2) Impasses ou possibilités de mise en place d’une véritable science du trafic en France

Après la mise en place du SERC dans les années cinquante par Joseph Elkouby2419, deux acteurs se sont particulièrement mobilisés, Christian Gerondeau et Michel Frybourg, pour rédiger la plupart des notes concernant les études de transports et les études urbaines2420. Les travaux qu’ils réalisent au SERC influencent directement la production de plusieurs articles2421 ou leur participation à des congrès2422. Ils contribuent également à alimenter les cours dont les nouveaux enseignements qui sont dispensés à l’ENPC sur l’aménagement urbain. Ainsi la conclusion du Cours d’aménagement urbain proposé à l’ENPC2423 se prononce particulièrement en faveur de la prise en compte du lien entre transports et urbanisme :

‘« Mais, même dans les pays où l’urbanisme est beaucoup plus volontaire, il serait très dangereux que celui-ci ne tienne pas compte des contraintes de transport dans le choix des emplacements des éléments structurant des agglomérations.
A la conception de l’étude de transports, conséquence des partis d’urbanisation, fait donc progressivement place celle d’études intégrées des phénomènes de transports et d’urbanisation, à la fois parce que les contraintes de transport sont discriminantes et parce que la politique des transports est une des causes de l’urbanisation.
Il n’existe cependant pratiquement pas encore au monde d’étude terminée de transports et d’urbanisme. Des essais vont être prochainement réalisés en France, à Lyon en particulier.
Il faut cependant noter que certains pays, sans avoir réalisé d’études complexes de transport et d’urbanisme ont cependant adopté depuis longtemps une politique cohérente en ces deux matières. C’est en particulier le cas de la SUEDE. »’

Les opérations d’études ou de recherche mises en place au sein du SERC montrent une volonté de comprendre à la fois les flux de circulation existants et la prévision des déplacements urbains futurs pour anticiper sur les politiques de transports à mettre en œuvre. Il s’agit donc de passer d’une analyse fine et objective du contenu (flux de transports) aux modifications du contenant (réseau de transports), par la mise en avant de plusieurs scénario de développement répondant à plusieurs hypothèses d’urbanisation. Comme on l’a vu, les difficultés dans la mise en place du recueil de données s’accompagnent d’une attention de plus en plus importante à la méthodologie des enquêtes pour en faciliter l’analyse et la reproduction. Il est également nécessaire de renforcer les liens entre les niveaux locaux de réalisation des enquêtes et le niveau central de traitement et de diffusion de ces données. Au-delà, d’autres allers-retours entre le centre et le local sont nécessaires pour améliorer les études, ainsi que produire des connaissances utiles à chacun de ces niveaux. L’étape de la montée en généralité passe ensuite par des tentatives de modélisation de plus en plus poussée, bien qu’imparfaite, qu’illustre également le début de leur traitement informatique.

Par ailleurs, au cours de cette période, l'action publique en matière de transports urbains reste largement guidée par un paradigme déterministe, programmatique et prévisionnel. Elle répond à l'impératif de modernisation 2424 et d'industrialisation, mis en œuvre après la Seconde Guerre Mondiale au cours de la période de planification « à la française » 2425 . L'ingénierie, expertise technique des ingénieurs par excellence, axée sur la fonctionnalité, le calcul de rentabilité et la modélisation des trafics, perspectives souvent issues de l’importation de modèles américains, apparaît ainsi dominante.

Malgré ce contexte favorable et les tentatives d’importation des avancées du « traffic engineering », il faut reconnaître que cette période ne permet pourtant pas d’aboutir en France à la mise en place d’une véritable science du trafic. Comme on l’a vu, au niveau national2426, seuls cinq à dix personnes peuvent être identifiées comme travaillant sur ces thématiques2427. C’est pour ces raisons notamment que notre attention a souvent été orienté du côté du rôle des experts ou au niveau des configurations et des alliances qui s’organisent entre eux, à travers le corps des ponts et chaussées, les associations ou les réseaux, et parfois moins sur les savoirs, c’est-à-dire sur des connaissances qui seraient détachables d’eux. Cette personnification des savoirs et le manque de moyens pour développer une véritable science du trafic en France sont d’ailleurs pointés du doigt par les responsables du SERC eux-mêmes quand ils rédigent leurs notes de travail. De plus, ils soulignent également qu’aux Etats-Unis il n’y a pas non plus de véritable science du trafic : « La méthodologie des études de transports est loin d’être au point. Même aux Etats-Unis, elle est susceptible d’évoluer rapidement »2428.

