La sélection des entretiens :

L’axe quantitatif n’intervenant pas, notre objectif n’est pas d’analyser le pourquoi les sujets dépendent du Revenu minimum d’insertion, mais de nous saisir de ce qui est à l’œuvre chez certains allocataires dans leurs dépendances au Revenu minimum d’insertion. 

Nous avons limité notre matériel clinique à cinq situations ; deux sont issues de mon Dea, les trois autres de mes recherches ultérieures.

Ces histoires ont été choisies parce qu’elles ont des parcours professionnels et affectifs différents et parce qu’elles ne sont pas exemplaires d’une pauvreté endémique même si un sujet peut le laisser supposer.

Toutes les situations sont donc marquées du sceau de ce que j’appellerai ma curiosité épistémologique dès que les personnes parlaient d’argent.

Cette curiosité épistémologique, qui a eu des effets sur mon écoute,  a été amoindrie par le contexte de la demande sociale : le contrat d’insertion, contrat établi entre le bénéficiaire, le référent social et mon institution.

Ce contrat est sous-tendu par une évaluation qui est faite à mi-parcours, et à la fin du temps de travail qui a été assigné sur le contrat. Cette évaluation se fait sous forme d’une réunion tripartite à laquelle participent : le bénéficiaire, le référent social et moi-même.

Le but de cette rencontre est d’entendre la parole du sujet dans le chemin qu’il a parcouru au cours des entretiens.

Je tiens à préciser qu’il ne s’agit pas de faire un compte rendu de l’histoire du sujet mais de valider l’orientation faite par le référent social. C’est le bénéficiaire qui signifie si le fait de me rencontrer dans le cadre des entretiens lui a été bénéfique.

Il y a dans la réalité un tiers, qui est « le garant » des objectifs fixés dans le cadre du cahier des charges par l’institution sociale, cahier des charges que nous devons respecter. C’est pourquoi, le matériel clinique recueilli dans le cadre de cette recherche, a été « balisé »  par le contexte de la demande que je viens de définir. Il y a dans le travail clinique présenté, une réalité externe qui traverse le champ de l’entretien même, à savoir une adresse à un autre.

C’est cette adresse à un autre qui m’a permis aussi de concilier travail de recherche et travail clinique car elle m’inscrivait dans un autre espace que celui de la relation duelle.

Par ailleurs, le discours du sujet dans la relation duelle est toujours adressé à un autre.  Nous sommes ici confrontés à un double mouvement : un mouvement d’adresse à un autre dans l’espace psychique et un mouvement d’adresse à un autre nominé dans l’espace social.

C’est grâce à ce double mouvement que j’ai pu me dé-prendre de ma pratique pour conserver la distance nécessaire  liée à ma recherche.

Les effets d’objectivation du cas clinique qui sous tendent une violence de la situation d’entretien, n’ont pas pu se déployer d’une manière trop prégnante, du fait même de la demande.