A/ Les villes face à l’État ; l’État face aux villes

‘« L'État doit être armé pour imposer aux municipalités défaillantes l'assainissement des villes et des villages. »591
« En décidant la création d'un Bureau d'hygiène dans toutes les villes de plus de 20 000 habitants, et dans les stations balnéaires de plus de 2000 habitants, le Parlement français n'a pas pris une mesure d'un caractère bien révolutionnaire. Les Bureaux d'hygiène étaient nés il y a quelque trente ans de l'initiative municipale (…) partout où ils s'étaient implantés, au hasard de la clairvoyance des maires, ils avaient rendu des services tels qu'il n'y avait pas grand mérite à les discerner et à en décider la généralisation. »592

Nous l'avons déjà souligné dans l'introduction générale : l'histoire de la France contemporaine a été parfois écrite « par le haut », à partir des archives produites par l'administration centrale. Depuis les années 1980, un certain nombre de travaux se sont attachés à explorer la manière dont les administrations municipales entrent dans la modernité en s’étoffant, à la fin du XIXe siècle593. Ce phénomène de création ou de développement d’une « fonction publique municipale » qui s’étale sur plusieurs décennies, croise d’autres mouvements avec lesquels il est partiellement lié, tels le « socialisme municipal » ou la gestion en régie de services urbains (moins prononcée en France qu’en Angleterre ou en Allemagne). Il est aussi concomitant du développement d’une administration sanitaire destinée à améliorer l’hygiène publique, effort réclamé en France depuis le lendemain de la défaite contre la Prusse594 .

Notes
591.

Dr P. Brouardel, CCHP 1899, p. 143.

592.

Dr Pottevin, « Le Bureau d'hygiène », RHPS, février 1909, p. 179.

593.

Bernard Barraqué, Les services municipaux d’Annecy, op. cit. Bruno Dumons, Gilles Pollet, Pierre-Yves Saunier, Les élites municipales sous la IIIe République : des villes du Sud-Est de la France, Paris, CNRS éditions, 1998.

594.

Sur ces projets, Lion Murard, Patrick Zylberman, L’hygiène dans la République, op. cit. Soulignons qu’une épidémie de variole fait environ 200 000 morts durant l’hiver 1870-1871.