Ainsi par rapport à la situation française, on peut émettre plusieurs hypothèses pour expliquer l’absence d’imposition d’une véritable science du trafic. Tout d’abord on peut soulever un problème de temporalité. Si l’on compare avec le contexte étatsunien, l’importation en France de ces savoirs apparaît soit trop tard, soit trop tôt. En effet, si aux Etats-Unis, le développement de ces connaissances rencontre un succès important dès les années vingt2429, la situation des villes françaises, tout comme les enjeux étatiques et professionnels, ne permettent alors pas le même essor que celui rencontré dans les villes américaines. Par ailleurs, en France, les ingénieurs des ponts et chaussées sont alors portés sur d’autres préoccupations. Au niveau national, ils s’occupent avant tout du réseau routier rural dans une perspective inter-urbaine2430. A Lyon, leur entrée sur le territoire urbain se construit avec les projets de ponts et de tunnels2431. Ensuite l’insertion de ces projets les conduit à intervenir sur des espaces urbains avec les trémies sur les quais ou bas ports2432. Mais on retrouve encore très peu d’ingénieurs des ponts et chaussées directement aux prises avec des problématiques de circulation exclusivement urbaines, hormis dans le cadre des projets d’aménagement parisiens.

De leur côté, les ingénieurs des villes, qui sont les plus touchés par les problématiques urbaines, n’ont pas les moyens matériel, corporatif ou institutionnel2433 pour favoriser l’émergence d’une telle « science »2434. De plus, ils sont également aux prises avec d’autres préoccupations : assainissement, éclairage public, urbanisme, réseaux techniques2435. Par ailleurs, pour la période qui nous concerne, sur ces différentes thématiques, il n’y a pas encore de véritable modélisation des flux2436, et donc pas vraiment de science possible puisque les connaissances développées apparaissent encore très locales, empiriques, voire « bricolées ». Les premières tentatives d’enquêtes généralisées à partir d’une exploitation locale et nationale des données arrivent à la fin de notre période avec les Enquêtes Ménages Déplacements expérimentées dès les années 1966-19682437.

Par rapport au modèle américain de gestionnaire du trafic urbain, ceux qui pourraient se rapprocher le plus de ce profil, sont certains membres de l’ACR ou du Conseil Municipal. Ce sont donc les adjoints en charge des questions de circulation, les membres et responsables de la commission de circulation. Ils développent des compétences professionnelles plus larges et moins spécialisées (aménagement, gestion, réglementation) mais en même temps très liées au contexte urbain local. En même temps, ce type de savoir est beaucoup moins prestigieux car il ne nécessite pas de compétences en génie civil ou en résistance des matériaux, ni même en économie ou en statistiques. Gérer un carrefour, quand les flux ne sont pas encore modélisables, apporte et requiert moins de notoriété que de construire un pont ou un tunnel.

Dans ce sens, ces différents constats doivent nous permettre de faire la différence entre ce qui se joue à la commission municipale de circulation et qui concerne la gestion quotidienne de la circulation où l’on retrouve un certain type d’acteurs qui interviennent, et ce qui se joue ailleurs, à d’autres niveaux, par exemple au sein du service ordinaire des ponts et chaussées ou à la Préfecture, et qui touche les projets plus ambitieux en termes d’infrastructures (routes, ponts, tunnels) ou d’enquêtes de transports urbains et où l’on retrouve d’autres acteurs. Cette différence entre configurations d’acteurs se retrouve jusque dans la mobilisation effective des maires qui sont au fur et à mesure de moins en moins présents sur les enjeux en apparence moins importants (internes, réglementaires et gestionnaires) comme Edouard Herriot ou Louis Pradel, pas ou peu présents à la commission2438, alors qu’ils se mobilisent davantage pour les grands projets d’infrastructures, à connotation plus politiques.

