5.3.1. Choix des mesures d’accessibilité et construction d’un indicateur agrégé (synthétique) d’accessibilité

Lorsqu’on traite de l’interface transport-urbanisme, de l’impact du système de déplacements sur l’urbanisation, on trouve dans le cœur de cette relation le concept d’accessibilité.

On a pu constater (voir premier chapitre) la complexité de la notion d’accessibilité, à laquelle correspond une multitude de mesures et d’indicateurs d’accessibilité. Ainsi, on a calculé (voir troisième chapitre) des mesures d’accessibilité qui diffèrent selon :

  • l’approche adoptée : indicateurs simples - comme la distance ou le temps par rapport à une destination, indicateurs isochroniques – le nombre d’opportunités dans un rayon de distance ou de temps donné, indicateurs gravitaires – fonction directe du volume d’opportunités et inverse d’une mesure de séparation spatiale ;
  • les seuils de distance ou de temps considérés (pour les indicateurs isochroniques) ;
  • la formulation de la fonction de séparation spatiale (pour les indicateurs gravitaires – 1/d ou 1/d2) ;
  • les différents types d’opportunités à atteindre – le centre, les infrastructures de transport, les activités économiques (emplois), les services commerciaux, les établissements d’enseignement.

Etant donné le nombre très élevé de variables d’accessibilité et le fait que entre celles-ci existent de fortes corrélations (par exemple, entre les variables isochroniques ayant des seuils différents pour la même opportunité, ou entre les variables gravitaires de fonction de séparation spatiale 1/d et 1/d2 pour la même opportunité), l’objectif est d’en réduire le nombre et de trouver les variables (c’est à dire, les types de mesures, les seuils et les formulations) qui fournissent le maximum d’information sur l’accessibilité aux différentes opportunités des ménages qui se localisent dans chaque IRIS de l’aire urbaine.

Cette réflexion ayant comme objectif le tri des variables à utiliser dans la modélisation va se baser sur une analyse en composantes principales sur toutes les variables d’accessibilité calculées. L’application de cette méthode d’analyse aux données à l’IRIS de l’aire urbaine de Lyon nous a permis d’extraire une composante factorielle qui explique l’essentiel (environ 60%) de l’information (variance) totale des 82 variables initiales considérées (aucune des autres composantes n’explique individuellement plus de 10% de l’information). On a utilisé les coefficients de corrélation entre chacune des variables initiales et cette première composante principale (tableau n° 51 de l’Annexe 3) pour faire le choix des variables à retenir. Ainsi, on a retenu, pour chaque type d’opportunité considérée, la variable d’accessibilité correspondante étant la plus corrélée avec la composante factorielle :

  • temps d’accès au centre VP (coefficient de corrélation - -0,888)
  • nombre d’arrêts de bus à moins de 1000 m (0,849)
  • nombre de stations de métro à moins de 1000 m (0,699)
  • nombre d’échangeurs autoroutiers accessibles en moins de 15 min (0,937)
  • nombre de gares accessibles en moins de 30 min (0,875)
  • indicateur gravitaire d’accessibilité (fonction 1/d) aux grands commerces (0,979)
  • indicateur gravitaire d’accessibilité (fonction 1/d) aux établissements d’enseignement secondaire (0,979)
  • indicateur gravitaire d’accessibilité (fonction 1/d) aux emplois (0,978)
  • indicateur gravitaire d’accessibilité (fonction 1/d) aux emplois du secteur tertiaire (0,980)

Ce sont donc ces neuf variables mesurant l’accessibilité aux différentes opportunités de la ville, qui sont d’ailleurs très corrélées avec la composante factorielle (on observe quant même des corrélations relativement moins élevées pour des variables comme le nombre de stations de métro à moins de 1000 m, nombre d’arrêts de bus à moins de 1000 m ou nombre de gares accessibles en moins de 30 min), les variables les plus susceptibles d’influencer les choix de localisation résidentielle des ménages, que l’on va utiliser dans la modélisation de ces choix. L’hypothèse sous-jacente que l’on fait est que les ménages vont choisir de se localiser dans une zone en tenant compte de l’accessibilité aux différentes opportunités.

Etant donné le fait que les neuf variables d’accessibilité retenues sont fortement corrélées avec la composante factorielle, et donc aussi entre elles, on pourrait synthétiser l’information que ce groupe de variables apportent, en essayant de construire un indicateur agrégé d’accessibilité. A cette fin, on va utiliser de nouveau l’analyse en composantes principales, qui est une méthode adéquate pour atteindre cet objectif, mais cette fois appliquée aux neuf variables retenues antérieurement. Cela va nous permettre de construire un indicateur global, qui a l’avantage d’exprimer par un seul indicateur l’accès à l’ensemble des opportunités qui sont visées dans les variables considérées, indicateur qu’on pourra utiliser dans la modélisation comme alternative au paquet des variables d’accessibilité à partir desquelles il a été obtenu.

L’application de l’ACP a confirmé nos attentes, dans le sens où on a obtenu une première composante qui synthétise presque toute l’information qu’on obtiendrait si on utilisait les neuf variables initiales (85% de la variance globale est expliquée par cette composante). Cette composante, qui est en fait une combinaison linéaire des variables initiales, sera considérée comme notre indicateur synthétique d’accessibilité.

Le tableau n° 64 montre que toutes les variables initiales sont fortement corrélées avec cette composante – indicateur synthétique (à l’exception des variables nombre de stations de métro à moins de 1000 m, nombre d’arrêts de bus à moins de 1000 m et nombre de gares accessibles en moins de 30 min, toutes les autres variables ont des coefficients de corrélation supérieurs à 0,9), donc elles sont très bien représentées par l’indicateur synthétique.

Tableau n°64 : Coefficients de corrélation entre les variables d’accessibilité et l’indicateur agrégé
Tableau n°64 : Coefficients de corrélation entre les variables d’accessibilité et l’indicateur agrégé

Source : Traitement SPSS

Avec les coefficients présentés dans le tableau n° 65, on peut écrire la formule de calcul de notre indicateur synthétique :

En utilisant cette équation, on va calculer les valeurs de l’indicateur synthétique pour chacune des unités statistiques (IRIS). Une valeur élevée de cet indicateur pour un IRIS signifie un temps réduit d’accès au centre et un accès facile à chacune des opportunités désirées, donc une bonne accessibilité globale pour les ménages qui se localisent dans cet IRIS.

Tableau n°65 : Coefficients de l’équation linéaire de l’indicateur agrégé d’accessibilité
Tableau n°65 : Coefficients de l’équation linéaire de l’indicateur agrégé d’accessibilité

Source : Traitement SPSS

On a choisi de construire un seul indicateur agrégé qui synthétise l’information sur l’accessibilité au niveau du périmètre de l’aire urbaine de Lyon, mais il faut spécifier que la décomposition de cet indicateur en deux ou trois composantes serait possible, même préférable dans le cas où on estimerait le modèle pour des zones plus restreintes que l’aire urbaine.

Il faut mentionner que nous n’avons pas utilisé des indicateurs d’accessibilité de type Koenig, qu’on retrouve souvent dans la littérature, en raison du fait que ces indicateurs n’étaient pas calculés par le modèle transport de SIMBAD au moment où nous avons effectué les estimations du modèle de localisation des ménages.