côté des philanthropes, les villes ne semblent pas vouloir rester isolées face à la croissance des responsabilités qui leur incombent. Dès les années 1860, les villes de Silésie et de Saxe, puis dans les années 1890, celles de Prusse et de Bavière, se réunissent pour réfléchir à des réponses communes face à un État de plus en plus interventionniste. En 1905, ces organisations régionales se structurent en un Deutscher Städtetag 335.

L’Allemagne, berceau des « syndicats de villes » ? 336
« Nos voisins de l’empire d’Allemagne ont le sentiment de la fédération. Les ouvriers s’unissent en Corps de Métiers, les patrons en Cartels. Il se tient des Congrès souvent annuels pour presque toutes les industries.
Les Municipalités elles-mêmes obéissent à cet instinct de la race. Elles organisent des Congrès de Villes et de Communes pour discuter les responsabilités respectives de l’État et de la Commune dans l’administration de l’enseignement, de la police, des assurances sociales et pour influencer la législation à cet effet. Le gouvernement est représenté à ces congrès. Il existe, en outre, des syndicats de villes ; par exemple, l’Union des Villes rhénanes compte une cinquantaine de Villes. »

D’autres pays connaissent des phénomènes de lobbying urbain comparables. En Grande-Bretagne, l’Association of Municipal Corporations remonte à 1872. Au Danemark, une union de villes est fondée en 1873. Le modèle germanique inspire de nombreuses organisations analogues : Union des Villes Suisses en 1897, unions néerlandaise et finlandaise en 1912. En Italie, une Associazione dei Comuni italiani est active dès 1901, en Norvège en 1903 et en Hongrie en 1909337. Les édiles français, probablement bridés par la loi municipale de 1884, suivent donc un mouvement impulsé plus tôt dans de nombreux autres pays.

Notes
333.

Revue municipale [désormais : RM], 10 novembre 1900, p. 2537.

334.

Voir Laurence Buchhozer-Rémy, Une ville en ses réseaux : Nuremberg à la fin du Moyen-Age, Paris, Belin, 2006.

335.

Jean-Luc Pinol, Histoire de l’Europe urbaine, tome II, p. 153.

336.

« L’exposition des villes d’Allemagne à Dresde », RM, 23 mai 1903, p. 313.

337.

Ibid., p. 154 et Marjatta Hietala, Services and Urbanization at the turn of the century. The Diffusion of Innovations, Helsinki, Finnish Historical Society, 1987, p. 32.