Néanmoins, si cette période n’est pas marquée par l’imposition d’une « science » générale et directement exploitable pour gérer le trafic en ville, de nombreux progrès ont été réalisés depuis les années cinquante dans ce domaine en expansion2439. Un signe de la diffusion rapide en Europe, des connaissances en matière de technique de la circulation routière à partir de la fin des années cinquante, est matérialisé par le rythme des semaines internationales, qui ralentit après la douzième Semaine Internationale d’Etude de la technique de la Circulation et de sa sécurité organisée à Belgrade du 2 au 7 septembre 19742440, pour passer de tous les deux ans à tous les quatre ans à partir de 1974. En témoigne la lettre de Dorothy Logan du 16 juin 1975 à tous les participants à la douzième Semaine d’Etude2441 :

‘« Voilà maintenant 22 ans que l’OTA, sur l’initiative du Touring Club Royal des Pays-Bas, ANWB, a organisé la première de cette série de manifestations à La Haye. L’année suivante, l’AIPCR s’est jointe à l’OTA pour organiser les émanes d’étude sur une base régulière à intervalles de deux ans et depuis, commençant par la Suisse, les réunions ont eu lieu successivement en Italie, au Danemark, en France, en Autriche, en Grande-Bretagne, en Espagne, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique et en Yougoslavie. L’OTA, sous son nouveau titre, Comité Paritaire AIT/FIA (OTA), est fière d’avoir rempli la tâche qui lui incombait de promouvoir l’échange international d’idées et de méthodes et d’avoir permis des contacts réguliers entre les ingénieurs et tous ceux qui s’intéressent aux problèmes de la circulation et de la sécurité routière. En ce qui concerne l’avenir, il a été décidé que les progrès réalisés dans le domaine de la technique de la circulation - science à peu près inconnue en Europe lors de la première semaine d’étude - ont été tels que le rythme de 2 ans adopté jusqu’à présent ne semble plus approprié. Il est donc envisagé de tenir la prochaine Semaine d’Etude en automne 1978. Bien entendu, je vous tiendrai au courant au fur et à mesure que je disposerai de détails plus précis à cet égard. »’

Ce travail sur les institutions et les lieux de rapatriement des savoirs en matière de circulation urbaine nous a conduit à revenir sur la carrière de plusieurs ingénieurs de l’Etat. La centralisation des connaissances dans ce domaine est facilitée par le fonctionnement du corps des ponts et chaussées qui contribue à nourrir des liens étroits entre les services centraux et déconcentrés2442. Ce contexte débouche sur la production d’études importantes et sur de nombreuses tentatives de définition, de classification et de mise en place de nomenclatures et méthodologies permettant notamment une meilleure prise en compte du lien entre urbanisme et transport. Mais cette effervescence ne nous permet pas de trancher sur l’institutionnalisation d’une véritable science du trafic stabilisée et diffusable à travers des manuels et des enseignements, au cours d’une période qui ne lui permet pas encore d’atteindre une taille critique. Toutefois, il s’agit bien d’une étatisation des questions de circulation urbaine, qui se déploie à travers l’investissement des représentants de l’Etat sur ces thématiques dans les années cinquante et leur quasi-monopole dans ce domaine au cours de la décennie suivante. Mais cette centralisation est finalement de courte durée puisque les années soixante-dix, avec la mise en place de nouvelles réflexions sur les transports urbains collectifs, et les années quatre-vingt, avec la décentralisation, replacent au centre du débat les préoccupations locales2443.

