Titre Premier. Des mesures sanitaires générales.
« Art. 1er. Dans toute commune, le maire est tenu, afin de protéger la santé publique, de déterminer, après avis du conseil municipal et sous forme d’arrêtés municipaux portant règlement sanitaire : 1° les précautions à prendre, en exécution de l’article 97 de la loi du 5 avril 1884, pour prévenir ou faire cesser les maladies transmissibles, visées à l’article 4 de la présente loi, spécialement les mesures de désinfection ou même de destruction des objets à l’usage des malades ou qui ont été souillés par eux, et généralement des objets quelconques pouvant servir de véhicule à la contagion ; 2° les prescriptions destinées à assurer la salubrité des maisons et de leurs dépendances, des voies privées, closes ou non à leurs extrémités, des logements loués en garni et des autres agglomérations quelle qu’en soit la nature, notamment les prescriptions relatives à l’alimentation en eau potable ou à l’évacuation des matières usées. »
« Art. 9. Lorsque pendant trois années consécutives le nombre de décès dans une commune a dépassé le chiffre de la mortalité moyenne de la France, le préfet est tenu de charger le conseil départemental d’hygiène de procéder, soit par lui-même, soit par la commission sanitaire de la circonscription, à une enquête sur les conditions sanitaires de la commune. Si cette enquête établit que l’état sanitaire de la commune nécessite des travaux d’assainissement, notamment qu’elle n’est pas pourvue d’eau potable de bonne qualité ou en quantité suffisante, ou bien que les eaux usées y restent stagnantes, le préfet, après une mise en demeure à la commune, non suivie d’effet, invite le conseil départemental d’hygiène à délibérer sur l’utilité de la nature des travaux jugés nécessaires. Le maire est mis en demeure de présenter ses observations devant le conseil départemental d’hygiène. En cas d’avis du conseil départemental d’hygiène contraire à l’exécution des travaux ou de réclamation de la part de la commune, le préfet transmet la délibération du conseil au Ministre de l’Intérieur, qui, s’il le juge à propos, soumet la question au Comité consultatif d’hygiène publique de France. Celui-ci procède à une enquête dont les résultats sont affichés dans la commune. Sur les avis du conseil départemental d’hygiène et du Comité consultatif d’hygiène publique, le préfet met la commune en demeure de dresser le projet et de procéder aux travaux. Si, dans le mois qui suit cette mise en demeure, le conseil municipal ne s’est pas engagé à y déférer, ou si, dans les trois mois il n’a pris aucune mesure en vue de l’exécution des travaux, un décret du Président de la République, rendu en Conseil d’État, ordonne ces travaux, dont il détermine les conditions d’exécution. La dépense ne pourra être mise à la charge de la commune que par une loi. Le conseil général statue, dans les conditions prévues par l’article 46 de la loi du 10 août 1871, sur la participation du département aux dépenses des travaux ci-dessus spécifiés. »
Art. 102349 (en gras, ce qui sera ajouté en 1935). « Le décret déclarant d’utilité publique le captage d’une source, d’une eau souterraine ou d’une eau superficielle, pour le service d’une commune ou autre agglomération déterminera, s’il y a lieu, en même temps que les terrains à acquérir en pleine propriété, un périmètre de protection contre la pollution de ladite source, de la nappe souterraine ou superficielle, ou du cours d’eau.
Il est interdit d’épandre sur les terrains compris dans ce périmètre des engrais humains, organiques ou chimiques, et d’y forer des puits sans l’autorisation du Préfet. (…)
L’acquisition de tout ou partie d’une source potable par la commune dans laquelle elle est située, peut être déclarée d’utilité publique par arrêté préfectoral, quand le débit à acquérir ne dépasse pas deux litres par seconde. Cet arrêté est pris sur la demande du Conseil municipal et l’avis du Conseil départemental d’hygiène après enquête régulière »
Art. 10 bis (30 octobre 1935). « Tout concessionnaire d’une distribution d’eau potable est tenu de fournir une eau bactériologiquement et chimiquement pure. Cette prescription comporte, toutes les fois que l’eau est susceptible d’être souillée, même accidentellement, l’emploi de méthodes de correction scientifiques, approuvées par le ministre de la Santé publique, sur avis motivé du Conseil supérieur d’hygiène, et l’obligation de prélèvements périodiques de ladite eau suspecte.
Si le captage et la distribution d’eau potable sont effectués en régie par la municipalité, les obligations prévues au présent article incombent à la municipalité avec le concours du bureau d’hygiène, s’il en existe un dans la commune et sous la surveillance du service départemental d’hygiène.
Les mêmes obligations incombent aux municipalités, en ce qui concerne les puits publics, sources, nappes souterraines ou superficielles ou cours d’eau servant à l’alimentation collective des habitants.
En cas d’inobservation par une municipalité des obligations énoncées au présent article, le préfet, après une mise en demeure restée sans résultat, prend les mesures nécessaires. Il est procédé à ces mesures aux frais des communes. »
Titre II : De l’administration sanitaire
Article 25. « Le Comité consultatif d’hygiène publique de France délibère sur toutes les questions intéressant l’hygiène publique, l’exercice de la médecine et de la pharmacie, les conditions d’exploitation ou de vente des eaux minérales, sur lesquelles il est consulté par le gouvernement.
Il est nécessairement consulté sur les travaux publics d’assainissement, ou d’amenée d’eau d’alimentation des villes de plus de 5000 habitants, et sur le classement des établissements insalubres, dangereux ou incommodes.
