Les groupes internes

A partir de la notion de groupalité psychique qui est une organisation de la matière psychique et qui décrit un fonctionnement de l’appareil psychique, R. Kaës, introduit le concept de groupe interne qui :

‘ « Désigne des formations et des processus intrapsychiques du point de vue où les relations entre les éléments qui les constituent sont ordonnées par une structure de groupe. »105

Les groupes internes sont les organisateurs de l’appareil psychique groupal, ils sont au nombre de quatre :

‘« L’image du corps, la fantasmatique originaire, les complexes familiaux et imagoiques, l’image de l’appareil subjectif. »106

Les quatre points nodaux que nous avons dégagés sont des groupes internes et à ce titre, ils participent comme organisateurs psychiques du lien. 

En effet, les groupes internes permettent une  lecture :

‘« Des liaisons inter-et transpsychiques. Les groupes internes y  jouent un rôle d’organisateurs psychiques inconscients dans l’agencement
des liens intersubjectifs et des formations psychiques groupales à partir des propriétés de leur structure et des processus de liaison / déliaison qu’ils ordonnent. »107

Le point nodal du pacte narcissique de la mère, montre les enjeux dont sont pourvues les alliances inconscientes :

‘« Où les intérêts les plus profonds de chacun des sujets engagés dans le lien doivent demeurer par eux refoulés : pour préserver à la fois le lien, son objet et la loi qui l’ordonne, l’alliance comme instrument du refoulement et la position inconsciente de chacun dans le lien. »108

Dans l’étude thématique ainsi que dans l’analyse clinique des sujets, nous avons analysé les conséquences intrapsychiques dans le lien intersubjectif avec l’imago maternelle et la fonction paternelle. Nous allons maintenant les mettre en travail avec nos hypothèses.

Nous avons au cours de l’analyse thématique du discours des sujets, à travers les quatre points nodaux, mis en évidence le pacte narcissique de la mère des sujets : la naissance repousse une mort : mort d’un collatéral, d’un enfant ou mort équivalent d’un objet cryptoforme générationnel. Cette mère n’est pas « absorbée » par un deuil, mais par l’acte de naissance repoussoir d’une mort, absorption perçue par l’infans comme un abandon. C’est pourquoi, les sujets étudiés ont intériorisé une imago maternelle dont la mission inconsciente est de réparer les conséquences psychiques d’une mère endeuillée.

Cette particularité de l’acte procréateur de ces mères est basée sur la redevabilité, vis à vis du groupe d’origine ou du groupe créé, et la réparation non d’un sujet mort mais de l’acte même de procréation. L’enfant à naître sera alors don au groupe pour que ce don puisse remplir safonction réparatrice ;  la mère va considérer les dons de l’enfant comme un dû.

L’absence d’étayage groupal de ces mères a fait qu’elles n’ont pu intégrer la perte de cette mort, et d’une certaine manière se défaire de la maintenance de ce pacte narcissique où la naissance des sujets n’avait pas de place au nouveau qui vient de naître. Cette particularité de l’acte procréateur de ces mères a eu pour conséquence que les sujets ne peuvent unir la figure maternelle et la figure paternelle, car c’est le lien qui est énigme. Devant l’irreprésentabilité du désir d’enfant dans la psyché maternelle, le père sera celui qui psychiquement engendrera l’enfant dans la psyché maternelle. Cette occupation d’une place vide se traduira par le fantasme d’auto engendrement imaginaire paternel. Le père est le représentant psychique maternel dans l’acte de procréation. Pour arriver à s’originer, les sujets se vivent comme issus d’une représentation parthénogénétique paternelle.

Cette position psychique du père rend caduque son rôle de tiers, ce qui aura des conséquences sur la fonction psychique que l’argent aura pour les sujets.

Notes
105.

Kaës R, Le groupe et le sujet du groupe, p.130

106.

. Kaës R, ibidem, p.183

107.

Kaës R., ibidem, p.131

108.

Kaës R, ibidem, p.279