A travers ce chapitre, nous avons vu comment les savoirs et les modes d’expertise développés dans les secteurs de la circulation urbaine et du stationnement permettent de gouverner la question automobile. Ils se développent au sein d’horizons très variés : secteur privé et mondes automobiles, municipalités, associations, revues ou services de l’Etat. Au fur et à mesure de leur inscription dans les débats administratifs, politiques et techniques, locaux ou nationaux, ils contribuent en même temps à une évolution continue de la mise sur agenda de des problèmes de circulation urbaine ainsi qu’aux réponses à cette problématisation. Si bien que les processus d’élaboration des connaissances en matière de circulation et de stationnement sont au coeur des enjeux du gouvernement urbain de l’automobile2444. En effet pour gouverner la circulation urbaine, les pouvoirs urbains ont besoin de connaissances stabilisées afin de proposer à la fois une construction claire et une définition précise du problème à circonscrire, et des réponses susceptibles d’y être apportées (en terme d’expertises, de dispositifs d’action publique ou de programmes d’intervention publique). Le cas du stationnement est ici particulièrement éclairant. Les difficultés pour développer des connaissances dans ce secteur témoignent d’une incapacité à encadrer la définition du problème public et donc à en circonscrire les réponses envisageables (réglementation du stationnement, mise en place de la zone bleue, de parcmètres, mise à disposition d’emplacements, construction de parcs…). Cela se traduit également par une hétérogénéité des formes de gouvernement de ce secteur (commissions, agences, SEM, interventions privées, partenariat public-privé…). Aussi si les représentants de l’Etat parviennent à conquérir progressivement une légitimité à intervenir sur les questions de circulation urbaine, leur capacité d’intervention au niveau des problèmes de stationnement est plus difficile à revendiquer contre des collectivités locales dans lesquelles le problème se pose parfois différemment.

Nous avons vu que la circulation urbaine apparaît comme un problème qui concerne principalement les techniciens municipaux, avant ceux des services déconcentrés de l’Etat, les ingénieurs des ponts s’intéressant plutôt à l’inter-urbain et au rural. Face à cette situation, les municipalités sont donc en quête d’expertise, ce qui les poussent à organiser les journées d’études des commissions municipales de circulation, à mettre en place des réseaux d’experts ou d’élus (AIVF, AMF), ou à participer à des manifestations ou à des voyages d’études. Ainsi la mise sur agenda des questions de circulation urbaine s’inscrit très tôt dans un concert de préoccupations locales, avant notamment les tentatives2445 d’étatisation de l’expertise et des enjeux de réglementation consacrées en France par la création du Ministère de l’Equipement en 1966.

Les questions mises en avant et les savoirs constitués et consolidés à travers ces étapes sont favorisés par le développement de rencontres, l’activité de revues et le fonctionnement d’organisations professionnelles, associatives ou techniques. Ces modes de connaissances participent à une nouvelle intégration des villes dans un contexte plus large auquel elles participent, par l’exemplification de pratiques, de savoirs ou de réalisations locales. Dans cette perspective, on peut mettre en évidence un véritable va-et-vient continu entre les questions et les savoirs localisés ou construits à partir des activités d’un expert et leur montée en généralité ou mise en relation avec d’autres niveaux de compréhension. En lien avec la mise en avant de phénomènes de circulation2446, nous nous sommes également efforcés de repérer les dynamiques plus centrales qui suscitent la collecte d’expériences et d’initiatives ou de savoirs locaux, personnalisés ou situés.

En ce sens, sous couvert de jeux d’échelles, les revendications de prise en compte des enjeux urbains peuvent alors aussi se transformer parfois en luttes politiques, administratives, professionnelles ou associatives. Dans ce sens, en fonction de l’évolution de certains débats, on peut mettre en évidence l’existence d’une rupture entre d’un côté les ingénieurs/techniciens/administratifs/responsables/élus des villes et de l’autre les ingénieurs/techniciens/administratifs/responsables d’Etat. Ces tensions sont déjà perceptibles au sein des activités de l’AGHTM2447, qui pourtant se développe assez largement comme un réseau de techniciens parisiens2448. Elle le sont plus encore à travers le développement de l’AIVF, réseau plus provincial2449, qui vient compléter voire concurrencer le réseau national des ingénieurs des ponts et chaussées2450. Au-delà, on peut également, pour certaines périodes et dans le cadre de certaines activités, souligner la concurrence entre les représentants des grandes villes françaises et les représentants de la capitale. Au même titre que les services centraux des ministères concernés, les réseaux municipaux et préfectoraux parisiens constituent en ce sens un centre de pouvoir dont l’accès ou la distance sont recherchés par les édiles locaux avec méfiance ou comme point d’appui. Le développement des communautés urbaines et les évolutions propres aux années soixante-dix, sur lesquels nous n’avons pas pu enquêter mais qui voient la consécration en France des enjeux urbains et métropolitains2451, permettent sans doute de souligner encore davantage ces tensions et ces jeux de concurrence2452.

