8.4.4.2.L’analyse des réponses du groupe « Russes »

Majoritairement, les Russes ont répondu positivement à la question « croyez vous qu'il est indispensable d'apprendre le kazakh ? » (76,9%) ; 11,8% des Russes croient qu’il n’y a pas de nécessité d’apprendre la langue kazakhe et 10,2% ont choisi la réponse « Ne sait pas ». Nous voyons que les Russes sont moins favorables sur cette question. Maintenant, nous allons procéder à l’analyse du contenu de toutes leurs explications.

Tableau 45°. Attitude à l’égard de l’apprentissage du kazakh. Groupe « Russes ».
Tableau 45°. Attitude à l’égard de l’apprentissage du kazakh. Groupe « Russes ».

La différence avec la répartition de référence est très significative. chi2 = 272,02, ddl = 3, 1-p = >99,99%.

Le chi2 est calculé avec des effectifs théoriques égaux pour chaque modalité.

Ce tableau est construit sur la strate de population russe contenant 186 observations et définie par le filtrage suivant : origine ethnique = « russe ».

Graphique n° 19 : Attitude à l’égard de l’apprentissage du kazakh. Groupe « Russes ».
Graphique n° 19 : Attitude à l’égard de l’apprentissage du kazakh. Groupe « Russes ».

La plupart des réponses positives à cette question se réfèrent au statut du kazakh en tant que la langue d’Etat et au devoir de chaque citoyen du pays de le connaître :

‘« Parce que nous sommes obligés de connaître la langue kazakhe, nous vivons au Kazakhstan quand même ». F., 18 ans.
« Nous habitons au Kazakhstan et indépendamment de l'appartenance ethnique nous devons connaître au moins la base du kazakh ». F., 17 ans.
« EnAllemagne tout est en allemand. Et même s'il y a des Russes, pourquoi pas, la langue kazakhe doit être la langue principale ». H., 21 ans.’

Cependant, en acceptant l’obligation de connaître le kazakh, les enquêtés russes critiquent le niveau faible de son enseignement dans les établissements scolaires : il manque des professeurs qualifiés et des manuels. Ce qui explique leur faible connaissance du kazakh. Malgré les difficultés indiquées, nous constatons la volonté d’apprendre la langue :

‘« Il faut apprendre la langue d'Etat mais pas selon le système d’enseignement actuel ». H., 20 ans.
« Puisque nous vivons au Kazakhstan, il est indispensable de connaître la langue nationale mais nous avons un mauvais système d'enseignement de la langue kazakhe ». H., 21 ans.
« Nous habitons au Kazakhstan. Mais malheureusement, le niveau d'enseignement du kazakh est très, très bas ». H., 20 ans.
« Les Kazakhs connaissent la langue russe et nous devons connaître la langue kazakhe. Le seul problème est le manque de la littérature d'études et des professeurs qualifiés ». F., 20 ans.’

Certains enquêtés d’origine russe expriment le désir d’apprendre la langue kazakhe par le respect pour le peuple kazakh et pour mieux connaître ses traditions et sa culture. Le sentiment d’appartenance au pays et l’intérêt porté à la culture du Kazakhstan stimulent les jeunes russes dans l’étude de sa langue officielle pour pouvoir communiquer avec les Kazakhs. Donc, la connaissance du kazakh affirme la reconnaissance du pays ; elle favorise la communication interethnique et l’échange culturel au Kazakhstan :

‘« J'habite au Kazakhstan c'est pourquoi je dois connaître les traditions et la langue du peuple kazakh ». H., 17 ans.
« Si les Kazakhs connaissent notre langue russe alors pourquoi nous ne connaissons le kazakh surtout au Kazakhstan ? » H., 22 ans.
« Je suis Russe mais je veux connaître le kazakh et d'autres langues ». H., 21 ans.
« Parce que je vis dans ce pays, je dois en connaître la culture, la vie quotidienne, la langue. Je voudrais connaître le kazakh ». F., 21 ans.’

Ainsi, du fait que le rôle du kazakh s’accroît dans le pays, les jeunes comprennent son importancepour la communication. Les jeunes russes souhaitent avoir des relations avec les Kazakhs pour mieux s’intégrer au pays :

‘« Je pense qu'il faut apprendre le kazakh comme d'autres langues pour la communication interculturelle, pour la transmission de l'information ». F., 21 ans.
« Pour communiquer avec le peuple kazakh et entretenir les relations ». H., 15 ans.
« J'habite au Kazakhstan où les Kazakhs sont majoritaires c'est pourquoi il est nécessaire d'apprendre le kazakh pour communiquer, être ami, c'est la langue de mon pays ». F., 20 ans.’

Actuellement, la connaissance du kazakh devient indispensable dans la société et surtout est appréciée au travail. L’embauche de spécialistes bilingues est prioritaire dans chaque entreprise et principalement dans le service public. C’est pourquoi les perspectives professionnelles et l’ambition de faire la carrière à l’avenir au Kazakhstan incitent les jeunes à l’apprendre :

‘« Actuellement, partout si tu veux te caser dans un poste bien payé, la connaissance du kazakh est très importante. Actuellement, on utilise de plus en plus le kazakh  dans toutes les sphères». F., 20 ans.
« Car beaucoup d'entreprise demandent la connaissance de la langue kazakhe ». H., 21 ans.
« La langue kazakhe est nécessaire pour le travail dans le service public ». H., 21 ans.
« Très bientôt tous les documents, la radio, les médias seront en langue nationale, sans connaître le kazakh il sera difficile de trouver du travail ». F., 21 ans.’

