5. 0. Les particules de l’oral

Nous avons déjà montré que tout discours est le produit d’un « bricolage interactif », effectué coopérativement par tous ceux qui s’y trouvent collectivement engagés.

La fonction de marquer les différentes étapes de l’organisation de la conversation, aux côtés d’autres procédés de nature prosodique ou lexicale revient aux particules de l’oral à l’analyse desquelles C. Kerbrat-Orecchioni prête beaucoup d’attention.239 Ce sont de petits mots du discours, particules énonciatives, marqueurs discursifs, ponctuant et appuis du discours, connecteurs pragmatiques ou conversationnels, marqueurs de structuration de la conversation. Spécifiques du discours oral, ces petits mots (bon, ben, alors, donc, hein, quoi, enfin, finalement, etc.) y sont présents massivement. C. Kerbrat-Orecchioni en expose une preuve: Vicher & Sankoff s’intéressant aux particules d’attaque de tour dans un corpus constitué de discussions en classe et conversations ordinaires, en dénombrent entre cinquante et quatre-vingt, et notent que les deux tiers des tours en comportent au moins une (mais elles apparaissent le plus souvent en combinaison, la plus fréquente étant « mais oui »).

C. Kerbrat-Orecchioni atteste que l’origine de ces particules est diverse, un certain nombre d’entre elles étant issues de la grammaticalisation de formes pleines, comme les formes verbales « tu vois », « tu sais », « tiens », « mettons », « voyons », « regarde », « écoute », ou « attends ». La valeur dominante de cette classe est la valeur dite « phatique ».

Par grammaticalisation, on désigne habituellement un processus diachronique au terme duquel un élément linguistique perd sa valeur lexicale primitive et se trouve doté d’une fonction « grammaticale », c’est-à-dire morpho-syntaxique.240

Notes
239.

Voir par exemple KERBRAT-ORECCHIONI C., Le Discours-en-interaction, op. cité, p.p.49-55.

240.

BÉGUELIN M.-J., « Variations entre macro- et micro-syntaxe: de quelques phénomènes de grammaticalisation », dans: Scarano (éd.), 2003, p.111.