Enfin ce mode d’enquête et les résultats auxquels il aboutit justifient donc pleinement le recours à une démarche en termes de circulations mettant l’accent dans le cadre d’un espace ouvert et non hiérarchique sur les processus de diffusion et de réception des connaissances et des questions plutôt que sur les phénomènes d’importation et d’exportation des enjeux soulevés à partir d’un champ de dépendance entre niveaux d’acteurs impliqués. La dispersion des discussions et des sujets débattus ainsi que les liens qui traversent les différentes échelles étudiées, rendent compte d’une véritable inscription des problématiques locales dans des scènes d’échanges plus larges et plus complexes. De sorte que sur le plan théorique et méthodologique, la mise en avant de ces processus modifie profondément les manières d’écrire et d’enquêter sur et à partir d’une monographie locale.

Cette dernière partie nous a permis de revenir sur la manière dont la circulation urbaine est administrée et gouvernée. Nous avons présenté la mise en administration des problèmes de circulation urbaine à travers l’activité des services techniques et administratifs des autorités locales et centrales. Ce processus de formalisation renvoie à la capacité d’encadrement du phénomène automobile auquel doivent faire face les pouvoirs publics. Il se décline à travers la mise en place de structures, d’outils et de dispositifs qui fournissent des réponses aux problèmes de circulation urbaine et contribuent à orienter la mise en œuvre de politiques publiques dans le secteur des transports (entretien et construction d’infrastructures, gestion des flux et surveillance de la circulation, gestion du stationnement, politiques de sécurité routière).

Puis nous avons mis l’accent sur la construction de savoirs permettant de gouverner les questions automobiles. Cette construction obéit à plusieurs dynamiques liées mais parfois opposées. Nous avons tout d’abord mis en évidence un processus de circulation des questions et des solutions proposées aux problèmes automobiles. Il conduit à un éclatement des lieux de production des connaissances utiles à l’action publique en matière de circulation urbaine. Dans ce cadre, nous avons repéré la constitution de foyers d’expertise autour du rôle de réseaux et d’associations d’experts et à partir du positionnement de certaines villes. Nous avons ensuite cherché à analyser les processus de consolidation de ces savoirs à travers certains vecteurs (revues, rencontres, voyages, associations), et qui passent également par des tentatives de centralisation. Nous avons donc montré enfin comment ces savoirs parviennent à être rapatriés au niveau central, notamment dans le cadre d’institutions et de parcours d’experts. Toutefois, au niveau du stationnement, du fait des préoccupations et des contextes locaux, la centralisation des connaissances reste largement incomplète. De même, la production d’études importantes liant problématiques de transports et enjeux urbains n’aboutit pas à l’émergence d’une véritable science du trafic.

Notes
2419.

Voir sur ce point notre chapitre cinq.

2420.

Dans une moindre mesure, les ingénieurs des ponts et chaussées André Laure, Serge Goldberg et Jean Chauchoy participent également à cette dynamique. Voir leur présentation biographique en annexes.

2421.

Voir Elkouby J., « Circulation en ville », Urbanisme, 1955 ; Frybourg M., « Les transports dans les métropoles », Urbanisme, Vol. 89, 1965, pp. 66-73 ; Gerondeau C., « Réseau de transport et urbanisation », Le Moniteur des Travaux Publics, mai 1966 (différentes versions de cet article se trouvent dans le carton AN 1977 0444 ART 6).

2422.

Notamment les semaines internationales d’études de la technique de la circulation routière ou les journées techniques de la route.

2423.

Voir la Note de 33 p. sur « Cours d’aménagement urbain », cf. AN 1977 0444 ART 6.