Quantaux réponses négatives envers la langue kazakhe , les enquêtés expriment leur attitude :

‘« Je n'aime pas cette langue ». F., 17 ans.
« Je ne veux pas l'apprendre. Cette langue ne me plaît pas ». H., 21 ans.’

Ils arguent que le niveau d’enseignement du kazakh est très faible et que les Kazakhs eux-mêmes ne le maîtrisent pas bien. La position dominante de la langue russe dans la région centrale du pays ne motive pas les Russes à apprendre le kazakh :

‘« Au Kazakhstan on peut suffisamment se contenter de communiquer en russe ». H., 21 ans.
« La plupart des Kazakhs connaissent le russe ! Je communique avec ceux qui connaissent la langue russe ! ». H., 20 ans.
« Les Kazakhes eux-mêmes ne connaissent pas la langue kazakhe. Pourquoi les autres devraient-ils l'apprendre ? » F., 15 ans.
« Je crois qu'il faut étudier l'histoire et la culture du Kazakhstan mais la langue kazakhe n'a pas encore atteint le niveau d’une langue utile à la communication». F., 20 ans.’

Les Russes enquêtés pensent que l’utilisation du kazakh comme langue d’Etat ne doit pas se faire au détriment de la pratique de la langue russe. Ils sont pour l’officialisation du bilinguisme au Kazakhstan et soutiennent l’idée que l’apprentissage de la langue kazakhe ne doit être imposé :

‘« Le bilinguisme au Kazakhstan doit être protégé. Il faut apprendre la langue kazakhe aux gens qui le désirent. Il faut laisser le choix de la langue à apprendre ». H., 21 ans.
« Il faut avoir deux langues nationales et chaque citoyen doit utiliser la langue qu'il croit utile pour lui ». H., 21 ans.
« Parce qu'au Kazakhstan habitent beaucoup d'ethnies différentes. Que chacun(e) connaisse tout d'abord sa langue maternelle. Et après qu'il apprenne la langue kazakhe, s'il veut ». H., 20 ans.
« L'homme doit avoir le désir d’étudier n'importe quelle langue et non parce que l'Etat exige surtout si le peuple connaît également le russe et le kazakh ». F., 20 ans.’

Les enquêtés russes ayant choisi la réponse « Ne sait pas » ne sont pas, dans leur majorité, motivés d’apprendre le kazakh. Ils ne l’utilisent pas dans leur vie quotidienne et c’est pourquoi ils se contentent de la situation actuelle où le russe joue toujours le rôle de langue dominante. Certains pensent même que l’apprentissage obligatoire du kazakh par la force peut bouleverser la situation dans le pays :

‘« Ce n’est pas toujours utile. La majorité parle en russe ». F., 21 ans.
« Pour le moment, je n'ai pas besoin de l'apprendre ». H., 17 ans.
« Je ne comprends pas pourquoi cette langue est nécessaire ». H., 16 ans.
« Tout ne marche déjà pas bien et si changer le système en autre langue, ça ira encore pire ». H., 20 ans.’

Pour les autres enquêtés choisissant la réponse « Ne sait pas », la connaissance du kazakh est indispensable mais seulement pour ceux qui veulent rester et effectuer l’activité professionnelle au Kazakhstan :

‘« Ça dépend dans quel pays tu te trouves. Si c’est au Kazakhstan alors oui ». F., 16 ans.
« Si les étudiants continuent leur activité à l’avenir au Kazakhstan, ils devront étudier le kazakh. Si non, alors il n'y a pas de raison ». F., 20 ans.
« Chaque personne décide pour elle-même quelle langue elle doit apprendre. Mais si cette langue devient obligatoire, certes, la personne devra l'apprendre ». F., 17 ans.’

Synthèse des résultats

Suite à notre analyse des réponses, la majorité des enquêtés russes croit que l’apprentissage du kazakh est indispensable au Kazakhstan pour plusieurs raisons. En effet, étant citoyens du pays où la langue kazakhe est la langue d’Etat, les Russes sont favorables pour l’apprendre afin de montrer leur respect au Kazakhstan et au peuple kazakh. En plus, la connaissance de la langue kazakhe est un atout pour trouver un bon travail et faire la carrière. Les motifs pour apprendre le kazakh sont plutôt d’ordrepragmatique. Cependant, les Russes maîtrisent mal le kazakh à causede son niveau faible d’enseignement dans les établissements scolaires et du manque de spécialistes qualifiés et de manuels. Pour la minorité de ces enquêtés le fait que dans leur ville tous les habitants parlent le russe et les Kazakhs ne maîtrisent pas bien leur langue d’origine, justifie de ne pas apprendre le kazakh.

Ainsi, nous avons constaté que la majorité absolue des enquêtés russes, quelque soit leur réponse à la question « Croyez vous qu'il est indispensable d'apprendre le kazakh ? », souhaitent l’institutionnalisation du bilinguisme au Kazakhstan c’est-à-dire la reconnaissance du kazakh et du russe comme langues d’Etat et leur utilisation équivalente dans la république.