2. 1. La participation des apprenants

Nous avons dégagé, grâce à nos analyses, la participante la plus active A4 qui s’est manifestée 89 fois durant 3’47’’ au total. Quoique au cours de plusieurs tours de parole complets elle a gardé des silences ou a exprimé des hésitations. Ceci correspond à 14’’ en tout. Elle a donc réellement parlé au cours de 3’33’’, ce qui dépasse plus que trois fois la durée générale de la parole de l’apprenante protagoniste. Cette jeune fille s’est souvent manifestée comme volontaire pour répondre à des questions libres, non liées au contenu de l’extrait analysé. On constate qu’elle est prête à s’impliquer dans l’activité, malgré ses difficultés au niveau du vocabulaire. Il s’avère qu’en s’écartant un peu des questions sur le texte étudié (respectant la thématique planifiée), l’enseignant favorise ici plutôt l’établissement et la gestion du lien communicatif, qu’il juge indispensable pour l’aboutissement du polylogue: la façon de « naturaliser » les échanges didactiques.

Prenons maintenant un autre exemple – l’apprenante A10. Elle a intervenu 26 fois consécutives, ce qui correspond à 1’06’’ en tout. C’est l’enseignant qui l’a désignée, puisque elle ne s’est point prononcée auparavant. Si nous y déduisons le temps de silences et d’hésitations, elle a réellement parlé au cours de 57’’, ce qui est de 2’’ seulement moins long que dans le cas de l’apprenante A2.

Par ailleurs, l’apprenante A7 a intervenu seulement 15 fois mais durant 1’11’’ au total, dont seulement 1’’ a été réservée au silence. Elle a ainsi parlé pendant 1’10’’, ce qui représente sa participation plus importante que celle de l’étudiante protagoniste A2 (59’’). Il est curieux de remarquer que durant des tours de parole 83, 85 et 87 A7 parle chaque fois pendant 10’’, tandis qu’au cours des tours 79 et 81 elle se prononce chaque fois durant 12’’. Une pure coïncidence, sans doute, mais qui a l’air d’une certaine régularité profonde provenant probablement des particularités de son Moi.

Le groupe reste le plus souvent assez passif face à des questions de l’enseignant lui étant adressées, ses réactions ponctuelles les plus fréquentes sont des silences. Parfois, il réagit néanmoins par des rires de soutien ou de complicité avec des intervenants, ou bien par quelques brèves réponses à des sollicitations du professeur.

Nous avons réuni sous l’étiquette de A non-identifiés tous les apprenants s’étant manifestés occasionnellement et dont les voix nous sont restées inconnues. Il y a 21 manifestations de cette sorte à travers tout le polylogue, ce qui correspond à 4% (33’’). Ces manifestations sont elliptiques et brèves: 1’’-2’’, se composant chacune de 2 ou 3 mots. Elles s’avèrent les plus fréquentes à la fin de l’activité, lors de la discussion avec l’enseignant au sujet de la difficulté de l’extrait analysé. Curieusement, nous avons à nouveau constaté que le détour de l’enseignant de ses interventions visant purement le déroulement de la thématique planifiée au profit de celles qui sous-entendent l’établissement et la gestion du lien communicatif (l’instauration du « naturel » didactique) sert à « activer » les échanges dans le cadre d’apprentissage traditionnel.