2424.

Voir notamment Dubois V. et Dulong D. (dir.), La question technocratique. De l’invention d’une figure aux transformations de l’action publique, Presses Universitaires de Strasbourg, Strasbourg, 1999.

2425.

Voir sur ce point Montès C., 2003, op. cit., pp. 37-53.

2426.

Alors que « les Etats-Unis les premiers, du fait de leur mode de vie bien avancé sur le nôtre, ont vu apparaître les premiers les difficultés et ont imaginé une nouvelle science qu’ils ont appelé le Trafic Engineering à laquelle se consacrent maintenant plus de 1500 Ingénieurs. Des millions de dollars sont investis pour l’étude de chacune des agglomérations importantes. », cf. Note du SERC du 28 décembre 1965, cf. AN 1977 0444 ART 4.

2427.

A partir de la production de brochures, de notes techniques ou d’informations, ou de rapports, en s’appuyant sur le réseau des ingénieurs des ponts et chaussées, au niveau des services centraux comme au niveau des services déconcentrés du Ministère des Travaux Publics, ils arrivent toutefois à créer des foyers de développement et de diffusion des connaissances sur la circulation urbaine.

2428.

Cf. Lettre de Michel Frybourg du 6 juin 1964 à André Laure, cf. AN 1977 0444 ART 4.

2429.

Voir sur ce point les travaux déjà mentionnés de Pierre Lannoy, Gabriel Dupuy, Stève Bernardin ou Frank Schipper.

2430.

Voir Orselli J., 2009, op. cit., Partie II, pp. 58-61.

2431.

Voir Gardon S., « Pouvoirs urbains et ingénieurs de l’Etat, La construction d’infrastructures routières dans la région lyonnaise au vingtième siècle », Métropoles, n° 2, septembre 2007, pp. 63-102.

2432.

Dans ce cadre, le boulevard de ceinture leur échappe.

2433.

Créé en 1937, juste avant la Seconde Guerre Mondiale, l’institutionnalisation de l’Association est trop lente pour proposer d’autres savoirs routiers que ceux développés par le corps des ponts et chaussées.

2434.

Ce n’est qu’à partir de la fin des années soixante et des années soixante-dix que l’association parvient à produire des enquêtes et à diffuser des savoirs sur la circulation urbaine. Puis dans les années quatre-vingt, elle revendique alors son monopole sur la question : Association des Ingénieurs des Villes de France, Groupe « Circulation, Signalisation, Transport », Livre blanc pour une ingénierie de la circulation urbaine, avril 1988, 35 p.

2435.

Voir sur ce point la thèse en cours de Stéphane Frioux (Université Lyon 2, sous la direction de Jean-Luc Pinol).

2436.

Il n’y a pas non plus encore, comme on le verra après, de véritable modélisation des questions de stationnement.

2437.

Sur ce point, voir Benoît Facq, 2006, op. cit.

2438.

Sauf à certains moments sur des questions sensibles ou lors de débats locaux trop virulents comme pour la mise en place de parcmètres, la surveillance de la circulation ou le contrôle du stationnement.

2439.

Voir notamment Merlin P., La planification des transports urbains, enjeux et méthodes, Masson, Paris, 1984 ; et Les transports urbains, PUF, Paris, 1992.

2440.

Cf. A ONU GIX 12-6-6-52.

2441.

Cf. A ONU GIX 12-1-35.

2442.

Cf. Thoenig J.-C., 1987 , op. cit.

2443.

Voir notamment Menerault P., « Réforme territoriale et dynamique de l’intercommunalité dans les transports collectifs urbains : une approche diachronique », in Gallez C., Menerault P., Frére S., Guerrinha C. et Richer C., Recomposition intercommunale et enjeux des transports publics en milieu urbain, Séminaire de rencontre entre chercheurs et acteurs, PREDIT-INRETS-ENPC, Marne-la-Vallée, 2005, pp. 3-14 ; Offner J.-M., « L’expertise locale en transports urbains entre logiques professionnelles et organisationnelles », Politiques et management public, vol. 6, n° 1, 1988, pp. 81-102 ; Lassave P., L’expérience des Plans de Déplacements urbains (1983-1986), CETUR, Bagneux, 1987.

