4. L’inclusion scolaire à l’épreuve de la réalité pratique

L’observation qui précède permet d’éclairer les difficultés de mise en place du modèle inclusif au Brésil. Si une volonté d’inclure transparaît très nettement dans les textes législatifs de ce pays, la réalité scolaire de l’inclusion, pour le moins dans le cadre de l’école publique semble tout autre. Il convient de ne pas généraliser excessivement, car si l’école publique apparaît comme le parent pauvre du système scolaire brésilien, les immenses disparités régionales, en termes économiques et en termes de politiques publiques laissent à penser qu’il existe d’importantes différences, même dans l’éducation publique, entre le sud et le nordeste du pays.

Cependant, nombre de freins à l’inclusion semblent similaires. En plus de la lente transformation des mentalités en regard des personnes en situation de handicap, un fort consensus s’établit vis-à-vis du manque de formation professionnelle des instituteurs et du manque de préparation des écoles pour inclure ces enfants aux besoins éducatifs spécifiques. Ceci renvoie au contexte socio-économique et historique de l’éducation publique et de l’éducation spécialisée qui laisse des marques importantes dans le présent de ces deux institutions et constituent certainement les freins les plus importants. Si le Brésil s’est doté d’une législation en matière d’inclusion, que l’on pourrait qualifier de “modèle“, la manière de considérer l’école publique, qui reste “l’école des pauvres“ et encore liée à l’histoire. Comment impliquer dans l’inclusion des professeurs qui, outre le manque de formation, souffrent d’un manque de considération et d’une faible valorisation salariale, dans une entreprise qui exigent beaucoup en termes de savoir-faire, d’investissement humain et de compétences pédagogiques? Comment convaincre des professeurs de l’enseignement public que “l’école des pauvres“ (et dont c’est encore la fonction par rapport à l’école privée) peut devenir inclusive alors qu’ils sont à la fois les premiers à faire l’expérience de l’exclusion qu’elle génère encore et sont victimes émissaires de cette exclusion? Comment les convaincre de faire plus et mieux (avec une inclusion soucieuse de la qualité et du respect des différences) quand leurs conditions de travail ne changent pas? Conditions de travail et conditions de réussite scolaire qu’ils peuvent par ailleurs très bien comparer au privé, puisque la majorité des institutrices de l’école Ferreira travaille à la fois dans le public et dans le privé. Ces dernières observations renvoient aux paradoxes qui jalonnent les conditions sociopolitiques mêmes de réalisation de l’inclusion scolaire.