Il est spécialement chargé du contrôle de la surveillance des eaux captées en dehors des limites de leur département respectif, pour l’alimentation des villes.
Le Comité consultatif d’hygiène publique de France est composé de quarante-cinq membres.
Sont membres de droit :
le directeur de l’assistance et de l’hygiène publiques au Ministère de l’intérieur ; l’inspecteur général des services sanitaires ; l’inspecteur général adjoint des services sanitaires ; l’architecte inspecteur des services sanitaires ; le directeur de l’administration départementale et communale au ministère de l’intérieur ; le directeur des consulats et des affaires commerciales au ministère des affaires étrangères ; le directeur général des douanes ; le directeur des chemins de fer au ministère des travaux publics : le directeur du travail au ministère du commerce, des postes et télégraphes ; le directeur de l’enseignement primaire au ministère de l’instruction publique ; le président du comité technique de santé de l’armée ; le directeur du service de santé de l’armée ; le président du conseil supérieur de santé de la marine ; le président du conseil supérieur de santé au ministère des colonies ; le directeur des domaines au ministère des finances ; le doyen de la faculté de médecine de Paris ; le directeur de l’école de pharmacie de Paris ; le président de la chambre de commerce de Paris ; le directeur de l’administration générale de l’assistance publique à Paris ; le vice-président du conseil d’hygiène et de salubrité du département de la Seine ; l’inspecteur général du service d’assainissement de l’habitation de la préfecture de la Seine ; le vice-président du conseil de surveillance de l’assistance publique de Paris ; l’inspecteur général des écoles vétérinaires ; le directeur de la carte géologique de la France.
Six membres seront nommés par le ministre sur une liste triple de présentation dressée par l’Académie des sciences, l’Académie de Médecine, le Conseil d’État, la Cour de Cassation, le conseil supérieur du travail, le conseil supérieur de l’assistance publique de France.
Quinze membres seront désignés par le ministre parmi les médecins, hygiénistes, ingénieurs, chimistes, légistes, etc.
Un décret d’administration publique réglementera le fonctionnement du comité consultatif d’hygiène publique de France, la nomination des auditeurs et la constitution d’une section permanente. »
Titre III : Dépenses.
Article 26 : « Les dépenses rendues nécessaires par la présente loi, notamment celles causées par la destruction des objets mobiliers, sont obligatoires. En cas de contestation sur leur nécessité, il est statué par décret rendu en conseil d’État (…)
A défaut par les villes et les départements d’organiser les services de la désinfection et les bureaux d’hygiène et d’en assurer le fonctionnement dans l’année qui suivra la mise à exécution de la précédente loi, il y sera pourvu par des décrets en forme de règlements d’administration publique. »
Titre IV : Pénalités
Article 27 : « Sera puni des peines portées à l’article 471 du code pénal quiconque, en dehors des cas prévus par l’article 21 de la loi du 30 novembre 1892, aura commis une contravention aux prescriptions des règlements sanitaires prévus aux articles 1 et 2, ainsi qu’à celles des articles 5, 6, 7, 8 et 14.
Celui qui aura construit une habitation sans le permis du maire sera puni d’une amende de seize à cinq cents francs.
Article 28. Quiconque, par négligence ou incurie, dégradera des ouvrages publics ou communaux, destinés à recevoir ou conduire des eaux d’alimentation ; quiconque, par négligence ou incurie, laissera introduire des matières excrémentielles ou tout autre matière susceptible de nuire à la salubrité, dans l’eau des sources, des fontaines, des puits, citernes, conduites, aqueducs, réservoirs d’eau, servant à l’alimentation publique, sera puni des peines portées aux articles 479 et 480 du code pénal.
Est interdit sous les mêmes peines, l’abandon de cadavres d’animaux, de débris de boucherie, fumier, matières fécales, et en général, de résidus animaux putrescibles dans les failles, gouffres, bétoires ou excavations de toute nature, autres que les fosses nécessaires au fonctionnement d’installations classées.
Tout acte volontaire de même nature sera puni des peines portées à l’article 257 du code pénal.
Titre V : Dispositions diverses
Article 34 : La présente loi ne sera exécutoire qu’un an après sa promulgation ».
« Nous avons soutenu récemment que l’article 10 de la loi de 1902 devrait être modifié […] Comment les maires, après s’être adressés au seul texte qu’ils puissent connaître, celui de la loi, peuvent-ils deviner que celle-ci, supposant acquis et connu de tous un chapitre entier d’hygiène urbaine, n’a voulu s’occuper que des conditions d’un seul mode d’alimentation des villes en eau potable et a passé les autres sous silence ? Nous demandons où un maire, ayant soigneusement lu la loi et ses commentaires, peut lire qu’il existe des moyens de purifier une eau de fleuve pour la rendre potable. Cela a une importance capitale au moment où, sous l’impulsion de la loi de 1902, on s’inquiète dans des milliers de communes de fournir aux agglomérations urbaines de l’eau abondante et saine. Le silence de la loi est, en fait, un dangereux encouragement à l’eau de source ; il faut qu’il cesse. »
(Jules Courmont, « Principaux procédés de filtration des eaux destinées à l’alimentation publique », Revue pratique d’hygiène municipale, n°8, 1905, p. 343-344).
AD Tarn, 2O 65/35, dossier du projet de filtration des eaux de Castres (1923)