Corpus et méthode de recherche

En connaissant suffisamment le terrain54 et en ayant l’avantage d’être en contact permanent avec le français authentique, nous nous sommes donnés pour ambition d’influencer la qualité de l’enseignement du FLE en deuxième année de l’université pédagogique russe. Ceci sous-entend pour nous une optimisation de l’agir de l’enseignant, en premier lieu.

L’enseignant mandaté par l’institution pour gérer l’ensemble des productions langagières de ses apprenants, remplit – conjointement ou alternativement – trois fonctions principales: celles d’organisateur, d’évaluateur et d’informateur.55 Il nous a semblé intéressant et utile d’examiner chacune d’entre elles à travers nos enregistrements authentiques des fragments de cours de FLE à l’Université pédagogique de Vologda. En même temps, nous avons essayé, après C. Carlo,56 de déceler dans les énoncés de l’enseignant analysé plusieurs types d’interventions.

Entre 1999 et 2006, nous avons recueilli, dans des circonstances différentes, en Russie et en France, 18 corpus en tout. Il s’agit de fragments de cours plus ou moins étendus dans le temps et de dialogues/polylogues simulés en situation didactique ou en dehors de celle-ci. Tous les interactants sont Russes; certains résident dans leur pays d’origine, d’autres sont installés en France depuis quelque temps.

La plupart de nos enregistrements est faite dans le cadre de l’apprentissage guidé, sauf deux jeux de rôle concernant la communication téléphonique amicale (Annexes 8, 9) et une discussion « décontractée » (du type questions/réponses) (Annexe 6).

Nous avons donc mis au cœur de nos recherches les polylogues pédagogiques (corpus 1 et 2 de l’Annexe 5) s’étant déroulés au début de deuxième année. C’est l’année d’apprentissage qui nous est le plus familier.

En décalage, nous avons analysé les simulations des communications téléphoniques comme pratiques d’apprentissage « dévoluées » (corpus 3, 4 (Annexe 7). Elles sont réalisées à la fin de deuxième et troisième années. En ce qui concerne les apprenants de deuxième qui y participent, ce ne sont pas les mêmes groupes qui ont pris part à nos polylogues pédagogiques.

Au début de nos recherches, nous nous sommes inspirés des analyses du corpus LANCOM 57 et avons entrepris en février 1999 un enregistrement du jeu professionnel « La Communication téléphonique », avec les étudiants des deux groupes « français » de deuxième et troisième années de la faculté des langues étrangères de l’Université pédagogique de Vologda (Russie). Nous avons pris pour base les scénarios d’un jeu similaire de LANCOM 58.

A travers tout l’analyse des discours des étudiants russes de l’université, les comparaisons de deux types s’imposent: d’une part - entre les mêmes activités réalisées dans deux groupes parallèles, car les bases initiales de français des représentants des groupes opposés différencient considérablement,59 et d’autre part - entre différents types d’activités effectuées par les apprenants du même niveau60 se trouvant dans la même situation. Toutes les activités sont dirigées par le même enseignant – non natif, Russe.

En contrepoint de nos polylogues pédagogiques universitaires, nous avons créé le corpus 5 « La Discussion 2 à partir d’un extrait du roman de P. Guth « Le Naïf aux quarante enfants » (Annexe 6; février 2006), qui nous a servi à effectuer des analyses comparatives d’un oral dialogique conçu en milieu d’apprentissage organisé (FLE) et dans une ambiance décontractée (FLS), entre deux personnes russes habitant en France, familières l’une à l’autre: mère et fils. La première est en même temps l’enseignante de FLE, par sa formation, et le deuxième étudie dans un lycée public de Valence.

Ensuite, pour pouvoir comparer des simulations dialogiques dans un milieu d’apprentissage organisé et dans un milieu d’acquisition naturelle, nous avons décidé d’enregistrer le jeu de rôle « La Communication téléphonique 2 » (Annexe 8), suivant le même canevas du corpus LANCOM. Il s’agit, dans ce cas-ci de deux personnes russes installées en France depuis plusieurs années et ayant eu chacune son parcours personnel dans l’acquisition des bases du français.

Nos deux protagonistes d’un autre dialogue improvisé « La Communication téléphonique 3 » (août 2005, Marseille; Annexe 9) sont jeunes Russes, scolarisés en France depuis quelques années.

Lors des analyses minutieuses des polylogues pédagogiques, nous avons constaté que les étudiants sont peu actifs et éprouvent certaines difficultés de mener une communication. Ils sont surtout gênés au niveau de l’expression. L’enseignant se charge en permanence de secourir le déroulement de l’activité.

Le besoin s’impose de trouver les moyens d’optimiser l’enseignement de l’oral en FLE, notamment en deuxième année de l’université pédagogique russe par un enseignant non-natif, en nous appuyant, sur les trois cas d’appropriation de la parole et de la culture françaises, dans le cadre du « naturel didactique ».

Notes
54.

Durant plusieurs années, nous avons enseigné le français parlé en deuxième et troisième années de l’université pédagogique de Vologda (Russie).

55.

DABENE L., « Communication et métacommunication dans la classe de langue étrangère », dans: INTERACTIONS: les échanges langagiers en classe de langue , ouv. Coll. De l’Université des Langues et Lettres de Grenoble, Grenoble, 1984, p.p.131-134.

56.

CARLO C., « Le Naturel didactique »….», op. cité, p.p. 105-113.

57.

DEBROCK M., FLAMENT-BOISTRANCOURT D., MERTENS P., TRUYEN F. et al. (réd.), « Le Corpus LANCOM », dans Le Projet Elicop, Louvain, Université Catholique de Louvain, 1998.

58.

Voir notre Annexe 10.

59.

Voir La première partie du présent travail.

60.

Nous avons décidé de préserver la répartition classique en niveaux dans le but d’éviter d’éventuelles complications lors de notre recherche.