Depuis la colère d’Achille jusqu’à l’embrasement de Troie, depuis la prouesse de Roland jusqu’au désastre de l’Archamp, tout est violence et cruauté dans l’épopée. Les chansons de geste des XIIe et XIIIe siècles proposent une image excessive, sinon caricaturale, de la société médiévale et des conflits qui peuvent s’y présenter. Plus tard, dans les chroniques historiques rédigées en France pendant les règnes de Louis XI et de Charles VIII, les violences (divine, humaines, politiques ou climatiques) occupent encore la majorité des paragraphes, dont une moitié est consacrée aux meurtres et à la guerre. Cette thématique se retrouve alors naturellement dans les miniatures et illustrations des manuscrits275. Dans les poèmes plus anciens, le grandissement propre au genre littéraire n’est sans doute pas étranger à cette exacerbation des sentiments et des passions parce que la violence participe de l’esthétique de l’épopée.
L’œuvre de Nicolas de Vérone, composée de trois chansons formellement identiques, paraît propre à véhiculer une certaine brutalité des gestes, d’autant plus aisément que la thématique guerrière est au cœur de la Prise de Pampelune et de la Pharsale. Ainsi, le trouvère est amené à utiliser et à renouveler les motifs rhétoriques connus pour décrire les affrontements des différents personnages.
L’étude proprement poétique et rhétorique des trois textes franco-italiens permet de définir la particularité même de l’esprit épique aux yeux de Nicolas de Vérone : le choix générique de la chanson de geste pour narrer la Passion du Christ induit, de fait, un regard nouveau porté sur les désirs, les aspirations et le caractère des protagonistes.
Voir à ce sujet N. Hurel, « La représentation de la violence dans l’illustration des Chroniques universelles en rouleau », La Guerre, la violence et les gens au Moyen Age, éd. P. Contamine et O. Guyotjeannin, Paris, CTHS, 1996, vol. 1, p. 125-126.