F3- Le contrat d’insertion

Le contrat d’insertion est un contrat qui est signé par les bénéficiaires du Revenu minimum d’insertion et par le président de la commission locale d’insertion, il est donc signé pardes personnes privées et par un partenaire public. C’est à ce titre que M. Badel considère que c’est un contrat administratif synallagmatique, contrat signifiant que les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres. En effet, le bénéficiaire est tenu selon l’article 13 de la loi du 1er Décembre 1988 d’établir un contrat dans les trois mois qui suivent le paiement de son allocation.

Le contrat d’insertion est un droit pour le bénéficiaire du Revenu minimum : celui de s’insérer dans la communauté à travers un projet et de mettre en œuvre les moyens de réaliser ce projet.

La collectivité s’engage par ailleurs, par le biais du Département à octroyer les moyens financiers nécessaires à la réalisation du projet d’insertion. Le conseil départemental d’insertion élabore  le plan départemental d’insertion à partir des besoins d’insertion évalués par les commissions locales d’insertion. C’est dans le cadre du plan départemental d’insertion que sont élaborées des actions d’insertion, actions définies par un cahier des charges qui est sujet à appel d’offres. Les organismes choisis par le département passent une convention avec ce même département, convention qui délimite le champ d’action : insertion sociale ou professionnelle, le public visé, les actions à mener, le mode de financement.

Concernant le contrat d’insertion, le législateur précise à travers l’article 36 de la loi du 1er décembre que le contrat doit désigner :

‘ «  La nature du projet d’insertion qu’ils sont susceptibles de former ou qui peut leur être proposé, la nature des facilités qui peuvent leur être offertes pour les aider à réaliser ce projet, la nature des engagements réciproques et le calendrier des démarches et activités d’insertion qu’implique la réalisation de ce projet et les conditions d’évaluation, avec l’allocataire, des différents résultats obtenus. »’

Le contrat d’insertion est donc un échange entre la personne aidée et la collectivité, échange qui mobilise plusieurs acteurs à des niveaux différents. La vraie question qui reste en suspens est le contenu même de cet échange qui est l’objet de notre recherche, et la notion d’insertion.

Un détour vers les textes officiels s’impose pour cerner ce qui est entendu dans la notion d’insertion.

L’article 38 de la loi précise que : « l’insertion proposée aux bénéficiaires du revenu minimum d’insertion et définie avec eux peut, notamment, prendre une ou plusieurs des formes suivantes :

Cette notion d’insertion est définie par défaut, c’est à dire que le législateur a énuméré
les différentes sortes d’insertion : par le logement, l’accès aux soins, l’éducation, le travail, mais n’a pas défini ce qu’il entendait par insertion et surtout insertion sociale.

C’est une notion qui a pour caractéristique, de situer hors de la sphère du contrat d’insertion, le soin, sans qu’il soit précisé de quel type de soin il s’agit. En d’autres termes, la santé du sujet est prise en compte, elle peut être évoquée, mais n’a pas en tant que telle a être l’objet d’un enjeu pour le sujet.

Cette impossibilité de définir le terme d’insertion préfigure l’impossibilité de définir la notion d’exclusion. En effet, la difficulté à cerner un champ de pensée, à ne pas pouvoir définir des concepts balisant le terrain d’investigation induit de l’exclusion dans la pensée même.

Dans la réalité, la préparation du projet d’insertion et son élaboration se fait avec le concours des travailleurs sociaux qui sont les acteurs sociaux directement impliqués dans l’insertion ; c’est à partir de l’échange avec le bénéficiaire qu’ils posent les bases d’un diagnostic social et les orientations du projet d’insertion. Ce travail d’accueil, d’analyse, d’élaboration n’a pas la place qu’il mérite dans le dispositif d’insertion.

En effet, le travailleur social qui a instruit les dossiers ne participe pas aux commissions locales d’insertion, ce n’est pas lui qui défend les dossiers, pas plus qu’il ne signe les contrats comme représentant institutionnel. Il y a une dépossession par les institutions d’une pratique professionnelle des travailleurs sociaux qui a été un des facteurs contribuant
à la réticence de leurs parts à s’engager dans cette nouvelle mission

Même si le Revenu minimum d’insertion s’insère comme : « l’un des éléments d’un dispositif global de lutte contre la pauvreté tendant à supprimer toute forme d’exclusion »(article 1 de la loi du 1Décembre 1988) stipulant que la lutte contre la pauvreté s’inscrit dans la lutte contre l’exclusion, terme qui sous-tend le sentiment d’être exclu, nous devons bien nous rendre à l’évidence : le législateur parle d’une exclusion découlant d’un phénomène monétaire basé sur un besoin identifié à un critère : le niveau de revenu et c’est à une exclusion matérialisable par des données quantifiables : accès aux soins, à l’emploi, au logement.

La question psychique est évacuée car elle ne peut par essence même se matérialiser ; évacuation lourde de conséquence pour le sujet qui n’est appréhendé que comme existant
à travers un faire déconnecté de tout processus psychique. L’inconscient n’a pas sa place dans l’exclusion, il ne traverse pas le sujet exclu, celui ci n’est traversé que par des manques matérialisables qu’il faut combler.

Il va sans dire, que ma position de clinicienne, n’avait pas elle non plus sa place, et qu’elle était exclue du champ de pensée des institutionnels.

Je voudrais avant d’aborder mon cadre professionnel, citer M. Badel dont je me suis inspirée pour l’analyse du droit et du Revenu minimum : 

‘« Seule l’exclusion qui accompagne la pauvreté intéresse la protection sociale. Cette dernière en effet n’à que faire d’une exclusion qui n’accompagnerait pas une situation de besoin. La mission de lutte contre les exclusions de la protection sociale s’arrête là où la situation de besoin disparaît. »4
Notes
4.

Badel M, ibidem, p. 479