Conclusion partielle

Nous avons constaté ci-dessus417 que du point de vue des nombres de manifestations de l’enseignant, une part presque deux fois plus importante que celle de l’enseignant organisateur, est réservée, dans ce polylogue, à la fonction de l’enseignant évaluateur . La plupart des manifestations évaluatives – 36,21% sur 36,82% - sont de nature positive, il s’agit des expressions, des adverbes et des phatiques d’approbation du type c’est ça, ça va, bon, bien, bien sûr, d’accord, juste, alors voilà, oui, mhm, etc., des reprises des phrases ou des bouts de phrases correctes (en français et en russe). Des évaluations négatives exprimées par des questions adressées au groupe ou à l’apprenante protagoniste, ou par un non classique, sont peu nombreuses. Les 9,17% du temps d’évaluation sont dédiés à des corrections pures, non précédées des tentatives de l’enseignant de faire les étudiants se corriger eux-mêmes ni non accompagnées d’explications grammaticales. Ensuite, 38,98% du temps sont réservés à des commentaires métalangagiers, métalinguistiques et métadiscursifs, lorsque l’enseignant traite des façons de parler propres aux apprenants concrets, des tournures et du lexique à employer – en français et en russe. Parmi ce type de commentaires, ceux métadiscursifs sont les moins nombreux – 8,88% seulement. Mais en même temps, leur présence prouve que le polylogue se déroule dans le cadre d’un apprentissage guidé et par conséquent en garde toutes ses particularités.

Il n’est pas surprenant que, compte tenu du niveau des apprenants, la fonction évaluative de l’enseignant ait apparu en première place du point de vue des fréquences de ses manifestations: les étudiants de deuxième année ont besoin d’être régulièrement rassurés, corrigés, épaulés lors de leurs échanges dialogiques menés souvent « à tâtons ». Ces manifestations de l’enseignant restent en général bien ponctuelles (quelques secondes); quoiqu’il y en ait une (529E) dont la durée est de 20 secondes!

Analysons maintenant les manifestations de l’enseignant évaluateur du point de vue de la classification de C. Carlo:

Types de manifestations de l’enseignant
évaluateur
Nombre de manifestations, et en % Manifestation la plus courte-la plus longue Temps général réservé à chaque type de manifestations, et en %
visant le déroulement de la thématique planifiée
81 = 39,5 %

1’’-20’’

2’28’’ = 28 %
visant la facilitation du traitement de l’input 21 = 10 % 1’’-14’’ 1’31’’ = 17 %
visant l’établissement et la gestion du lien communicatif
24 = 12 %

1’’-12’’

0’49’’= 9 %
explicitement focalisées sur le code 79 = 38,5 % 1’’-18’’ 4’01’’ = 46 %
  205 = 100 %   8’49’’ = 100 %

D’après le tableau ci-dessus, qui a englobé presque la totalité des manifestations de l’enseignant évaluateur à travers le polylogue étudié, l’enseignant s’y distingue surtout par le nombre de celles-ci visant le déroulement de la thématique planifiée, mais aussi par celles qui sont explicitement focalisées sur le code, ce qui explique le caractère didactique de l’activité et le rôle clé du professeur dans son évolution. Mais si l’enseignant organisateur a le plus fréquemment intervenu pour gérer le lien communicatif indispensable pour que le polylogue progresse,418 le nombre de manifestations de ce type lors du remplissage de sa fonction évaluative s’avère modeste. Les moins nombreuses sont ses manifestations évaluatives visant la facilitation du traitement de l’input, ce rôle n’y étant pas cruciale. Quoique, à la différence des manifestations homologues du type organisateur, leur durée puisse être plus brève – de 1’’ à 14’’: l’enseignant confirme juste l’intervention de l’apprenant(e), la reprécise, incite l’étudiant(e) à se corriger, etc. Il s’agit donc des interventions ponctuelles de ce premier, leur but étant généralement d’habituer ses apprenants à l’autocorrection, tout en les épaulant.

Du point de vue de la durée totale des manifestations des quatre types présentées dans le tableau ci-dessus, celles explicitement focalisées sur le code sont presque deux fois plus importantes que les manifestations de l’enseignant visant le déroulement de la thématique planifiée. Cette conclusion prouve le fait que le professeur en question veille soigneusement à ce que la parole de ses apprenants soit correcte; il « rhabille » leurs idées à l’authentique. Et le moins de temps est consacré, cette fois-ci, à la gestion du lien communicatif qui n’est pas la prérogative lors de l’évaluation.419

Or l’abondance des métacommentaires de nature évaluative confirme le caractère didactique de l’activité et une place importante que prend l’agir de l’enseignant là-dedans à ce niveau d’apprentissage. Nous sommes effectivement en présence d’une nette dissymétrie des rapports professeur/étudiants. De temps en temps, l’enseignant évaluateur tente de diminuer un peu cette distance le séparant de ses apprenants et recourt aux manifestations visant la gestion du lien communicatif, sans s’y centrer pourtant.

Nous avons décelé que la méthode du professeur analysé se base sur l’évaluation formatrice .

Notes
417.

Voir la deuxième colonne du tableau à la page 277.

418.

Cf. le tableau à la page 307.

419.

Cf. le tableau à la page 307.