3.3.3.2 La démarche d’investigation

La didactique actuelle, dont nous empruntons les grands principes à Jean-Pierre Astolfi, Michel Develay et André Giordan, propose pour l'enseignement des sciences à l'école un modèle d'investigation qui installe une activité fonctionnelle, proche de l'intérêt de l'enfant, ouvrant sur un problème scientifique. Les représentations initiales des apprenants sont recueillies et confrontées pour qu'émergent les questions, les problèmes et les obstacles. Le recueil de données sur le réel s'effectue par l'observation, la manipulation, l'expérimentation, l'enquête sur le terrain et la recherche documentaire.

L'observation est conçue comme un phénomène actif : "L'homme voit avec son cerveau, et pas uniquement avec ses yeux. Le monde ne rentre pas passivement dans nos yeux. C'est notre cerveau qui guide l'intention que nous avons d'observer ou de ne pas observer telle ou telle réalité (Develay, 2001 : 72). Pour Gérard Fourez, "l'observation absolue, directe, immédiate, quasi fusionnelle avec le monde, d'un rapport duel avec le monde" n'existe pas (1988 : 29). C'est un rêve, un mythe qui doit laisser la place à l'idée que, dans l'observation scientifique, c'est la collectivité scientifique qui "habite" les processus d'observation.

Les données de l'investigation sont traitées par la comparaison, le classement, l'identification, la mesure. Les conflits socio-cognitifs mettent en lumière les points d'accord et de désaccords. Un travail organisé et structuré de synthèse permet de construire le système explicatif opératoire : résumé, tableau, schéma, élucidation d'une loi ou maquette, qui inscrivent ces activités dans un réseau de communication du savoir élaboré et/ou une activité de métacognition pour se réapproprier les moments forts de la démarche qui a permis de trouver la ou les solutions.

Cette démarche de construction de savoir offre une grande liberté à l'enseignant à condition toutefois qu'il garde en tête les moments clés de la démarche qui signent l'élaboration d'une pensée scientifique chez l'élève. L’expression démarche d’investigation a été introduite pour la première fois dans les instructions officielles en 1969, à l’occasion de l’entrée des disciplines d’éveil dans les programmes de l’école primaire, dans un contexte didactique qui se voulait en rupture avec la leçon de choses. Finies les monstrations du maître qui fait, expérimente, explique, transmet son savoir à des élèves qui écoutent, puis dessinent et recopient le résumé proposé par le maître. Les connaissances en psychologie du développement ont mis en lumière la nécessité de l’action de l’enfant dans et sur le réel pour la construction des connaissances. Sous l'impulsion de Georges Charpak et de l'opération La main à la pâte, l'idée de démarche d’investigation reprend et synthétise les principaux éléments qui fondent les démarches scientifiques, expérimentales ou technologiques.