4. L’émergence d’un modèle d’accompagnement

Ce modèle d’accompagnement, qui se veut plus directif dans un premier temps, s’articule sur la triple dimension théorique (ou de fond), méthodologique (ou de forme), et organisationnelle (ou en termes de moyens) afin d’atteindre ce qui constitue, au fond depuis toujours, l’objectif de l’équipe (probablement plus avoué à partir de cette époque): le changement de l’école en lieu inclusif.

Il s’agit d’engager les professionnels de l’école dans un processus de changement profond qui passe par un questionnement radical de leurs pratique pédagogiques et de gestion. Il s’agit aussi, du point de vue de la recherche, de les définir mieux: ces professionnels sont-ils objets d’étude ou sujets du changement que l’équipe est en train d’impulser progressivement? En plus de cette question qui, au fond, va traverser toute la recherche, la venue du professeur canadien va s’accompagner de nouveaux savoir et de nouveaux instruments de recherche et d’évaluation. C’est ainsi que les questions d’enseignement différencié, de planification des activités, d’échelles d’évaluation, des compétences tant des professeurs que des gestionnaires, de positionnement vis-à-vis de différents types de changement, de ligne du temps ou de techniques des groupes focalisés, parmi bien d’autres, vont compter au rang des nouvelles acquisitions théoriques et des nouveaux investissements des membres de la recherche.

D’un point de vue plus critique, on peut se demander si vraiment les professeurs de l’école publique sont si incompétents - pour utiliser encore les méthodes “traditionnelles“ d’enseignement - ou bien si les expectatives résolument transformatrices et volontariste des chercheurs orientent/limitent leurs perceptions. Est-ce que, par ailleurs, les affirmations d’incompétences, de la part des professeurs eux-mêmes cette fois-ci, ne constitueraient pas une forme de stratégie de résistance passive27? A la lecture de ces rapports de réunion, un autre point m’apparaît problématique (et peut-être peu pris en compte dans la recherche): le projet scolaire inclusif est toujours présenté comme étant une évidence partagée, ou présenté comme un objectif commun, ainsi que je l’ai déjà évoqué plus haut. Mais, au fond, c’est une évidence pour qui? Et qui, sinon les chercheurs, a produit ce projet, en a défini les objectifs et l’articulation?

Notes
27.

Type: «nous sommes incompétents en ce qui concerne le travail avec des enfants ayant une déficience; comme vous voulez les intégrer dans l’école, on attend tout de vous, on vous laisse faire».