Comme je l’ai évoqué dans les chapitres précédents, les années 80, mais surtout 90, que l’on désigne comme étant la “Décade de l’éducation“, sont le théâtre de préoccupations majeures en matière d’éducation et particulièrement d’éducation pour tous. Celle-ci devient une priorité absolue et donne lieu à de grandes Déclarations internationales à partir desquelles va se constituer et se consolider l’idée de l’éducation inclusive. En effet, l’éducation inclusive se loge très exactement dans la volonté de généraliser l’éducation de base11 et d’ouvrir celle-ci à Tous les enfants quelles que soient leur conditions sociales, culturelles, ethniques et quelques soient le type de déficience dont ils souffrent. Rapidement, les “nécessités éducatives spécifiques auxquelles il convient donc de répondre dans cette nouvelle perspective éducationnelle inclinent à focaliser plus particulièrement sur une population très hétérogène, de par ses composantes, de par la nature de ces besoins éducatifs: les enfants ayant une déficience. Même si de temps à autre on évoque les autres types de difficultés (sociales, familiales, culturelles propices à générer des difficultés d’apprentissage ou d’ordre cognitif), il n’échappe à personne que la population privilégiée de ces mesures est celles des enfants en situation de handicap.
Ce phénomène ne se produit pas isolément. A travers un ensemble d’énoncés discursifs disséminés12 dans le monde et dans des champs différents (éducation, psychologie, économie, politique, droit, médias,etc.) on assiste à la formation d’une discursivité et de pratiques discursives et non discursives autour des questions de diversité, de différence: droit à la diversité, respect de la diversité, droit et respect de la différence, qui vont trouver aussi leur pendant dans le monde scolaire etc. Les grandes agences internationales (FMI, UNESCO, OMS, Banque Mondiale etc.) vont se faire les relais et les prescripteurs de cette reconnaissance de la diversité tant culturelle que scolaire. On “découvre“ que la salle de classe est le lieu de la diversité des origines, des potentialités et des modes d’apprentissage.
Dans la thèse, j’évoque un certains nombre de paradoxes apparents. Ainsi, parallèlement à la diffusion du modèle scolaire inclusif on voit apparaître aussi une forte préoccupation pour la gestion de cette diversité, pour des questions d’efficience, de rendement scolaire, d’évaluation des rapports coût-bénéfice, etc qui ne cesse d’interroger, par ailleurs la faisabilité de cet idéal inclusif qui est volontiers présenté comme une opportunité de rendre la société plus inclusive, plus juste, plus soucieuse d’égalité sociale, etc. On a donc, d’un côté un discours de droit (droit à l’éducation de base) et de générosité (qu’exprime cette préoccupation pour l’autre, pour son intégration, etc.) qui trouve un appui technique sur l’éducation spécialisée. De l’autre côté, un certain discours officiel valorise un projet scolaire devant préparer la jeune génération à affronter les défis de la concurrence, de la flexibilité de l’emploi, de l’adaptabilité permanente à des conditions socio-économiques instables propres à la globalisation et qui s’appuie sur la théorie réactualisée du capital humain et sur le modèle de “l’entrepreneur de soi“ valorisés par le référentiel global du marché que le néolibéralisme économique a imposé en modèle.
Ces préoccupations technicistes et économistes laissent entrevoir que le côté humaniste de cette volonté d’inclure, tant mis en évidence par les énoncés inclusifs, constituent autant de stratégies pour masquer une politique de gestion de certaines populations dont le référencement opère toujours sous le mode disjonctif: normal/déficient. Par ailleurs, au Brésil, la manière insistante avec laquelle on encadre les conditions et exigences d’accueil de ces enfants “différents“ n’est pas sans laisser penser que l’on passe graduellement d’un droit à l’inclusion à un véritable devoir d’être inclus qui justifie que l’on s’arrête un moment sur la réflexion de Foucault à propos de la biopolitique.
Couvrant donc la maternelle, le primaire et le premier cycle secondaire français, jusqu’à l’âge de 14 ans. Les critères internationaux suggèrent une période de scolarisation obligatoire minimum de 9 ans.
Le phénomène de la World music, les publicités Beneton, les revendications gay, féministes, l’apparition de personnes de couleurs, indigènes ou ayant une déficience dans les télénovelas brésiliennes, etc. Les préoccupations pour les questions identitaires, culturelles, pour les questions d’interculturalité dans l’éducation, de multiculturalisme, de mixité culturelle, etc.