Nous allons donc tenter de réaliser une étude approfondie de l’agir de l’enseignant de FLE en Russie, de son rôle plurifonctionnel dans le processus d’enseignement/apprentissage et de formation de futurs professeurs de FLE.
Le niveau de maîtrise par les promus de l’université pédagogique de la langue étrangère - sous ses formes écrite et orale - doit être très élevé. Il s’agit d’acquérir un ensemble performant et fiable de savoirs théoriques et de savoir-faire, afin de les transmettre à leurs futurs apprenants (les compétences communicative, professionnelle et didactico-pédagogique).
L’enseignant de langue étrangère peut ainsi être considéré comme un spécialiste universel dans son domaine: l’expression orale et écrite d’un bon niveau, le travail avec des textes littéraires et documentaires, l’exploitation des savoirs historiques et culturels, le recours aux moyens du théâtre et de la vidéo, d’une part, ainsi que la distribution des savoirs instrumentaux efficaces (grammaire, orthographe, vocabulaire, etc.), d’autre part. Les futurs enseignants de FLE se trouvant dans une situation exolingue, ont à prêter une attention particulière à des formes typiques à la langue étudiée, afin de réussir à s’exprimer spontanément et naturellement. Il faut donc enseigner aux futurs professeurs de FLE la parole authentique qui n’a rien à voir avec la parole écrite sonorisée. Ce serait réalisable, à notre avis, si on créait en cours des conditions proches de celles d’une communication réelle et si on stimulait le réemploi d’un matériel langagier à assimiler dans diverses situations langagières.
La perspective actionnelle actuellement adoptée soutient des approches actives de l’enseignement dans lesquelles les apprenants se sentent impliqués et utilisent la langue cible et où les activités de classe sont réalistes ou vraisemblables.
Dans ce contexte, nous parlerons ici du naturel didactique.7 C’est un style d’enseignement caractérisé par une alternance régulière entre deux macro-types d’interventions (interventions didactiques, interventions visant à maintenir le lien interactionnel) dont le discours de l’enseignant est une des figures possibles. Il s’agit d’avoir des relations adaptées au cadre institutionnel et permettant de vrais échanges à un niveau de distance régulée, notamment par le biais d’une improvisation spontanée dans le cadre du sujet. Catherine Carlo - dans son article « « Le Naturel didactique ». Analyse du répertoire d’un enseignant chevronné » 8 se basant sur des corpus recueillis dans un milieu universitaire homoglotte - a proposé de faire un rapport entre motivation des apprenants à suivre un cours de FLE et modes d’exposition des données langagières mises en œuvre par des enseignants expérimentés et présentant certains éléments saillants.
Le substantif « didactique » (grec didactikos, de didaskein « enseigner ») dénomme une théorie et une méthode d’enseignement.9 A son tour, le terme enseignement peut être interprété comme « action, art d’enseigner, de transmettre des connaissances à un élève».10 L’enseignement est donc un processus se réalisant par l’intermédiaire de l’action (d’une série cohérente d’actions) par le sujet qui est l’enseignant. Ce dernier agit dans le cadre d’un contrat didactique, c’est-à-dire en accord et dans l’intérêt de ses apprenants, en réajustant en permanence sa manière d’agir en fonction de leurs besoins, leurs particularités et leurs intérêts, pour susciter et maintenir leur motivation d’apprentissage. Autrement dit, l’enseignant inter-agit avec ses apprenants, en gardant son droit (et devoir) de décider du déroulement des activités pré-planifiées, en aménageant des passages logiques entre les activités (smooth). L’enseignant apparaît ainsi comme une figure clé dans l’organisation et le maintient de toute activité pédagogique. Son but principal est de modifier les comportements et les compétences de ses étudiants, en passant pour cela par un certain nombre de moyens. L’enseignant fait accomplir aux autres des actions de langage ou d’apprentissage. Il s’agit de « manipuler la communication » en langue étrangère « en vue de maximiser les processus acquisitionnels » des apprenants.11
CARLO C., « « Le Naturel didactique ». Analyse du répertoire d’un enseignant chevronné », dans: Le Français dans le monde. Les interactions en classe de langue, juillet 2005, p.p.105-113.
Idem.
Le Nouveau Petit Robert, Paris, Le Robert, 2007, p.733.
Le Nouveau Petit Robert, op. cité, p.881.
BANGE P., « A propos de la communication et de l’apprentissage de L2 (notamment dans ses formes institutionnelles) », dans: AILE n°1, 1992, Paris, Encrages, p.62.