2444.

En ce sens nous rejoignons les analyses classiques de Michel Foucault sur le lien entre pouvoir et savoir, voir Foucault M., « La gouvernementalité », in Dits et Écrits 1954-1988, Gallimard, Paris, Tome 3, 1994, pp. 635-657 ; et « Le pouvoir, comment s’exerce t-il ? », reproduit in Colas D., La pensée Politique, Larousse, Paris, 1992, pp. 754-762.

2445.

Dès les années cinquante, le Ministère des Travaux Publics se lance dans une stratégie d’analyse de l’urbain en mettant en œuvre un vaste programme d’étude et d’enquêtes sur l’urbain, qui préfigure la mise en place du Ministère de l’Equipement.

2446.

Cf. Saunier P.-Y., 2004, art. cit.

2447.

Voir sur ce point les travaux de Viviane Claude, « Cultures techniques locales et circuits internationaux, Les techniciens municipaux français au début du XXe siècle » in Dumons B. et Pollet G., Administrer la ville en Europe, XIXe-XXe siècles, L’Harmattan, 2003, Paris, pp. 143-162.

2448.

Notamment après la Seconde Guerre Mondiale, alors qu’avant le poids de certains ingénieurs provinciaux, comme Camille Chalumeau, était central dans l’Association. Il faut aussi noter la forte orientation des activités de l’Association du côté des entreprises privées.

2449.

Confirmé par le fait que certains ingénieurs, pourtant au centre de l’AGTHM (positionnée de plus en plus autour des entreprises privées et de l’Ecole des ingénieurs de la Ville de Paris) comme Chalumeau (il en est le président entre 1927 et 1928), se détournent progressivement de cette association pour fonder leur propre réseau/association avec l’AIVF en 1937 ou pour participer à d’autres réseaux (GECUS). Toutefois il faut noter qu’après un « moment provincial », incarné notamment à la fin des années trente par Lyon (Chalumeau, Martin, Pernot), Nice (Kirchner), Saint-Étienne (Le Tellier), Villeurbanne (Fleury) ou Dijon (Reinson), les activités de l’AIVF se recentrent à nouveau autour de la capitale et de la Ville de Vincennes, où de nombreux congrès se tiennent (14 entre 1949 et 1972) pour permettre une audience plus large des représentants de l’Etat aux revendications des AIVF.

2450.

Voir sur ce point notre contribution : « Les parkings, une affaire locale ? », dans Bardet F. (dir.), Le nouvel âge de la rationalisation du gouvernement. De l’expertise d’Etat à l’expérience des marchés dans la conception des politiques urbaines, Presses Universitaires de Lyon, Lyon (à paraître en 2009).

2451.

Voir Castells M., La question urbaine, Maspero, Paris, 1972 ou Lojkine J., Le marxisme, l’Etat et la question urbaine, PUF, Paris, 1977.

2452.

Sur ces points on peut souligner la tenue le 5 décembre 1972 d’une réunion de l’Association des Maires de France, à laquelle assistent plusieurs élus, ingénieurs des villes et ingénieurs des ponts et chaussées, qui permet de repérer l’inquiétude des ingénieurs de l’Etat, devant la montée en puissance d’un corps d’ingénieurs communaux renforcé par la loi qui vient d’être votée, par le choix fait par les établissements de coopération intercommunale de se doter de services techniques propres et par la volonté de prise en main de la planification urbaine par les techniciens communaux. Dans le même sens plus tard, en 1974, dès sa première réunion, le groupe de travail « Voirie urbaine » de l’AIVF tente de reprendre à son compte le traitement des problèmes spécifiques de la voirie urbaine en décalage avec tout ce qui avait être déjà développé par ailleurs sur les questions intéressant la route. Son objectif était de faire entendre la voix des techniciens de la voirie urbaine dans un concert dominé jusqu’alors par les ingénieurs des Ponts et Chaussées et les grandes entreprises routières nationales.